Edward et Nina Grieg XX XX |
Musique légère en cette période estivale… suite.
Musique brésilienne chamarrée de Respighi
la semaine passée ; nostalgie de l'époque baroque aujourd'hui. Il me semble
avoir remarqué avec nos indices d'audience que la musique pour orchestres à cordes
avait ses adeptes. Sans aucun doute la sonorité velouté des cordes prête plus à
la détente que les éclats des cuivres et percussions des orchestres
symphoniques. D'où le choix de ce jour : la jolie et courte suite pour cordes
dite "du temps de Holberg" du
compositeur norvégien Edward Grieg.
Par ailleurs, chaque été, je puise dans la
discographie festive de l'ensemble américain Orpheus
Chamber Orchestra, un orchestre composé des meilleurs solistes
de la côte est des USA, qui sait donner toute la légèreté inhérente à ces œuvres
pour effectifs réduits.
Cet ensemble a déjà permis l'écoute d'œuvres divertissantes
de l'époque baroque : les célébrissimes adagio
d'Albinoni et canon
de Pachelbel, également des airs de Bach,
Haendel, etc. (Clic), mais aussi des
incursions dans l'âge classique comme la symphonie N° 49
"Passione" de Haydn
et le concerto pour flûte et harpe
de Mozart (Clic).
Quant à Grieg,
nous ne l'avons rencontré qu'une seule fois depuis quatre ans ! Bien évidement
cet unique article était consacré à son œuvre la plus connue : la musique de scène pour Peer Gynt, la tragédie de Ibsen. Tout le monde connaît des
passages incontournables comme "Le matin"
utilisé dans les films (soleil vert –
pendant que Edward G. Robinson se
laisse mourir et que les images d'un ancien paradis terrestre défilent) ou la
farouche marche diabolique "Dans la salle du
Roi de la montagne" entendu dans moult publicités. Dans cette
chronique de 2012, figurait la
biographie d'Edward Grieg (1843-1907). Ce compositeur appartient à
l'époque romantique et dans ses ouvrages, on sent l'influence qu'ont pu avoir
ses contemporains et amis comme Liszt,
Brahms ou encore Tchaïkovski,
lui-même auteur d'une belle sérénade pour cordes qui figure en complément sur
ce disque de l'ensemble Orpheus
(Clic).
Grieg n'a pas
écrit une multitude d'œuvres symphoniques. Pianiste virtuose, il a composé de
nombreuses pièces pour cet instrument solo ou intégré à des sonates et trio
et, bien entendu, un concerto,
morceau de bravoure pour pianiste de renom, et dont je parlerai un jour…
La suite "du temps de
Holberg" est donc un ouvrage à part dans sa production mais
très fréquemment joué par les chefs d'orchestre. Je citerai Neville Marinner et Herbert
von Karajan, le maestro autrichien l'ayant enregistré au moins deux fois
dont une dernière mouture à l'ère du numérique. Une musique aisée à écouter et
pourtant de belle facture mélodique.
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Ludvig Holberg (1684-1754) |
Ludvig Holberg (1684-1754)
est le fondateur de la littérature nordique écrite dans les langues autres que
le latin qui était d'usage courant en Scandinavie. L'écrivain né en Norvège à Bergen a aussi beaucoup travaillé à Copenhague.
Edward Grieg va donc
composer en 1884 cette suite pour
célébrer le bicentenaire de l'écrivain. Le personnage étant un quasi
contemporain de Bach, donc du début du
siècle des lumières et du Baroque tardif, Grieg
va nous replonger dans cette époque où les danses de cour étaient très à la
mode. Le choix d'un ensemble de cordes se justifie si l'on considère
qu'un autre musicien de la même époque nommé Haendel
a composé des cahiers entiers de concertos grosso pour les cordes seules.
Les connaisseurs des ouvertures
(ou suites pour orchestre) de Bach ne seront pas surpris de la manière
dont Grieg a découpé sa partition en cinq
parties dont un prélude et trois danses dans le style ancien. Faites le test en
aveugle de la liste ci-dessous à un ami mélomane et amateur des suites pour violoncelles et il vous
répondra immanquablement… Heuuu, on dirait une suite
de Bach… Le résultat du projet de Grieg sera tout sauf un plagiat, mais un
moment jouissif de musique. A noter que Grieg a d'abord écrit la suite pour piano avant d'en assurer la transcription pour un orchestre à cordes.
1 - Prélude
2 - Sarabande xxxxx
3 - Gavotte
|
4 - Air (Andante religioso)
5 - Rigaudon
|
1 – Prélude (Allagro
vivace) : Les suites de Bach ou Le water Music de Haendel ont
pour coutume de débuter par une ouverture "à la français", solennelle
parfois empesée… Ici tout au contraire, Grieg
mène la danse dans un morceau rythmée et séducteur. La mélodie très scandée
conduit les cordes vers un climat trépidant de fête populaire. Orpheus Chamber Orchestra ne se laisse pas
prendre au jeu emphatique des brumes nordiques. Cet ensemble qui joue sans chef
articule avec élégance et jubilation cette introduction, soulignant par
l'écriture de type sonate l'hommage à la facétie baroque et articulant fermement
le discours pour affirmer le regard vers la modernité.
Gavotte |
2 – [2:40]
Sarabande (andante) : D'origine latino, la sarabande est une danse lente
et lascive (La sarabande de Haendel
dans Barry Lyndon de Kubrick). Le compositeur ne conserve
que la rythmique assez libre de cette danse pour apporter un moment doux et
poétique dans ce second morceau. Les premières mesures se développent dans un
climat nocturne. On songe plus à une ambiance pastorale qu'à une soirée
princière. Les solos de violoncelles dans le phrasé feutré lorgnent vers un concerto
grosso néoclassique.
3 – [6:39] Gavotte
(Allegretto) : Grieg
enchaîne sur une gavotte, une danse d'origine provençale dans laquelle souffle
un air de gaité. Les parties de cordes s'entrecroisent avec vivacité. Et puis,
le compositeur destine également la pièce à un rôle de menuet via une structure
symétrique, en intercalant un air de musette dans la partie centrale.
4 – [9:52] Air (Andante
religioso) : Grieg
à l'instar de Bach ajoute un long aria qui, bien que noté andante, fait songer
aux méditations adagio métaphasiques dont le Cantor raffolait. La mélodie nostalgique
avec un accent appuyé des cordes graves nous fait évader du monde de la danse.
Gravité et nostalgie de déploient dans ce mouvement plus développé dans lequel
les ruptures de ton évitent toute monotonie. Le travail sur la distribution des
solos des différents pupitres est exemplaire. À la fois élégiaque et
bouleversant. Grieg a composé plusieurs morceaux romantiques pour
cordes de ce style pour illustrer à sa manière des impressions picturales sur
la béauté des forêts et des lumières scandinaves. La maison de Grieg se trouvait près d'un lac de la
région d'Oslo…
4 – [16:26] Rigaudon (Allegro
con brio) : Cette danse animée, d'origine provençale, sera très
à la mode dans les cours européennes de l'époque baroque. Rameau
en a composé un certain nombre pour les fêtes versaillaises, et Maurice Ravel en a utilisé la rythmique
dans le tombeau de Couperin. Grieg achève sa suite avec un contraste marqué
entre des passages à la vélocité contenue, et de frénétiques motifs concertants
intégrant un violon solo, et dont la ligne de chant rappelle plus la passion débordante
d'un Paganini que le XVIIIème siècle…
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