lundi 29 mai 2017

SCHUBERT – Fantaisie en fa mineur à 4 mains D940 – M-J. PIRES & R. CASTRO – par Claude TOON




- Ô M'sieur Claude, je vous sens à cran… Lundi n'est pas votre jour de publication… Enfin bref, c'est connu cet air nostalgique… c'est quoi ?
- Ne me bombardez pas de questions Sonia ? J'assure une pige pendant que M'sieur Philou visite les bars de la 5ème Avenue à N.Y.. Donc un petit truc sympa de Schubert en début de semaine…
- Le piano à quatre mains est un truc qui m'épate… On doit avoir les doigts qui se marchent sur les pieds… hihihi…
- Très spirituelles ma chère vos figures de style. Cette charmante fantaisie est une œuvre tardive destinée à être jouée plutôt entre amis mais qui a survécu à l'oubli…
- Excusez-moi pour mon calembour facile M'sieur Claude, surtout quand il y a de la bouscule… Maria-João Pires est connue du blog mais pas Raúl Castro, je ne savais pas qu'il était pianiste le frère de Fidel…
- N'importe quoi Sonia !!!!! RICARDO Castro est un pianiste brésilien qui a enregistré ce CD avec la célèbre pianiste portugaise en 2003…

Maria João Pires  et Ricardo Castro
Si les œuvres pour piano solo ont déjà été souvent commentées dans ce blog : sonates, ballades, nocturnes, etc., je m'aperçois que le piano à quatre mains n'a jamais donné lieu au moindre petit billet. Pourtant, cette technique nous a offert des œuvres sympathiques voire importantes pour le répertoire pianistique. La fantaisie de Schubert proposée aujourd'hui est d'un intérêt comparable à ses sonates. On pourrait aussi citer des morceaux destinés aux concerts comme la suite Dolly de Fauré, la petite suite de Claude Debussy (un beau sujet pour une autre chronique pour sa fantasque poésie), des pièces de Brahms comme les valses
Souvent une œuvre symphonique voit le jour sur un clavier assailli par deux comparses : vingt doigts, une tessiture très large, c'est très suffisant pour travailler une future symphonie à l'orchestration la plus luxuriante comme celle d'un Mahler
Un des plus beaux exemples de la transcription du piano à l'orchestre reste Ma Mère l'Oye de Maurice Ravel, un ballet aux sonorités magiques dans les deux styles de jeu. Parfois, le travail se fait à l'inverse : une transcription aura lieu pour "réduire" un ouvrage symphonique pour piano à quatre mains. Il faut dire qu'à l'époque où la HIFI n'existait pas, les soirées entre amis musiciens donnaient lieu à des joutes entre pianistes sur le clavier. C'est le cas de Franz Schubert et ses célèbres et intimes schubertiades… De nombreuses partitions ont sans doute été perdues, mais la fantaisie en fa majeur a été éditée très rapidement et s'impose comme l'une des pièces les plus jouées de ce répertoire.
En théorie, l'un des pianistes (droite) est le leader, mais dans les œuvres les plus accomplies, le compositeur prévoit que les deux musiciens fassent néanmoins jeu égal…
J'ai d'ailleurs déniché une vidéo filmée lors d'un bis assuré par Lang Lang et Christoph Eschenbach qui a dû en première partie accompagner le virtuose chinois dans l'exécution d'un concerto. Ils jouent ainsi ensemble les deux premiers morceaux de la petite suite de Debussy, mais en échangeant leurs places à mi-parcours. Complicité et partage entre les deux générations…

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Soirée musicale chez Schubert
Nous avions écouté il y trois ans la sonate n°11 de Mozart et sa populaire "Marche Turque" dans un enregistrement de la pianiste portugaise Maria-João Pires. (Clic) Celle que j'avais surnommée la petite dame brune du piano avec malice, en pensant à la grande dame brune Barbara, poursuit une carrière déjà longue et éblouissante. Et je pense à ses gravures empreintes de sensibilité des nocturnes de Chopin, un album de référence.
D'origine brésilienne, le pianiste Ricardo Castro est également chef d'orchestre. C'est l'une des personnalités emblématiques de la vie musicale en Amérique Latine. Il parraine de nombreux ensembles entre son pays, le Venezuela, Le Salvador, etc. Il fut l'élève de Maria Tipo au conservatoire de Genève. Parallèlement à sa carrière de concertiste et de chef, il enseigne au conservatoire de Fribourg. Il est âge de 53 ans et appartient donc à la génération qui suit celle de Maria-João Pires.
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Alexandre Tharaud et Zhu Xiao-Mei
- Divertissement à la hongroise D818

- Fantaisie en Fa mineur D 940
La composition en 1828 de la fantaisie D940 marque un premier aboutissement du travail de Schubert pour le répertoire pianistique à quatre mains. Les quinze années précédentes ont donné lieu à l'écriture de pièces très variées : ländler, divertissements, variations… Citons le Divertissement à la hongroise D 818. La fantaisie D 940 adopte a priori une forme en quatre mouvements liés qui peut faire penser à une sonate mais avec une grande liberté d'architecture. Dans une sonate, chaque mouvement possède un matériau thématique qui lui est propre, même si des rappels peuvent apparaître dans le final. Dans la Fantaisie, c'est le touchant motif martial initial qui va marquer le début et la conclusion de l'ouvrage. Par ailleurs, Schubert qui aimait jouer avec les changements incessants de tonalité se limite ici à osciller entre le fa mineur, le ut majeur et le ut dièse mineur.
La fantaisie, d'une petite vingtaine de minutes comporte quatre mouvements : Allegro molto moderato / Largo / Scherzo. Allegro vivace / Finale. Allegro molto moderato. Les mouvements sont enchaînés sans pause assurant une continuité poétique certaine à l'ensemble.
Pas d'analyse sans grand intérêt pour cette fantaisie aux climats très inventifs. Je vous laisse rêver, vous projetez lors d'une soirée de 1828 où le compositeur jouera cette perle musicale assis à côté de Franz Lachner, un compositeur de sa génération qui atteindra, lui, l'âge canonique de 87 ans. La fantaisie était dédiée à Karoline Esterházy, l'un des amours platoniques de Schubert qui n'avait plus que quelques mois à vivre. Encouragé par le succès de la pièce, Schubert composera encore quelques œuvres pour le piano à quatre mains.
Le double CD de Maria João Pires et Ricardo Castro comprend d'autres pièces à quatre mains, ainsi que les sonates N°13 et n°14, chacune jouée par l'un des deux artistes. Une réussite !





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