- Bonjour M'sieur Claude…
C'est très connue cette Moldau, je crois même l'avoir entendu dans un film…
C'est un compositeur important ce M'sieur Smetana ?
- Oui Sonia, la Moldau
est une pièce très connue d'un "petit maître", un compositeur de la même
génération et ami de Dvořák…
- Mais heuuu, il n'y a
que ce morceau de 10 minutes sur l'album, c'est un single ?
- Hi hi, bonne question
Sonia. La Moldau est l'un des 6 poèmes symphoniques qui composent la suite Ma
Patrie, une ode symphonique dédiée à la Tchécoslovaquie…
- Rafael Kubelik est un
petit nouveau de la Direction d'orchestre ?
- Non, il aurait eu 100
ans le 29 juin. Bonne occasion pour parler de ce grand chef alter ego des Karajan,
Solti, Haitink et autres Bernstein au siècle dernier…
Rafael
Kubelik
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J'aurais
déjà eu maintes occasions de parler du maestro Rafael
Kubelik dans le blog. Ce chef discret a marqué l'histoire de la
direction d'orchestre et du disque par des réalisations exceptionnelles de
probité et de finesse. Ce chef né à Prague le 29 juin 1914 faisait partie du carré d'as de la direction d'orchestre qui
entreprit les premières intégrales des
symphonies de Mahler dans les années 60. Bernstein à New-York (CBS), Solti à Chicago (Decca), Haitink à Amsterdam (Philips) et Rafael
Kubelik pour le label Dgg
avec l'orchestre de la Radiodiffusion Bavaroise
qu'il dirigea de 1961 à 1979… Il récidivera avec des enregistrements live pour
le label Audite dans les décennies
suivantes.
Pour
ce fils de violoniste qui décida de sa carrière le jour de ses 13 ans lors des
obsèques de Leoš
Janáček, la musique tchèque sera évidement au programme de nombre de
ses gravures : une intégrale des symphonies
de Dvořák qui
fait toujours référence, la messe glagolithique de Janáček. Dans le répertoire
plus classique : une intégrale des symphonies
de Schumann
et une autre de Brahms à la fin des années 50'.
Cette dernière résume bien l'art du musicien : clarté, intimisme, absence
d'effet hédoniste, un peu l'inverse des trois grands noms cités avant. Kubelik pourrait être comparé à Antal Dorati avec moins de punch mais plus
de tendresse.
Le
cycle de six poèmes symphoniques réunis sous le titre Ma
Patrie de Smetana et enregistré en 1971 avec l'orchestre symphonique de Boston reste
l'un des must d'une discographie pléthorique. Le chef avait déjà enregistré
pour Mercury en 1952 cette œuvre à Chicago,
une interprétation plus abrupte avec une prise de son monophonique miraculeuse.
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Le
compositeur tchèque Bedřich Smetana voit le jour en 1824 dans l'actuel Tchéquie. L'époque
est rude puisque issu d'une famille de 11 enfants, il sera le seul à atteindre
l'âge adulte ! Malgré l'opposition de son père, brasseur de son état, le jeune
homme étudie le piano et le violon et commence à composer dès l'âge de 8 ans.
La rencontre avec Franz Liszt vers 1848 sera déterminante, tant sur le plan
financier, que pour le début de sa carrière. En termes de santé, la famille
semble maudite car à l'instar de son ami Dvořák qu'il dirige lorsque celui-ci est
altiste de l'opéra de Prague, il perdra 3 des ses quatre enfants en bas âge.
Smetana
sera à la fois chef d'orchestre, compositeur et fondateur d'une école de
musique grâce, une fois de plus, à l'appui de Liszt. De sa production assez modeste, trois
belles œuvres ont marqué l'histoire de la musique : Le cycle Ma Patrie, l'opéra la
Fiancée vendue
et enfin des quatuors.
Les
10 dernières années de la vie de Smetana seront tragiques. Atteint dès 1874 de syphilis, il devient sourd et
ne peut plus diriger. Il composera jusqu'au bout de ses forces, en 1884, date à laquelle il rend l'âme
après un séjour en hôpital psychiatrique.
Musicalement,
le style de Smetana
est typiquement romantique. Pourtant c'est à lui que l'on doit l'introduction
de thèmes de chants et de danses folkloriques dans les œuvres classiques.
L'idée sera reprise par ses successeurs : de Dvořák à Bartók…
Ma patrie est composé dans la période 1874-1879. Les six poèmes symphoniques
seront joués au fur et à mesure de leurs publications et la première exécution de
l'ensemble aura lieu en 1882 sous la
direction d'Adolf Čech
à Prague. C'est une œuvre descriptive dans laquelle Smetana dépeint les
paysages et évoque le folklore de son pays.
La Moldau, second poème dans l'ordre
chronologique, date de 1874. La Moldau est un affluent de l'Elbe qui baigne la
bohème et traverse la ville de Prague. Un fleuve déjà large et puissant pour
ceux qui ont eu la chance de visiter cette belle capitale. Smetana a composé une œuvre
à programme d'une douzaine de minutes découpée en 7 tableaux (Titres en violet) :
La première source de la Moldau : Un solo de la flûte et
quelques délicats pizzicati symbolisent une source cristalline et indisciplinée. Kubelik ciselle cette page bucolique. La seconde source-forêt commence par le
thème élégiaque et si célèbre avec ses longues phrases aux cordes, tandis que l'écume
est symbolisée par un triangle cristallin. La prise de son à Boston est excellente,
comme tous les enregistrements effectués avec cet orchestre par Dgg à cette
époque. La chasse : Le rythme
s'accélère avec des appels de cors qui répondent aux élans énergiques des
cordes. Mariage campagnard : Ce
passage qui s'appuie sur un rythme de polka peut faire songer au trio d'un scherzo. La musique se fait bonhomme et folklorique, mais sans les lourdeurs d'orchestration
que l'on rencontre parfois dans les danses hongroises de Brahms
ou les danses slaves de Dvořák. Clair de Lune ; Rondeau
des nymphes : le tempo ralentit pour distiller une page nocturne avec un
subtil dialogue des bois. On retrouve des citations du thème principal entendu
au début de la seconde partie. Les Rapides de
Saint-Jean : L'orchestre gagne en puissance voire en furie,
trombones et roulements de grosse caisse s'imposent... avant… La Moldau
coule majestueusement : une coda finale riche en percussions
(cymbales et triangle).
La direction d'orchestre garde sa fluidité et ses élégances dans toutes les parties du poème symphonique. Les solos sont magnifiquement intégrés à l'ensemble avec, par exemple, une poésie diaphane dans le Clair de lune. Kubelik ne joue jamais sur la corde sensible du patriotisme. À noter que les cinq autres poèmes symphoniques du disque sont de la même veine. Une grande version…
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"La Moldau" bien sur, le morceau de "Ma vlast" que tous les enfants ont écoutés à l'école, personnellement du poème symphonique, je préfère "Vysehrad". Oui ! j'ai aussi decouvert Kubelik avec son intégral des symphonie de Malher.
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