Chronologiquement, ROBE DE
MARIE est le deuxième roman de Pierre Lemaitre, et le troisième dont on parle
ici. Et comme pour les précédents, cela va être duraille de vous en causer sans
trop gâcher la fête.
PREMIERE PARTIE. Alors là mes agneaux, je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je pense que les trois premières pages de ce bouquin sont ce que j’ai lu de plus fulgurant depuis des lustres ! C’est de l’accroche ça coco ! Sophie Duguet, la trentaine, nous parle de sa place de nurse chez les Gervais, ses problèmes de mémoires, récurrents, ses crises de parano, d’angoisse, sa fatigue, son agacement de plus en plus visible à l’encontre de Léo, le gamin de 6 ans dont elle a la charge, qu’elle a d’ailleurs giflé l’après-midi même, et ce pour la première fois. Les Gervais sont rentrés tard hier soir, alors Sophie est restée dormir. C’est le matin, les Gervais sont repartis au boulot, Sophie est seule, elle attend la femme de ménage, et va quand même voir si le gamin dort encore. Oui, ça va, il est bien là, sous ses draps. Il ne bouge pas. Et pour cause. Il est mort. Etranglé. Avec un lacet de chaussures appartenant à Sophie. Et c’est Sophie qui l’a tué. Enfin, pas sûr, mais de ce qu’elle croit se rappeler, c’est fort possible. Bon, enfin, on ne va pas s’attendrir, hein, faut se barrer, et vite !
PREMIERE PARTIE. Alors là mes agneaux, je ne vais pas y aller par quatre chemins. Je pense que les trois premières pages de ce bouquin sont ce que j’ai lu de plus fulgurant depuis des lustres ! C’est de l’accroche ça coco ! Sophie Duguet, la trentaine, nous parle de sa place de nurse chez les Gervais, ses problèmes de mémoires, récurrents, ses crises de parano, d’angoisse, sa fatigue, son agacement de plus en plus visible à l’encontre de Léo, le gamin de 6 ans dont elle a la charge, qu’elle a d’ailleurs giflé l’après-midi même, et ce pour la première fois. Les Gervais sont rentrés tard hier soir, alors Sophie est restée dormir. C’est le matin, les Gervais sont repartis au boulot, Sophie est seule, elle attend la femme de ménage, et va quand même voir si le gamin dort encore. Oui, ça va, il est bien là, sous ses draps. Il ne bouge pas. Et pour cause. Il est mort. Etranglé. Avec un lacet de chaussures appartenant à Sophie. Et c’est Sophie qui l’a tué. Enfin, pas sûr, mais de ce qu’elle croit se rappeler, c’est fort possible. Bon, enfin, on ne va pas s’attendrir, hein, faut se barrer, et vite !
Et voilà notre Sophie qui s’enfuit, et Pierre Lemaitre va nous raconter ces longs mois de cavales, le plan de Sophie pour disparaitre réellement des écrans radars, alors que toutes les polices de France sont à ses trousses. Les rares rencontres qu’elle fait se terminent invariablement dans un bain de sang. Visiblement Sophie a un sérieux penchant pour les longs couteaux. Heureusement, son père est là, et sa copine Valérie, les seuls visiblement à encore la croire, Sophie. Parce que même elle, ne se croit plus. Trop longtemps qu’elle a sombré, dans cette folie, ce chaos qu’est devenu sa vie, trop longtemps que les morts s’entassent autour d’elle, son mari, son enfant, sa belle-mère. Elle les a tous tués…
DEUXIEME PARTIE. 3 années plus tôt. Y’a un type qui suit Sophie
Duguet, partout, tout le temps, il l’épie, la surveille, note scrupuleusement
tous ces faits et gestes. Il va même jusqu’à louer une chambre de bonne, en
face de l’immeuble de Sophie, pour avoir un beau point de vue, placer sa
caméra, ses jumelles. Il peut même la voir baiser avec Vincent, son mari, et en
tirer de jolis clichés pour tapisser ses murs. Il a de la ressource. Il
vole le sac de Sophie, et donc ses clés.
Il en fait des doubles, peut pénétrer chez elle, placer des micros, visiter son
ordinateur, pirater ses mails, s’amuser à planquer des trucs, en rajouter, en
supprimer. C’est rigolo de la voir perdre pied, Sophie, quand elle est
persuadée d’avoir acheté des fraises et qu’elle rentre avec des cerises, qu’elle
paume sa voiture… ah non, elle était garée ailleurs… que le cadeau de belle
maman n’est plus dans l’armoire mais derrière la cuvette des chiottes, ou que
ses places de concerts du 18 se retrouvent déplacées au 26… C’est rigolo. Elle
a un bon job, Sophie, elle est dans la vente aux enchères, œuvres d’art. Mais
quand dans une présentation professionnelle, entre deux tableaux de maitres, se
glissent des photos d’elle taillant une pipe à Vincent, ça la fout mal… C’est contrariant. C’est insupportable. C’est
à devenir fou ! Ben… justement… Si on voulait rendre fou quelqu’un, on ne
s’y prendrait pas autrement…
TROISIEME ET QUATRIEME PARTIE. On est revenu au présent. Sophie a fait ce qu’il fallait, son plan fonctionne, mais elle préférerait aller mieux. Car elle est tout de même très fatiguée. En plus de sa mémoire trouée, elle dort mal, ne mange plus, elle perd ses forces, devient toute maigre, affreuse… C’est terrible à cet âge ! Elle a rencontré un type, c’est bien, c’est ce qu’elle voulait, il est gentil, pas très fute-fute, mais gentil, patient, c’est déjà ça. Mais ça va aller mieux maintenant, elle va remonter la pente…
Les romans de Pierre Lemaitre
sont construits en trois ou quatre parties, écrites du point de vue d’un
personnage différent, et qui se répondent, pour compléter le tableau à l’ultime
page. C’est très efficace, car le lecteur n’a pas
toutes les informations en main, ce qui ne l’empêche pas d’avancer. Et quand la
seconde partie viendra combler ce manque, ce sera encore plus effrayant !
L’écriture est toujours d’une grande précision. Presque clinique. Des phrases
simples, courtes, percutantes, mais qui traduisent admirablement le doute, la
peur, la douleur. Les personnages de Lemaitre sont tous en souffrance, en perte
de repère. Dans la seconde partie, ce ne sont que de très courts paragraphes.
16 avril… 18 avril... 12 mai... 3 juin… Une accumulation de faits, précis, une
progression vectorielle, qui traduit aussi bien la patience du bourreau, la
minutie de son plan, mais aussi son total dérèglement psychique ! Nulle
interprétation. Rien que les faits. Alors le lecteur se dit : oui mais
pourquoi tout ceci ? On y vient… Vous voulez de la psychologie ? Je
vais vous en donner, sur deux ou trois pages, précise, argumentée, qui explique
tout. Sauf que Pierre Lemaître est un malin, qui joue aussi avec les codes du
roman policier, et que sa grande théorie, ben… c’est du flan, je vous laisse
découvrir pourquoi ! Et puis il y a toujours ces petits détails la vie au travail (souvenez-vous de "Cadres Noirs") ici, une incurtion dans un Mc Do, et les manières managériales, ou les ménages la nuit.
ROBE DE MARIÉ tient davantage du thriller que du polar. Pas de flic, pas d’enquête. Un bouquin qui joue sur l’angoisse, le suspens, les rebondissements, une mécanique perverse, terriblement efficace.
Autres romans de Pierre Lemaitre chroniqués dans le Déblocnot :
ALEX
J'avais bien aimé "cadres noirs" et "Alex" (une histoire très vénéneuse)... Je suis très tenté par cette thématique qui flirte avec l'étrange....
RépondreSupprimerLuc, un article "pousse au crime", car ma pile des livres à lire qui connaît des hauts et des bas est plutôt en haut ces temps-ci :o)
Attention - le roman s'intitule "ROBE DE MARIE" et non... "robe de mariée"... L'explication est d'ailleurs à la fin du livre...
RépondreSupprimerPierre Lemaitre est effectivement un remarquable écrivain, dans le même genre Karine Giebel vaut vraiment le détour! Le dernier livre de Lemaitre "Au revoir là-haut" bien qu'étant un roman et non un thriller est un pur régal. Amicalement
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