A l'origine, le groupe « Indigenous » était une pure formation familiale, amérindienne de surcroît, composée des deux frères Mato Nanji "Mah-Toe Non-Gee" (chant & guitare,
compositeur), Pte "Peh-Tay" (basse), de la sœur, Wanbdi "Wan-ba-Dee" (batterie & chant), et du cousin, Horse (percussions). Ils sont issus d'une réserve Nakota, située dans le Sud Dakota. Le nom du groupe en dit long sur leurs revendications et "leur fierté" d'appartenir à un peuple encore oppressé de nos jours.
Un collectif fort sympathique, plein de jeunesse, qui se fait remarquer dès son premier essai, "Things We Do" en 1998. Un premier disque qui remporte les honneurs au Native American Music Award ; l'équivalent des Grammy Awards, mais dédié aux Natifs Américains... Car, oui, effectivement, si peu représentés, voire même ignorés, les Natifs ont dû créer leur propre manifestation musicale annuelle (qui pourrait être moins corrompue par l'industrie des majors) afin de promouvoir les artistes affiliés à ce peuple.
En aparté, on peut mentionner quelques artistes amérindiens qui semblent souffrir (ou ont souffert) de réticences et/ou de mauvaises volontés, tels que Joanne Shenandoah, John Trudell, Stevie Salas, Winterhawk, Floyd Red Crow Westerman (qui a été invité à jouer le shaman dans le film d'Oliver Stone, "The Doors"), Buffy Sainte-Marie, Redbones. Même Robbie Robertson paraît avoir été oublié, surtout depuis qu'il fait resurgir dans sa musique l'essence de ses racines, les traditions de ses ancêtres et de son peuple.
Rappelons très rapidement que c'est l'exemple des réserves "indiennes" (plus exactement américaines pour les peuples amérindiens) qui avait tristement inspirée Hilter. D'ailleurs dans les traités d'origines (des USA), il est bien écrit "concentration camp" (!). Choquant mais réel.
En 2006, après "Chasing The Sun", le collectif familial implose. Mato Nanji remonte un groupe sous la même appellation, avec Chaney Bryant à la basse et Ray Mehlbaum (Flogging Molly, Rhett Forrester, Tony Franklin, Spencer Davis, Automatic 7) à la batterie. Cette nouvelle mouture ne dure que le temps de quelques tournées. Mato (ou est-ce le label Vanguard ?) fait appel au Kris Lager Band pour quelques concerts et enregistrer ce "Broken Lands". Mais qu'importe, puisque Mato demeure le compositeur et leader. Le son et l'orientation musicale, c'est lui. Et donc par vraiment de réel changement.
Il recrute sa femme, Leah, en qualité de co-compositeur et de choriste. La douceur et la fermeté de sa voix, souvent en doublage du chant de Mato, tout en restant en retrait, apportent un brin de fraîcheur, comme une brise bienvenue sur une terre accablée par la chaleur.
Le timbre et l'intonation de Mato, lui, se situent dans la catégorie de ces voix nonchalantes, un peu traînantes, certes limitées mais toutefois expressives. Telles que celle de Vaughan (principalement ici), Hendrix et Clapton (on retrouve les mêmes)
La présente musique est une fusion entre l' Americana (du style, par exemple, de celui de l'album « Anytime Tomorrow » de Neal Casal ), et le Blues, Blues-rock. Les ingrédients Blues et Blues-rock rappellent principalement par bien des côtés Stevie Ray Vaughan (plus évident encore sur le précédent opus, nettement plus Blues-rock, « Chasing the Sun »), ainsi que Jimi Hendrix, dont il reprend quelques uns de ses titres sur scène (il rejoindra le Jimi Hendrix Tour Experience où il jouera aux côté d'Eric Gales et de Kenny Wayne Sheperd). Et tout comme ces derniers, ça sent la Stratocaster et les amplis à lampes à plein nez,(j'aurais volontiers mentionné un Fender Bassman, mais on peut voir, sur Youtube, Mato utiliser un double corps Marshall) ; avec une wah-wah qui arrive en renfort de temps à autre, ou une saturation plus prononcée (le grain d'une Tube Screamer, d'une Electro-Harmonix tempérée ou d'une Blues Driver). Hendrix, surtout pour le côté rythmique chaloupée, légèrement Funky, les accords ; Stevie, pour le phrasé de certains chorus, et les titres plus enlevés. Une petite approche Santana (ère Gregg Rolie) également, apportée par les percussions aux rythmes parfois latins, et plus évidents encore sur des titres comme « All I want to see » ou « Still Remember ». Il convient aussi de rajouter Los Lobos (en 2012, il enregistre avec David Hidalgo, et Luther Dickinson, un disque anecdotique : "3 Skulls and the Truth"), Doyle Bramhall (père & fils), Clapton, et même Creedence (« Make a Change »). Quant au son général, il y a un lien étroit avec Mark Selby (celui de « More Storm Comin' » et de « Nine Pound Hammer »).
D'ailleurs certaines structures de chansons
abordent le style de Selby ("Place I know"). [Mark Selby qui a aussi pas mal composé pour Kenny Wayne Sheperd]
Une fusion donc des genres (par si éloignés les uns des autres), qui
donne un Blues-rock racé, œuvrant généralement en mid-tempo (exempté ici de
shuffle effréné à la SRV), proche d'un
Americana à la Neal Casal, plaisant, vibrant, revigorant, émotionnel, exempt de
pathos et de clichés (même si les soli restent naturellement en gamme
pentatonique). Une musique franche, organique et pure, sans concession, loin de
tous clichés commerciaux.
Peut-être est-ce de l’auto-sujétion, mais certaines pièces font surgir des images d'enfants amérindiens souriant à pleines dents, de vieux sages à la peau buriné et aux visages fermées, traversés de rides (creusées plus par l'injustice subie que par le soleil), dans un paysage poussiéreux ponctué de quelques bâtisses et abris précaires.
Pour la réalisation de ce "Broken Lands", Mato s'est adjoint les services de Kris Lager à la guitare (Kris Lager Band), de Jeremiah Weir aux claviers, d'Aaron Wright à la basse, de John Fairchild à la batterie (Kris Larger Band), et de Chico Perez et de Leah Nanji aux percussions.
Produit par Jamie Candiloro (The Eagles, R.E.M., Ryan Adams).
Indigenous est présent sur l'excellente, et bien nommée compilation, "Indian Rezervation : Blues And More" (édité chez Dixiefrog), qui regroupe différents artistes et groupes amérindiens, qui ont rarement l'occasion (jamais ?) d'avoir une couverture médiatique, sur les ondes ou par presse, et qui ont des difficultés à obtenir des dates de concerts. D'ailleurs, ce n'est que depuis sa signature sur Vanguard qu'Indigenous commence à sortir de l'ombre.
Par la suite, Indigenous, peut-être déçu par un succès en chute (en comparaison des trois précédents qui étaient parvenus à gravir le podium du peloton de tête du Billboard Top Blues Albums) quitte Vanguard (après un dernier disque en 2010, "Acoustic Sessions") pour rejoindre un des labels de Mike Varney : Blues Bureau International.
Peut-être pas la meilleure idée, car le Varney en question, un boulimique des soli débridés de guitares, semble inciter (insister ?) les musiciens à en faire un max sur leur six-cordes, ainsi qu'à durcir leur son et/ou le caractère de leur musique. Parfois, malheureusement, cela porte préjudice à la qualité de la musique et à son caractère. Depuis sa création, la grande majorité des réalisations de ce label pèche par une production et un mixage identique (à peu de choses près). Ainsi, les artistes signés par Varney enregistrent, et se perdent parfois, dans une production standardisée. Ce sera donc le cas pour Indigenous qui prendra des allures nettement plus Blues-Rock US communs au détriment d'une partie de sa personnalité. On a exacerbé le côté guitar-hero de Manto Nanji au détriment de ses talents de compositeurs.
Reste cet excellent CD, à mon sens, le pinacle de la carrière d'Indigenous.
P.S. : Dans la pure tradition de bon nombre de peuples amérindiens, écologistes avant l'heure, respectueux de la nature depuis toujours, le digipack de ce disque a été élaboré à partir de produits recyclés.
place I know
should I stay
Un autre amérindien de talent (liens - clic) :
Peut-être est-ce de l’auto-sujétion, mais certaines pièces font surgir des images d'enfants amérindiens souriant à pleines dents, de vieux sages à la peau buriné et aux visages fermées, traversés de rides (creusées plus par l'injustice subie que par le soleil), dans un paysage poussiéreux ponctué de quelques bâtisses et abris précaires.
Pour la réalisation de ce "Broken Lands", Mato s'est adjoint les services de Kris Lager à la guitare (Kris Lager Band), de Jeremiah Weir aux claviers, d'Aaron Wright à la basse, de John Fairchild à la batterie (Kris Larger Band), et de Chico Perez et de Leah Nanji aux percussions.
Produit par Jamie Candiloro (The Eagles, R.E.M., Ryan Adams).
Indigenous est présent sur l'excellente, et bien nommée compilation, "Indian Rezervation : Blues And More" (édité chez Dixiefrog), qui regroupe différents artistes et groupes amérindiens, qui ont rarement l'occasion (jamais ?) d'avoir une couverture médiatique, sur les ondes ou par presse, et qui ont des difficultés à obtenir des dates de concerts. D'ailleurs, ce n'est que depuis sa signature sur Vanguard qu'Indigenous commence à sortir de l'ombre.
Par la suite, Indigenous, peut-être déçu par un succès en chute (en comparaison des trois précédents qui étaient parvenus à gravir le podium du peloton de tête du Billboard Top Blues Albums) quitte Vanguard (après un dernier disque en 2010, "Acoustic Sessions") pour rejoindre un des labels de Mike Varney : Blues Bureau International.
Peut-être pas la meilleure idée, car le Varney en question, un boulimique des soli débridés de guitares, semble inciter (insister ?) les musiciens à en faire un max sur leur six-cordes, ainsi qu'à durcir leur son et/ou le caractère de leur musique. Parfois, malheureusement, cela porte préjudice à la qualité de la musique et à son caractère. Depuis sa création, la grande majorité des réalisations de ce label pèche par une production et un mixage identique (à peu de choses près). Ainsi, les artistes signés par Varney enregistrent, et se perdent parfois, dans une production standardisée. Ce sera donc le cas pour Indigenous qui prendra des allures nettement plus Blues-Rock US communs au détriment d'une partie de sa personnalité. On a exacerbé le côté guitar-hero de Manto Nanji au détriment de ses talents de compositeurs.
Reste cet excellent CD, à mon sens, le pinacle de la carrière d'Indigenous.
P.S. : Dans la pure tradition de bon nombre de peuples amérindiens, écologistes avant l'heure, respectueux de la nature depuis toujours, le digipack de ce disque a été élaboré à partir de produits recyclés.
place I know
should I stay
Un autre amérindien de talent (liens - clic) :
D'accord avec toi Bruno, ce "Broken Lands" reste à ce jour leur meilleur opus bien que les autres ne soient pas mauvais. C'est d'ailleurs avec ce cd que j'ai découvert Indigenous. En revanche la discographie solo de Mato Nanji intéressante au début n'est plus à la hauteur. Le guitariste semble s'être égaré et nous sort des opus vains et répétitifs (surtout les deux derniers) . Par contre le disque du trio David Hidalgo, Luther Dickinson et Mato Nanji "3 Skulls and the Truth" sorti en 2012 est excellent! Je te le recommande. Amicalement.
RépondreSupprimerJe m'étais précipité sur ce "3 Skulls and the Truth", mais j'avais plutôt été déçu du résultat. Probablement que j'en attendais trop.
SupprimerM'étant replongé dans Indigenous pour ma p'tite chronique, j'ai commencé à le réécouter il y a peu, lui trouvant alors d'autres attraits. Cependant, il me paraît inégal. Sensation fondée lorsque l'on consulte les crédits : Mato Nanji compose 4/5 chansons (probablement les meilleures). Luther Dickinson quelques unes en partenariat. Mike Varney s'occupe du reste (un tiers de mémoire), et là, on plonge en plein Blues-rock velu et... conventionnel.