mercredi 25 décembre 2013

GREMLINS (1984) Joe Dante (by Bruno)


     Il y a 29 ans, Joe Dante marque les esprits avec une comédie fantastique : GREMLINS. Un conte de Noël... pour le moins original.

     Auparavant, Joe Dante s'était fait un nom avec deux classiques des séries B. D'abord "Piranhas", une série B à petit budget reposant sur une histoire digne d'une rencontre de Shakespeare et Victor Hugo : Une nuée de piranhas génétiquement modifiés lors de la guerre du Viêt-Nam se retrouve, accidentellement (ben alors ??), déversée dans une rivière très fréquentée (tant qu'à faire). Au casting figure Kevin McCarthy et Barbara Steele, deux habitués des films de fantastique et d'horreur de toutes sortes. Le côté parodique du film séduit un cinéaste en pleine ascension, Steven Spielberg. Ensuite en 1981, "Hurlements", un film intéressant de Loups-Garous avec encore Kevin McCarthy, mais aussi Patrick MacNee, Dee Wallace, John Carradine et Slim Pickens.
     "Hurlements" reçoit le prix de la critique du festival du film fantastique d'Avoriaz et le prix du meilleur film de l'Academy of Science Fiction, Fantasy and Horror Films. Ainsi qu'une nomination pour les maquillages (de Rick Baker et Rob Bottin, deux ténors du genre) et une pour les effets spéciaux.
 

   Enfin, en 1984, Steven Spielberg remet à Dante le scénario du jeune Chris Columbus (26 ans), entré tout récemment dans son équipe.

     L'histoire ? Un conte de Noël moderne, avec des gentils, des méchants, et surtout des péripéties qui surviennent lorsque l'on transgresse les recommandations. Toujours écouter ce que disent les vieux sages.
Le synopsis est simple : Un inventeur raté cherche un cadeau de Noël de dernière minute pour son fils et rentre par hasard chez un vieil antiquaire, chez qui il découvre une étrange créature charmante et mignonne à croquer : un Mogwaï. Malheureusement, il n'est pas à vendre, car "Mogwaï demande de grandes responsabilités". Finalement, c'est le petit-fils de l'antiquaire qui le vend pour une coquette somme à l'insu de son grand-père ; un geste non égoïste ou vénal, car l'ancien ayant besoin d'argent, son petit-fils pense bien faire. Lorsque ce dernier remet l'animal à l'inventeur, il lui donne des recommandations à suivre à la lettre :
- "Ne pas l'exposer à la lumière vive, et surtout la lumière du jour, car cela le tuerait"
- "Le pas le mouiller, ne jamais le laver" (1)
- "Et surtout, surtout, ne jamais lui donner à manger passé minuit".


   Bon, à partir de là, le film est cousu de fil blanc, mais qu'importe.
Le Mogwaï se retrouve accueilli par une petite famille typique de la classe moyenne américaine, dans une charmante bourgade, où tout le monde semble se connaitre, en plein préparatif de Noël. La petite créature, offert en cadeau de Noël précoce au fils unique, Billy, est vite adoptée et baptisée Gizmo.
Et arrive ce qui devait arriver (sinon, ben , pas de film) : un jeune ami de Billy (interprété par Corey Feldman) renverse par accident (ben voyons, il dépose le pôvre petit mogwaï au milieu de bocaux où trempent les pinceaux de Billy) de l'eau sur Gizmo. Et hop, magique. Pop ! ... Pop ! Pop ! Pop ! Pop ! Cinq boules de poils s'extraient du dos de Gizmo qui se contorsionne de douleur. Du pur clonage expéditif à quelques différences près. Les rejetons se révèlent turbulents, tapageurs et irrévérencieux ; ils sont proches d'une personnification des bas instincts libérés de toute censure ou conscience. Ils n'ont d'ailleurs que mépris pour Gizmo. Toutefois, les mogwaïs sont comme des petites peluches sans grands moyens physiques. Une étape qui est franchie en parvenant, par ruse (hé, hé, hé), à manger... après minuit ! Et un matin, au réveil, Billy retrouve cinq œufs-cocons à la place des mogwaïs clonés.
Clin d'oeil à "Alien" ainsi qu'à "L'Invasion des Profanateurs de Tombes" (dont on voit d'ailleurs un extrait). Les adorables petites créatures velues en ressortent quelques temps plus tard métamorphosées en une espèce reptilienne particulièrement vicieuse et agressive, et surtout affamée, nantie d'une taille nettement plus importante et d'une nouvelle force. Le leader, seul rescapé d'un menu massacre, plonge dans la piscine de l'Y.M.C.A pour se multiplier (et cette fois-ci, pas besoin de cocon). Ces petits monstres génèrent rapidement une énorme pagaille, mettant la petite ville sans dessus-dessous. Une fois la ville à leur merci, les gremlins, pour le plus grand plaisir des spectateurs, s'emparent de nombre de stéréotypes du genre humain, principalement ceux du type peu fréquentable. Parfois dans une démesure cartoonesque. Ce qui donne des scènes d'anthologies qui sont restées dans les annales du monde du cinéma. Il est évident que tant les maquettistes que le réalisateur s'en sont donnés à cœur joie, maquillant et accoutrant leurs gremlins avec délectation, tels des gamins excités martyrisant leur GI-Joe ou les poupées de leur sœur.


 C'est la panique et le no man's land jusqu'à ce qu'enfin, Billy, et son amie Kate, parviennent à les piéger... et les cramer... vifs !

   L'épilogue montre le vieil antiquaire (2) venu reprendre son Mogwaï, et disant, de façon sentencieuse, à la petite famille :
"l'Humanité n'est pas prête pour les mogwaïs, et elle les traite comme elle a traité les autres bienfaits de la nature". Une phrase qui fit grincer des dents en haut-lieu et qui faillit être censurée.

      Joe Dante semble vouloir profiter d'un côté sombre du film pour montrer que lors de la "magie de Noël", le bonheur n'est pas nécessairement partagé par tous. Dans cet instant d'effusion de bons sentiments et d'allégresse, il n'y a pas de répit pour les gens qui souffrent et qui sont dans le besoin. Ainsi, une femme, accompagnée de ses deux enfants, demande un sursis pour le loyer du mois, afin de pouvoir passer les fêtes sans se soucier d'être mise à la porte. La propriétaire, une dame acariâtre, rétorque qu'elle, comme les banques, sont là pour gagner de l'argent.

 

   La famille d’accueil est également harcelé par les rappels. Si de par le monde, il y a souvent une trêve lors des fêtes de Noël, il n'en est pas de même pour les banques.
Billy se fait également gentiment taquiner et sermonner par son collègue de travail de la banque, qui lui conseille de prendre exemple sur lui s'il veut réussir et  ne pas gâcher sa vie. C'est-à-dire en étant intraitable et dur.

     La petite copine de Billy, Kate, enfin... - pas tout à fait, presque, Billy tente une timide approche, et les difficultés les rapprocheront -.          Bon, donc Kate n'aime pas Noël, elle déteste même cette fête, pour la simple raison que son père a disparu la veille de Noël, alors qu'elle n'avait que neuf ans. En fait, quelques jours plus tard, alors que sa mère et elle commençaient à ne plus se faire d'illusions, lorsqu'elle s'affairait à préparer un feu dans la cheminée, elle constata qu'il en émanait une odeur pestilentielle. Les pompiers durent intervenir et, au lieu d'y dégager le cadavre d'un animal, ce fut celui de son père qui s'était brisé le cou alors qu'il voulait jouer au Père Noël. Super le conte, non ?


 
Crête iroquoise  =  chef

   L'origine du terme "Gremlins" viendrait du personnel de la R.A.F (aviation militaire britannique) lors de la seconde guerre mondiale, qui accusait ces êtres imaginaires d'être à l'origine de diverses pannes mécaniques (réminiscences des Korrigans et autres lutins des légendes celtiques ?). Fait que rapporte le personnage joué par Dick Miller, ancien pilote de l'US Air Force, totalement chauvin et ne jurant que par la bonne vieille mécanique américaine. Le terme a été ensuite popularisé par un livre pour enfant de Roald Dahl (à qui l'on doit également "Charlie et la chocolaterie") de 1943, qui a été lui-même pilote d'avion de chasse dans la R.A.F et qui faillit périr dans un crash pendant le conflit mondial.
     Une légende contemporaine qui fut reprise pour un épisode de la série Twilight Zone où un passager était le seul à voir un gremlin destroyer méthodiquement - et avec un malin plaisir - l'un des réacteurs de l'avion de ligne. Episode repris avec maestria pour le long-métrage - hommage à la dîte série - (3) du même nom avec John Lihtgow.

     Le film a été édulcoré, notamment pour être accessible au plus grand nombre. Certaines scènes ont été totalement supprimées. Par exemple celle où les gremlins envahissent un fast-food non pour se gaver de hamburgers mais pour dévorer les clients ; ou encore quand la mère de Billy est décapitée (à la place ce sera Billy qui tranchera la tête d'un gremlin pour sauver sa mère).

     Avec pratiquement trente ans au compteur, ce film a finalement un peu vieilli, toutefois il émeut toujours autant les enfants, les petits comme les grands... zenfants.
Les plus blasés trouveront a redire sur la qualité des trucages qui n'ont pu profiter de l'ère informatique, et les plus avides d'hémoglobine resteront sur leur faim, bien que le vert visqueux soit servi à profusion.
Malgré tout, GREMLINS est peut-être Le film de l'année 1984, avec notamment cinq Saturn Awards remportés, des salles combles (plus de 3,5 millions d'entrées rien qu'en France) et des produits à l'effigie des mogwaïs et des gremlins qui ont longtemps pullulés dans les vitrines.


(1) Doit pas sentir la rose, la peluche.
(2) L'antiquaire, Mr Wing, est interprété par Keye Luke, l'acteur qui a endossé le rôle de Maître Po (aucun rapport avec celui des Télétubies) de la série "Kung-Fu". Il porte d'ailleurs une lentille blanche à un œil pour rappeler ce personnage.
(3) Le film comporte quatre épisodes distincts, plus un prologue. Les réalisations sont de Steven Spielberg, George Miller, John Landis et Joe Dante. On retrouve également Richard Matheson en tant que scénariste

Tiens ? Cette gargouille a un air de déjà vu, non ?

     Le saviez-vous ? En Loire-Atlantique, dans la commune de Saint-Jean-de-Boiseau, il y a une chapelle du XVème siècle dont les pinacles ont été restaurés. N'ayant pas alors d'archives assez précises pour reproduire les chimères d'époque, le sculpteur reprend alors des codes de la mythologie, du christianisme et du XXème siècle. Ainsi entre centaures, sirènes, serpents, Adam et Ève, saints, druides, templiers, se sont glissés un Xénomorphe (de la série des films "Alien"), un Goldorak (!?), un Gremlin et Gizmo.


 

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