mercredi 11 février 2015

The MARSHALS "AYMF Session" (16/12/2014), by Bruno



     Ces Marshals là, font partie de ces groupes qui vous séduisent dès les premiers instants (dès la première minute). Le genre de truc qui vous incite à faire écourter l'écoute de votre disquaire (espèce en voie d'extinction - WWF -), afin de partir au plus vite avec votre précieux, bien à l'abri dans une poche de votre blouson, impatient d'engouffrer la bête dans votre mange-CD et de mettre à l'épreuve vos enceintes (que l'on espère robustes). Et ce, en dépit d'une pochette qui pourraient rebuter (rien que les végétariens et la SPA - sans oublier les fans de R'n'B/Pop FM bien sirupeuse, mais là c'est tant mieux -), bien qu'elle ait cet avantage de ne pas passer inaperçue et qui change des stéréotypes (à force, repoussant).
Pratiquement dès les premières notes, on sait à qui on a affaire. 

     Ce n'est pas que The Marshals ait un son particulièrement envoûtant ou hypnotique (quoi que), que leur musique vous scotche au plafond par sa puissance, ou vous projette comme une crêpe contre les murs par son ardeur ou sa quérulence, mais il y a en eux quelque chose d'irrémédiable attachant. Quelque chose de naturellement séduisant et de captivant.

Ce n'est pas le genre de collectif qui cherche à vous en mettre plein la vue par des prouesses techniques, par des compositions alambiquées et chargées de savantes et espiègles pirouettes, ou encore en faisant usage de la poudre aux yeux. Non, ces Marshals là font partie de ces groupes qui se livrent à nue, sans artifices, sans complexes et appréhension ; se jetant nus dans la bataille, sans cuirasse. Leur son est cru, sans fioritures, sentant autant les relents de salpêtre que d'huile usagée accumulés dans un antique garage, que la fumée, la bière et de musc humain cohabitant dans un temple dédiée à la (vraie) musique. Même pas sûr qu'il y ait une p'tite pédale d'effet du genre overdrive, booster ou reverb (faudrait demander à l'intéressé) ; cela sonne direct dans l'ampli. Plus précisément cela sonnerait comme un mariage entre une gratte montée en humbucker (voire en P90), qui n'a pas perdue sa filiation avec le bois, branchée dans un bon gros ampli allant droit à l'essentiel ; sans gadget intermédiaire. D'après les photos, c'est d'la Grestch (probablement une 6120D Chet Atkins). Une guitare qui pourrait être la fille cachée, et improbable, de Wilko Johnson, John Lee Hooker et Jack White.

     Les Marshals ont un son. Un son qui vous prend aux tripes, qui vous entraîne, vous téléporte dans une contrée que l'on identifierait comme le Deep-South, les bayous américains ou un de ses états où la poussière règne sur de longues routes vallonnées et rectilignes, brûlées par un Soleil impitoyable, bordées d'une végétations sèche, poussant difficilement dans une terre acide. (des images d'Epinal, certes, mais c'est pour situer). Bière et bourbon plutôt que vins de bourgognes ou de Bordeaux (et pas d'la piquette ou du frelaté !). Le Blues de ces Marshals est branché dans un groupe électrogène : en dépit de l'électricité qui s'en dégage, ce Blues-rock paraît être né dans un milieu rural, où les hommes sont aguerris par un dur labeur quotidien. Du Blues-rock aux mains caleuses.

     A l'origine, The Marshals se limitait à un duo (les rapprochant alors plus d'un White Stripes et d'un Left Lane Cruiser), constitué par Thomas Duchezeau dans le rôle du bûcheron marteleur et de Julien Rabolo dans le rôle du tueur-à-gages, orateur à ses heures, jusqu'au jour où, après deux disques à leur actif, ils firent la connaissance de Laurent Siguret. Un inépuisable harmoniciste en symbiose totale avec son petit instrument, qui, tel un Magic Dick des grands jours (avec des petites inflexions à la John Popper, quand ce dernier reste sobre, qu'il n'essaye pas de faire des records de vitesse), inonde de ses notes mutines, parfois traînantes, et faussement indolentes (semblant crouler sous la chaleur torride et moite du Delta du Mississippi ou des Everglades de la Floride) ce Blues-rock terrien. Un harmonica qui enrichi considérablement ce Blues-rock moite et poussiéreux. Là où certains "ruines-babines" ne se contentent finalement que d'un rôle d'accompagnant, d’ornementation occasionnel, celui de Laurent s'impose comme une pièce cruciale et indissociable. Ce qui ne veut pas dire pour autant que le duo tambours-gratte ne tient pas la route sans elle. Au contraire, la guitare de Julien Robalo est capable à elle seul de planter un décor, une ambiance, d'établir une structure inébranlable (ce que confirme les deux disques précédents et encore aujourd'hui, la 1ère partie de "Someday"). Une pelle forgeant des riffs pouvant se suffire à eux-même. Elle impose son rythme, tandis que la batterie, elle, en indéfectible garde-du-corps patibulaire, surveille ses arrières, reste en soutient, attentive aux moindres mouvements de son protégé. Alors que l'harmo greffe une mélodie ou un spleen, sombre, légèrement empoisonné par un quelconque breuvage vaudou.


     Bien qu'indéniablement et foncièrement enraciné dans le Blues, le Blues-rock d'obédience rustique et rugueuse (occasionnellement un rien bastringue, entre un John Hammond et un Tom Waits électrisés), The Marshals a façonné sa propre personnalité où les rythmes appuyés, en mid-tempo règnent en maître.  Au point que leur reprise du "Crosstown Traffic" (du Grand Gaucher) se fond totalement dans l'ensemble ; seule l'écoute attentive des paroles met la puce à l'oreille. Le trio aurait pu la jouer fine, changer 2/3 phrases et s'approprier la chanson sans que personne ne soupçonne le moins du monde le tour de passe-passe. Mais non, apparemment il préfère jouer la transparence.

     Prenez du Delta Saints, du Left Lane Cruiser, du Stoner Train, du Steve Hill, du White Stripes, du Miraculous Mule, du Two Man Blues Army, du Blues Travellers, un soupçon de Thorogood (première période), secouez bien, et vous obtiendriez cette potion fumante et sulfureuse, The Marshals. A consommer avec un volume conséquent (à doonnff !!! dixit notre Sonia - non, elle n'est pas à louer -). C'est du bon, du sans faux-col.

     Toutefois, un regret, et de taille : seulement sept titres. Bien que ce CD affiche tout de même une honorable durée de 36 minutes, on souhaiterait prolonger le plaisir avec au moins encore une pièce du même acabit. Néanmoins, mieux vaut primer la qualité à la quantité. Un adage malheureusement qui n'a que trop rarement été appliqué depuis l'avènement du CD (même si depuis peu, on semble y revenir). 

     Et là encore, c'est à se demander s'il ne s'agit pas d'une conspiration : pas de bassiste ! Amis bassistes, qu'attendez-vous ? Qu'attendez-vous pour prendre d'assaut la rue, les maisons de disques, les préfectures, et faire valoir vos droits ?!? Un bon bassiste ne peut être remplacé ! Un bon bassiste donne du corps et de la matière à la musique. Sans lui, une écrasante majorité de chansons (Pop, Rock, etc...) n'auraient l'air que de ritournelles infantiles.
Et pourtant, il faut bien admettre que, ma foie, ces trois loustics s'en sortent bien sans. La complicité de Julien et de Thomas permet de combler cette absence ; ce qui n'est pas nécessairement le cas pour d'autres duos célèbres.

A.Y.M.F correspond tout simplement au nom de leur studio, à Moulins, dans l'Allier : le After You My Friend. Clin d’œil aux disques ayant introduit ce "session" dans le nom de baptême de leur galette : Howlin' Wolf "London Sessions", Vintage Trouble "Bomb Shelter Sessions" (lien)Springsteen "The Seeger Sessions", Paul Rodgers "The Royal Sessions"(lien), Sheryl Crow "the Globe Sessions",  Cowboy Junkies "Trinity Sessions", "Super Session", Backcorner Boogie Band "The Kotten Fields Sessions" (lien), (les soul Sessions de Joss Stone ?), Aysnley Lister "Tower Sessions", et l'armada des "B.B.C. Sessions".

"... 7 chansons capiteuses, sept péchés capitaux, sept saignées à blanc pour un Blues noir comme le sang d'encre coulant dans les veines des bluesmen de la Nouvelle-Orléans, sept incantations dont "Crosstown Traffic" chipée à Hendrix. The Marshals dissipent légèrement leurs effluves psyché pour aborder le Blues-rock par sa dimension la moins sombre et la plus généreuse, le Rythm'n'blues." Patrick Foulhoux.

  1. Oh baby   -   3:52
  2. Sugar   -   4:17
  3. Crosstown Traffic   - (Jimi Hendrix - largement revisité- ) - 3:21
  4. Slave   -   3:52
  5. I made my way   -   4:55
  6. Tears    -   3:49
  7. Someday   -   11:58

wazzaaaaa

5 commentaires:

  1. la jacquette me fait penser à celle du Edgar Broughton Band , leur 3eme appelé "the meat album", peut-être un clin d'oeil et une influence(?)

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  2. J'connais pas (sinon de nom).

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  3. me too !, edgar broughton band, j'ai du laissé une trace dans mes toilettes de hardmaisrock.com
    un tantinet plus hard....

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    1. Bin merde ! j'arrive pas à remettre la main sur ce post !

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  4. Je rectifie ! J'ai confondu avec un ancien post sur ;

    Edgar Winter Group - Frankenstein

    Rien à voir !

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