L’école Belge
Peyo, Roba,
Jacobs, Greg, Morris, Jijé, De Moor sans oublier Hergé,
la liste des dessinateurs belges est longue… très longue. Franquin lui, reste un pilier de cette
honorable institution. Tous comme Hergé avec
Tintin, son personnage de Spirou, (Même si ce n’est pas lui qui créa le
personnage, ni même qui le dessina en premier, mais Rob-Vel
en 1938) reste une icône du dessin pour la jeunesse made in Belgium.
Nous sommes
le 3 janvier 1924 dans la ville d’Etterbeek dans la banlieue de
Bruxelles, 18 jours avant la mort de Lénine et
22 avant l’ouverture des jeux olympiques d’hiver à Chamonix. André Franquin, fils d’un employé de banque
rigide, pointe le bout de son nez dans un monde en pleine évolution et où le
bouleversement des années futures commençait déjà à remuer la planète (Hitler
écrira « Mein Kampf » cette année là). Dès l’âge de 5 ans, il
commence à avoir des prédispositions pour le dessin. Franquin a déjà des points communs avec Hergé, ils sont nés tous les deux à Etterbeek et ont
fréquenté la même école (A quelques années d’écart). Comme tous les gamins, ils
dévorent les journaux et les bandes dessinées de l’époque : Mickey,
Terry et les pirates par Milton Caniff,
les aventures de Tintin (Bien sûr !) ou encore le journal créé par Pierre Dac «L’os à Moelle». Le cinéma burlesque
et ses classiques : Laurel et Hardy, Mack Sennett et Chaplin et les
dessins animés : Disney et Avery influenceront son graphisme et son
humour.
Après s’être
ennuyé au cours de l’école Saint-luc, il devient apprenti animateur dans un
petit atelier de dessin animé avec pour compagnon, Morris
et Peyo. L’arrivé des américains à la libération
avec leurs dessins animés sous le bras, feront en sorte que leur petite
entreprise connaîtra la crise et mettra la clé sous la porte la concurrence
étant trop rude.
En 1945,
il est traîné par son copain Morris aux éditions
Dupuis ou Jijé le prend sous son aile. En 1946,
ce dernier lui propose de reprendre les personnages de Spirou et Fantasio.
Pendant dix ans, il va se consacrer uniquement à ce duo et va même l’enrichir
de nouveaux personnages comme le comte de Champignac, la journaliste Seccotine,
Zantafio le cousin de Fantasio, sont négatif parfait. Zorglub,
ancien camarade d’université de Champignac, mégalomane, nerveux à l’extrême, un
savant fou mais pas si méchant que ça, il cherche toujours à ne jamais
tuer ni blesser personne, il n’est pas conscient du mal qu’il provoque,
c’est un méchant sympathique.
Et surtout
le marsupilami, animal venant du pays fictif de Palombie. Ovipare,
omnivore, cette animal à une queue de 8 mètres de long, un langage particulier
(Houba houba hop !) Il est doté d’une force herculéenne, a un pelage jaune
à taches noir. Il apparait dans les aventures de Spirou en 1952,il
reviendra très souvent jusqu'à que Franquin
abandonne Spirou à Jean-Claude Fournier et garde
les droits sur l’étrange animal qu’il considère comme un de ses personnages les
plus réussis.
Gaston, héros sans emploi
En 1955,
le torchon brûle entre Franquin et Charles Dupuis (L’homme des éditions). Il
rejoindra le journal de Tintin ou il créera les personnages de Modeste
et Pompon, l’histoire d’un jeune homme avec son éternelle fiancée
dans des histoires de voisinages bon enfant. On trouvera Greg (Achille Talon), Peyo
(Les Schtroumphs) et même René Goscinny en tant
que scénariste. La situation s’éclaircit et dès 1957, il retourne
chez Dupuis. Tous commence par des traces de pas
bleus dans les marges des pages du journal, la semaine suivante, apparaît un
personnage en costume bleu et nœud papillon. Un dialogue avec Spirou et cet
étrange personnage est resté célèbre : « Qui
êtes-vous ? - Gaston. - Qu'est-ce que vous
faites ici ? - J'attends. - Vous attendez
quoi ? - J'sais pas… J'attends... - Qui vous a envoyé ? - On m'a dit de venir... - Qui ? - Sais plus...- De
venir pour faire quoi ? - Pour travailler... - Travailler comment ? - Sais pas… On m'a
engagé...- Mais vous êtes bien sûr que c'est ici que
vous devez venir ? - Beuh... ».
Quelques
temps plus tard, il reviendra, habillé d’un jean noir, d’un pull-over vert et
chaussé d’espadrilles orange qui avec le temps deviendront bleus. Il déambule
pratiquement tous le temps la clope au bec. Gaston ? C’est l’anti-héros.
Jeune, lymphatique, paresseux, gaffeur, il essaye par tous les moyens d’éviter
de travailler, sauf pour inventer des machines diaboliques, choyer une mouette
ronchon et un chat dans les bureaux, provoquer explosions et
catastrophes, des gaffes apocalyptiques (on va en reparler). Autour de lui
viendront se greffer une pléiade de personnages, Fantasio qui laissera
la suite à Prunelle, Lebrac le dessinateur de BD, M. Boulier
le comptable d’une autre époque, M. De Mesmaeker qui, à cause des
catastrophes provoquées par notre «héros» n’arrivera jamais à signer ses fameux
contrats, Mad’moiselle Jeanne, la fiancée officieuse, l’agent Longtarin
qui, cherchant à verbaliser à tout prix la voiture de Gaston, pétera les plombs
plus d’une fois et enfin ses potes : Bertrand Labévue et Jules-de-chez-Smith-en-face
le double de Gaston dans l’entreprise avec qui il fait les 400 coups.
Gaston un inventeur de génie
Même si le personnage ne transpire pas le courage, il
faut bien reconnaître que son imagination est fertile. Il inventera des objets
tous aussi incroyables les uns que les autres, la chaise mobile, le monorail de
bureau, le mastigaston et surtout le gaffophone, une harpe diabolique dont les
vibrations font tomber les plâtres des murs et décoller le papier peint. Il
créera aussi quelques recettes culinaires (A éviter) comme la morue aux fraises
avec mayonnaise, chantilly aux câpres flambé au pastis, les huîtres au chocolat
ou encore les crêpes montgolfière, bonne appétit si vous êtes à table ! Le
temps de 16 albums, Gaston et son créateur vont s’assagir. Gaston deviendra un
écolo-pacifiste-humaniste qui fustigera les pollueurs de tout poil et mènera un combat pour la cause
animale. Il a su s’entourer dans ses aventures de bestioles plus ou moins
farfelues comme le chat dingue, la mouette rieuse, le poisson rouge «Bubulle»
et sa souris «Cheese». Pour finir avec Gaston, n’oublions pas sa voiture jaune
avec ses bandes latérales à carreau noir et blanc à laquelle il apportera
maintes modifications. C'est une Fiat 509, modèle construit entre 1925 et 1929
et non une Ford T comme certain pourrait le croire, il y créera même le premier
airbag de l’histoire de l’automobile.
Franquin et ses idées noires
En 1977 ;
il crée ses premières idées noires dans le Trombone Illustré, un
éphémère supplément au journal Spirou et continuera dans Fluide Glacial.
Rien que le titre veut tous dire, des dessins sombres, ou le noir domine sur le
blanc, un regard acide de la société dans laquelle nous vivons. De l’humour il
y en a toujours, mais il est plus noir !!
En 1989,
il tournera une série enfantine qui sera l’objet d’une diffusion télévisé en 78
épisodes «Les tifous». Ayant cédé les droits de ses personnages dont Gaston, il
continue tous de même à travailler. Pourtant en 1996 sort
l’album n°15 de Gaston que les fans attendaient depuis longtemps, succès
immédiat avec 650.000 albums vendus en moins de six semaines.
Le 5 janvier
1997 un infarctus sera sa première gaffe et sa dernière idée noire. Hergé se considérait comme un piètre dessinateur face
à ce grand artiste qui a imprimé son empreinte sur le journal Spirou. Son style
est devenu plus nerveux avec la maturité et a apporté vie, humour et dynamisme.
Franquin ? Un géant de la BD. Un maître, un génie, du talent à l'état pur.
RépondreSupprimerEt il faut voir ses croquis et esquisses (généralement au crayon ou au fusain) pour constater qu'il était capable de réaliser des dessins d'une grande précision, d'un trait frôlant la réalité. A ce titre, ses essais sur des chats sont fabuleux.
(toujours cru que c'était une Ford, moi. M'enfin)