Juliette Gréco = une enfance dans la tourmente
Le 7 février de cette année
Juliette Gréco a eu 88 ans et
cette légende de la chanson française commencera sa tournée d’adieu au
printemps de Bourges en Avril 2015. Un dernier tour de chant pour
dire «Merci».
Mais la route pour arriver jusqu’au sommet fut longue et difficile. Elle
voit le jour à Montpellier en 1927 d’un père policier Corse et d’une
mère Bordelaise. Ses parents étant séparés, elle sera élevée, avec sa sœur
aînée Charlotte, par ses grands parents maternels à Talence. En
1936 son grand-père décède et sa grand-mère ne peut plus assumer
seule son éducation. Sa mère vient les rejoindre et elles partent toutes les
trois s’installer à Paris.
Juliette et Charlotte |
En 1939, elle s’adonne avec passion à la danse et entre comme petit
rat à l’école de danse de l’Opéra de Paris. A la déclaration de guerre,
toute la petite famille se retrouve dans le Périgord. Sa mère vivra une
histoire d’amour avec
Antoinette Soulas poétesse bien connue pour
avoir traduit les poèmes de
Rudyard Kipling. Elle et Juliette
Lafeychine (La mère de
Juliette Gréco) achètent une propriété isolée où elles comptent vivre en sécurité pendant
le conflit armé. Des les premières heures, Juliette mère et Antoinette
s’engagent dans la résistance et la maison devient un important lieu
de passage du réseau clandestin.
Hélène Duc |
En septembre 1943, Juliette, sa mère et sa sœur sont arrêtés par la
Gestapo. Sa mère et Charlotte seront déportées à Ravensbrück et se
retrouveront dans le même block que
Simone Veil et
Yvonne de Gaulle.
Juliette qui n’a que 16 ans échappera à
la déportation mais sera emprisonnée à la prison de Fresnes. Elle sera
relâchée au mois d’octobre. Elle n’arrivera pas à reprendre contact avec
Antoinette Soulas qui se cache dans le
midi. Une fois libérée, elle se retrouve seule et sans argent sur le pavé
parisien. Elle ne connaît qu’une seule personne dans la Capitale, la
comédienne Hélène
Duc (Connue pour ses rôles au théâtre, au cinéma et à la télévision comme dans
«Les Rois Maudits») qui est une amie de sa mère et a été son ancien professeur de français
lors d’un séjour à Bergerac. Cette dernière l’hébergera jusqu’à la fin du
conflit. Pour avoir sauvé des dizaines de juifs, Hélène
Duc sera nommée juste parmi les nations.
N’ayant pour vêtements qu’une petite robe bleue marine, une veste légère et des chaussures en raphia, elle récupérera auprès des garçons, de vieilles vestes, de vieux pantalons et une paire de chaussures donné par Alice Sapritch, une amie d’Hélène Duc. Sans le vouloir, le style qui plus tard deviendra celui de Saint-Germain-des-Prés vient d’être créé. Juliette découvre l’art dramatique, échoue au concours d’entrée au conservatoire, mais réussie à décrocher quelques figurations à la Comédie Française. Elle traîne sur la Rive gauche de la Seine dans le Quartier Latin et à Saint-Germain-des-Prés où elle découvre la vie artistique, intellectuelle et politique avec les jeunesses Communistes qu’elle fréquentera. En 1945, à la libération, elle se rend quotidiennement à l’hôtel Lutetia où arrivent les déportés survivants et, par miracle, elle retrouve sa sœur et sa mère vivantes. Tout le monde repart en Dordogne pour quelques temps. Leur mère s’engage dans la marine nationale et part avec le corps expéditionnaire français en Indochine. Juliette et Charlotte retournent sur Paris où la liberté retrouvée des parisiens et l’arrivée de la musique américaine donnent de nouvelles perspectives à la culture musicale. Juliette reprend la route de Saint-Germain-des-Prés, vit de petits boulots et d’expédients. Hélène Duc l’envoie prendre des cours d’art dramatique. Juliette décroche quelques rôles au théâtre et travaille sur une émission de radio consacrée à la poésie. Elle ne mange pas tous les jours, mais elle croise dans les bars les hautes sphères artistiques de l’époque comme Camus, Sartre ou Duras.
N’ayant pour vêtements qu’une petite robe bleue marine, une veste légère et des chaussures en raphia, elle récupérera auprès des garçons, de vieilles vestes, de vieux pantalons et une paire de chaussures donné par Alice Sapritch, une amie d’Hélène Duc. Sans le vouloir, le style qui plus tard deviendra celui de Saint-Germain-des-Prés vient d’être créé. Juliette découvre l’art dramatique, échoue au concours d’entrée au conservatoire, mais réussie à décrocher quelques figurations à la Comédie Française. Elle traîne sur la Rive gauche de la Seine dans le Quartier Latin et à Saint-Germain-des-Prés où elle découvre la vie artistique, intellectuelle et politique avec les jeunesses Communistes qu’elle fréquentera. En 1945, à la libération, elle se rend quotidiennement à l’hôtel Lutetia où arrivent les déportés survivants et, par miracle, elle retrouve sa sœur et sa mère vivantes. Tout le monde repart en Dordogne pour quelques temps. Leur mère s’engage dans la marine nationale et part avec le corps expéditionnaire français en Indochine. Juliette et Charlotte retournent sur Paris où la liberté retrouvée des parisiens et l’arrivée de la musique américaine donnent de nouvelles perspectives à la culture musicale. Juliette reprend la route de Saint-Germain-des-Prés, vit de petits boulots et d’expédients. Hélène Duc l’envoie prendre des cours d’art dramatique. Juliette décroche quelques rôles au théâtre et travaille sur une émission de radio consacrée à la poésie. Elle ne mange pas tous les jours, mais elle croise dans les bars les hautes sphères artistiques de l’époque comme Camus, Sartre ou Duras.
Juliette Gréco et la bohème
Avec Boris Vian |
Avec Miles Davis |
1949, elle participe à la réouverture du cabaret «Le
Bœuf sur le Toit» (Oui Claude ! Comme l’œuvre musical de
Darius Milhaud). Elle rencontre Miles Davis et tombe
amoureuse du trompettiste noir américain. Ce dernier hésite à l’épouser à
cause de la ségrégation raciale dans son pays ou l’union entre un noir et
une blanche est interdit dans de nombreux États. Il ne veut pas lui imposer
la vie en tant qu’épouse d’un noir au États-Unis et elle ne veut pas
abandonner sa carrière naissante en France. Ils renoncent et le jazzman
rentre dans son pays. Avec cette rencontre, elle deviendra une militante
active des droits civiques et de l’antiracisme.
rive gauche et n’est pas encore connue du grand public. En 1951,
elle enregistre son premier album «Je suis comme je
suis» et recevra le prix de la SACEM avec la chanson «Je
hais les dimanches» signée par Charles Aznavour. Elle part
en tournée au Brésil et aux États-Unis où elle rencontre le succès dans la
revue «April in Paris». De retour en France, elle se lance dans une grande tournée. La
consécration aura lieu sur la scène de l’Olympia en 1954.
Après un aller-retour à New-York, elle rencontre un jeune musicien qui est
en train de rajeunir la chanson française :
Serge Gainsbourg. Il lui écrira des
chansons pendant cinq ans et elle en enregistrera une dizaine dont «La Javanaise» en 1963. Ce ne sera que la première chanson qu’elle va créer ou
reprendre, plusieurs autres suivront comme «Il n’y a
plus d’après» de Guy Béart et «Jolie Môme» de Léo Ferré. Durant les années
60, elle va virevolter entre Bobino et l’Olympia. En 1966 elle
est sur la scène du TNP (Théâtre National de Paris) avec
Georges Brassens. Dans les années
50, elle avait déjà interprété «Chanson pour l’Auvergnat». L’année suivante, elle reprend «La chanson des vieux
amants» de Jacques Brel. Elle chantera
aussi devant 60.000 personnes à Berlin.
Devant le rideau rouge du théâtre de la ville, vêtue d’une robe noir, elle
y interprète l’une de ses chansons les plus célèbres «Déshabillez moi». Un titre qui passera à la télévision avec un rectangle blanc.
Dans les années 70, elle parcourt le monde avec des tournées :
Canada, Japon, Italie, Allemagne... Elle devient plus discrète en France
suite à plusieurs changements de maison de disque. Elle marque le pas dans
sa carrière. Ce qui ne l’empêche pas de graver dans la cire deux albums «Vivre» et «Gréco chante
Brel». Une décennie plus tard, elle écrit ses mémoires «Jujube» (Édition Stock 1982) et continue à enregistrer avec des
auteurs venant d’horizons les plus variés comme le dessinateur de BD
Gébé. En 1984, elle est faite
Chevalier de la légion d’honneur.
Entre l’Olympia, le théâtre de l’Odéon, La salle Pleyel et le théâtre du
Châtelet, elle continue sa route avec les années à enregistrer et à tourner.
En mars 2007, aux victoires de la musique, elle reçoit une «victoire d’honneur» pour l’ensemble de sa carrière. Et toujours, elle continue les
collaborations avec de jeunes auteurs qui ne sont pas de sa génération mais
au talent certain comme Gérard Manset,
Art Mengo,
Christophe Miossec ou
Benjamin Biolay. Elle reçoit la grande
médaille de vermeil de la ville de Paris en 2012, elle repart en
Allemagne pour un concert à guichets fermés devant un public qui lui fera
une standing ovation. En décembre, elle est élevée au rang de commandeur de
la légion d’honneur. Devant une vie aussi intense, elle fera un malaise sur
scène en 2013 au festival de Ramatuelle.
Gréco et ses frères
"Les racines du ciel" avec Errol Flynn |
Autant Juliette Gréco est
reconnue mondialement comme chanteuse, autant elle l’est moins en tant
qu’actrice et pourtant avec 32 films à son actif, et pas avec n’importe
quels réalisateurs. Sur sa carte de visite, les noms de
Julien Duvivier,
Jean-Paul Le Chanois,
Jean-Pierre Melville,
Jean Renoir, Jean Cocteau et
André Cayatte côtoient
Otto Preminger,
Henry King,
John Houston,
Richard Fleischer et
Anatole Litvak. Qui pourrait s’enorgueillir
d’une telle brochette de prestigieux réalisateurs ? Sa première
apparition date de 1948 où comme beaucoup d’acteurs, elle fait de la
figuration et apparaît en religieuse dans le film «Les Frères
Bouquinquant». Jean Cocteau sera le premier à lui
donner un rôle plus important dans «Orphée». Mais de tous les films qu’elle a pu tourner, peu ou pas de grands
chefs-d’œuvres. «Bonjour
tristesse» ou elle joue son propre rôle, « Les racines du ciel» en 1958 avec un
Errol Flynn vieillissant qui décédera un an
plus tard.
En 2001, elle fera un clin d’œil dans le film «Belphégor, le fantôme du Louvre» en assurant la figuration d’une dame qui passe dans le cimetière. En
1965, Belphégor va effrayer toute une génération de français. Elle
interprète un triple rôle dans l’adaptation télévisée du roman d’André
Bernède et tourné par
Claude Barma. Cette série en 4 épisodes de
70 minutes chacun attirera 10 millions de spectateurs, sachant qu’à l’époque
seulement 40 % possédaient un poste de télévision soit 48 millions de
personnes, l’audience était exceptionnelle. (Claude a vu ça à l'époque, vous
vous rendez-compte, notre cœlacanthe du Deblocnot !!)
Juliette Gréco
joue exactement trois rôles, Belphégor, Laurence et sa sœur jumelle. A ses
cotés, le jeune commissaire Moulin,
Yves Rénier. Pour la petite histoire le
rôle de Belphégor était joué par le mime
Isaac Alvarez.
Le cinéma lui apportera aussi l’amour... Son premier mari sera
Philippe Lemaire connu au cinéma pour ses
rôles dans la série des «Angélique
marquise des Anges». Elle l’épousera en 1953 mais ils se sépareront en
1956. De leur union naîtra Laurence-Marie. Le prétendant suivant sera
le producteur Darryl Zanuck avec qui elle
aura une liaison, mais les ambitions de l’américain ne s’accorde guère avec
le besoin de liberté de la française.
En 1965 elle rencontre
Michel Piccoli au cour d’un dîner organisé
par Télé 7 jours. Leur mariage durera 11 ans.
En 1968 elle commence sa collaboration avec Gérard Jouannest qui était le pianiste de Jacques Brel jusqu’à ce que celui-ci abandonne la scène. Un duo gagnant qui finira par un mariage en 1989 ; mieux vaut tard que jamais. Mais ses amours seront aussi des amitiés précieuses comme avec Boris Vian qu’elle considérait comme son frère et son psy, Jacques Brel , elle sera la seule à qui il écrira des chansons. Serge Gainsbourg qui lui avait écrit «La Javanaise» et qui un soir vint la voir avec un paquet à la main, c’était une toile : «Je l’ai gardée pour toi, j’ai brûlé toutes les autres hier».
En 1968 elle commence sa collaboration avec Gérard Jouannest qui était le pianiste de Jacques Brel jusqu’à ce que celui-ci abandonne la scène. Un duo gagnant qui finira par un mariage en 1989 ; mieux vaut tard que jamais. Mais ses amours seront aussi des amitiés précieuses comme avec Boris Vian qu’elle considérait comme son frère et son psy, Jacques Brel , elle sera la seule à qui il écrira des chansons. Serge Gainsbourg qui lui avait écrit «La Javanaise» et qui un soir vint la voir avec un paquet à la main, c’était une toile : «Je l’ai gardée pour toi, j’ai brûlé toutes les autres hier».
Juliette Gréco est une icône de la chanson française comme
Barbara et
Isabelle Aubret (Un peu trop oubliée à mon goût) qui laissera une empreinte profonde dans le sillon de la culture
française.>
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