vendredi 26 juin 2015

LE FUNAMBULE de James Marsh (2008) par Luc B.



C’est un documentaire qui m’a ému aux larmes… si si… tellement ce que réalise son héros est beau. Un mec qui marche sur un fil entre les deux tours. Pas de la présidentielle, mais du World Trade Center, à New York.

Cet homme, c’est le français Philippe Petit, acrobate, funambule. Il a réalisé quelques numéros célèbres, à Paris sur Notre Dame, à Sydney, mais ce qu’il a fait à Manhattan en août 1974, tient du miracle ! Est-ce que vous imaginez ? Est-ce que vous visualisez ? Traverser sur un fil entre deux immeubles culminant à 415 mètres ! Cette expédition est racontée par le menu dans ce documentaire de James Marsh.

Première question : est-ce autorisé de faire ça ? Non. Donc il s’agit d’une expédition clandestine. Un défi, un rêve. Pas une opération de com' pour une boisson énergisante. A cette date, le World Trade Center était tout juste inauguré, mais il était encore inoccupé. Sauf par les gars de la sécurité. L'équipe de Philippe Petit fait les premiers repérages en se faisant passer pour une équipe télé. Deuxième question : mais comment on fait pour tendre un câble entre deux buildings, à  cette altitude ?

Le réalisateur James Marsh nous raconte ça à la manière d'un film à suspens. On connait la fin, mais comment y est-on arrivé ? Il bénéficie des témoignages de Philippe Petit, ses complices, amis, sa femme. On les sent encore émus et éberlués 30 ans après par ce qu’ils ont réalisé. On voit des photos et films d’époque, puisque Petit a filmé l’évènement, archives télés. James Marsh a aussi reconstitué des scènes, toutes en ombres, gros plans, jouant avec les codes des films de braquages. On pense à LE GANG ANDERSON de Sidney Lumet, notamment [ chroniqué ici - clic ]. Le film est donc un montage de plusieurs types d’images, agencées en récit passionnant. On suit le déroulement de l’expédition, sa préparation minutieuse, technique, la gestion des imprévus, puisque forcément, il n'y a pas eu de répétition sur place... 

On nous raconte tout, jusqu’à l’arrestation de Philippe Petit, cueilli par les flics à la fin de son numéro. Car ils ne sont pas allés le chercher sur son fil ! Scène assez drôle, comme un Chaplin narguant la police. Et comme pour Alain Robert, qui gravit des immeubles à main nu, une fois coffré, il signe plus d’autographes qu’il ne paie d’amende ! Philippe Petit raconte aussi sans fausse pudeur les conséquences, les dégâts collatéraux dans sa vie privée.

Pour tendre le filin, ils ont utilisé la bonne vieille technique de l’arc et de la flèche, à laquelle était attachée une ficelle, et à cette ficelle un câble… Il y avait un complice sur le toit de la seconde tour. Mais comment sont-ils montés ? Les ascenseurs, ça fait du bruit, ils auraient été repérés. Ils ont pris les escaliers,110 étages, avec le matos sur le dos, et les rondes des gardiens ! Le montage des armatures doit se faire dans le plus grand silence, le plus discrètement possible. Là aussi la mise en scène s'amuse avec les codes du thriller, les pieds nickelés ne devant pas se faire choper par une ronde.

Je vous passe les détails, nombreux et cocasses, mais on attend évidemment le moment crucial : la traversée. Et là, c’est à pleurer... de trouille d'abord, puis d'émotion de voir ce bonhomme à 400 mètres du sol, dans la brume du petit matin, à peine visible depuis le sol. Ses amis sont là, sur les toits ou en bas, la tête levée vers le ciel, et forcément, les badauds font pareil. Philippe Petit, sur son fil, seul, décontracté, apaisé, marche, s’arrête, danse, s’allonge, profite au maximum du moment. Il sait que les flics sont là. C’est hallucinant. Le truc parfaitement inutile en soi, mais qui réconcilie immédiatement avec l’Humanité. La beauté du geste…

Moi, mes défis, c'est du genre : tiens ce soir je rentre du boulot à pieds... waouh... Là, Philippe Petit et ses potes bab's fumeurs de joints (ce qui pourrait expliquer comment ils ont eu cette idée de dingue !) c'est : tiens, je vais funambuler entre le World Trade Center... On n'se sent pas grand chose parfois...  

Il est étrange de savoir ces deux tours associées à deux évènements aussi contraires, l'exploit sportif et poétique d'un homme, en 1974, et leur destruction barbare avec deux avions, en 2001.

Le réalisateur Robert Zemeckis (FORREST GUMP, SEUL AU MONDE, RETOUR VERS LE FUTUR...) en tourne une adaptation cinéma à grand renfort de 3D et de numérique. Je ne sais pas ce que ça donnera. On en reparlera, ou pas, en septembre...

MAN ON WIRE
couleur  -  1h30  -  1:33 / 1:85



ooo

3 commentaires:

  1. Je me souviens très bien de cet événement relayé par les actualités françaises. Et parfois commenté - par les médias et les "bons" citoyens - sur un ton désapprobateur (on a cassé un instant la routine et la "tranquillité" ; mais pourquoi fait-il ça ? A quoi ça rime ?) .

    Le pire, c'est que le gars a fait ça avec un pantalon "pattes d'éph" !! Trop fort !
    Et en plus, il y a une gueule de cinéma.

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  2. Il a un côté angélique, à la Chet Baker.... Oh oui, les pattes d'eph... Et il ne se prend pas les pieds dedans !!

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    1. Oui, c'est ça, Chet Baker ! Effectivement.
      A un moment, sur une image, j'avais cru voir Steve Winwood.

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