vendredi 9 novembre 2018

LE GRAND BAIN de Gilles Lellouche (2018) par Luc B.


Précédé d’une bonne réputation (et d’une promo éléphantesque) LE GRAND BAIN est en train de rafler la mise, et honnêtement, c’est mérité. Certains hurlent au remake, voire au plagiat (rien que ça !) de THE FULL MONTY… Mouais ok, sauf de nombreux films correspondent à ce modèle, comme les polars autour d'un casse de banque, ça se compte en milliers. On peut aussi penser à DODGEBALL, MEME PAS MAL ! (2004, gros délire hilarant avec Ben Stiller), puisqu’on retrouve une équipe de bras cassés, une compétition, et un entraineur odieux en fauteuil roulant. En réalité, la source d’inspiration de Gilles Lellouche est un documentaire suédois sur une équipe masculine de natation synchronisée.

Mais le propos n’est même pas là. Il s’agit de dresser le portrait de quinquas au creux de la vague, bousculés dans l’opinion qu’ils ont d’eux-mêmes, et surtout de celle de leurs entourages. Et qui se retrouvent le soir à la piscine, moins pour barboter dans la flotte que pour s’épancher dans les vestiaires sur leurs tristes sorts. Même pas une bande de potes, il y a plutôt de l’animosité entre eux, de méchantes saillies (Guillaume Canet est plutôt odieux, Anglade et sa musique rejetée) et rien ne dit qu’à la fin, ils resteront liés les uns aux autres.     

La gageure était de réussir les scènes chorales et les scènes individuelles, filmer le groupe et les parcours personnels, et savoir doser tout ça. Lellouche s’en sort bien, le film est bien construit, même si quelques personnages n'ont pas droit au même traitement, mais difficile sur la quinzaine de protagonistes. Bon équilibre entre les scènes burlesques et dramatiques, sachant qu'on rit justement des drames de nos héros...  

Le film fonctionne sur l’idée de : vous pensez que / en fait non. Exemple lorsque Philippe Katerine attablé au restaurant, sourit, rigole, filmé en plan serré. Sur le plan large on s’aperçoit qu’il est seul à sa petite table, et rit de ce qu'il entend à la table voisine. Lorsque qu’Amalric conduit sa voiture sans trop regarder la route, on songe au futur accident. Un travelling arrière nous montre en réalité la voiture sur une dépanneuse ! Donc il y a déjà eu l'accident !

Ou encore Virginie Efira entourée de ses nageurs, à la piscine, quand un type débarque (vu dans une scène précédente) agressif, commence à l'injurier. Les gars font bloc, expulsent le connard, pris pour un harceleur. Qui part en suppliant : « fous moi la paix, ça fait deux ans qu’on est séparé, j’ai une femme et un gosse, lâches-moi !! ». Paf ! Toute la scène bascule : c'était pas lui le lourdingue, mais elle. On pourrait citer aussi les scènes - cruelles - entre Guillaume Canet et Claire Nadeau, ou Jean Hughes Anglade, guitariste, 17 albums au compteur, qui s'accroche à ses rêves de rocker, mais… qui essuie les tables d’une cantine scolaire, la honte de sa fille. Sans doute le personnage le plus émouvant.         

C’est cette qualité d’écriture qui fait la réussite du film, les intrigues secondaires nourries, les p'tits détails. Une exigence qu’on ne voit pas souvent dans les comédies. Vous rajoutez à cela une mise en scène plutôt élaborée, cadres, lumières, mouvements de caméras, c'est soigné, Lellouche se fait plaisir. Le montage est elliptique, on gagne en rythme et en drôlerie. Première scène : Amalric dépressif (la poignée de pilules dans le bol de céréales au p’tit déj !) en peignoir sur le perron, salue femme et mômes qui partent travailler. Il se frappe dans ses mains, s’encourage « Allez hop ! » décidé à se secouer, la première journée de sa nouvelle vie... Image suivante : le même affalé sur le canapé à jouer à Candy Crush  

Dans un film choral la distribution doit être aux p’tits oignons. Venus du cinéma d’auteur (Amalric, Anglade, Moati) du cinéma comique (Poelvoorde, Ivanov), cinéma populaire mais "sérieux" (Canet, Efira, Bekhti), les comédiens sont tous justes, ne se tirent pas la bourre pour être de tous les plans. Moati arrive au milieu du film, comme Bekhti, Efira disparait de l'écran 20 minutes, Poelvoorde attend 3 bobines avant d'avoir un dialogue. On retient sans doute davantage les prestations d’Anglade et Poelvoorde (petit escroc vulgaire et pathétique), et du lunaire Philippe Katerine dans son rôle de… Katerine Philippe. Ce serait bien qu'il change un peu de registre. Le film est riche en situations comiques (le casse au Go Sport, Poelvoorde et ses combines minables, les entrainements, le sri lankais non sous-titré !) et en tirades qui font mouche. LE GRAND BAIN est un film généreux, qui laisse à voir autant qu’à entendre.

Dommage pour l’épilogue prévisible, improbable. Concession au happy-end. Car comment imaginer que ces gugusses bedonnants puissent gagner quoi que ce soit ? L'art de l'ellipse à ses limites ! La cruauté et l'ironie qui parcouraient le film, laissent place à un sentimentalisme limite mièvre, à l'image de la chanson de leur chorégraphie finale (Phil Collins, la BO est très 80's) soudainement tronquée pour laisser place aux violons hors sujet. Nos athlètes du dimanche auraient pu repartir bredouille, ça n'aurait pas changé grand chose, l'important est de participer, y parait...

couleur  -  2h05  -  format scope

 

1 commentaire:

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