BRIGITTE FONTAINE histoire de la reine des chieuses (sic) - par Pat Slade

- M’sieur Pat, c’est qui cette drôle de femme dont vous allez nous parler ?

- C’est Brigitte Fontaine, une artiste très délirante et qui a pour ami Jacques Higelin.

- Fontaine ? Comme l’homme des fables ? C’est de la même famille ?

- Non absolument pas Ma chère Sonia, attendez que je termine mon papier et on en reparlera. 

- Oui, si votre papier ne tombe pas à l’eau ! hihihihi !!!

Fontaine, je boirai de ton eau

Ce n’est pas moi qui ai dit que Brigitte Fontaine est "une chieuse" mais son vieux compagnon Jacques Higelin, je cite : «Je la hais parce que c’est la plus grande, l’unique, la reine des chieuses». Beaucoup voit en elle une folle complètement déjantée, faux archi faux !! Cette Bretonne née en 1939 montera sur Paris à 17 ans avec un bac littéraire en poche, pour devenir comédienne. Elle fera ses premières planches au théâtre de la Huchette dans «La cantatrice chauve» d’Eugène Ionesco. Pour l’anecdote, la pièce est toujours jouée, avec « La leçon» du même auteur, depuis 1957. Ce qui fait actuellement aux alentours de 20.000 représentations. Mais qui est Brigitte Fontaine ?  Une femme à barbe ? Un astéroïde ? La petite sœur de Rimbaud ?  Tout à la fois ! Des cheveux courts dans les années 60, à mi-longs en 1980, en passant par rien du tout, son brin d’audace en fait une femme en avance sur son temps, chose qu’elle assume en toute circonstance. Son C.V est très complet, Chanteuse, auteur-compositeur-interprète, écrivain,comédienne, romancière et femme poète (Poétesse ?). Une carte de visite dont peu d’artiste peuvent s’enorgueillir (Charlélie Couture à la rigueur).

Après avoir fait les premières parties de Barbara et de Georges Brassens à Bobino, cette excentrique fait la connaissance de Jacques Higelin en 1964, animés par une même passion pour la comédie et la chanson, ils montent avec Rufus au théâtre «La vieille grille» (Rue Larrey 5^e) la pièce «Maman j’ai peur» et enregistrent un album «Douze chansons avant le déluge». La pièce rencontre un tel succès auprès des critiques et du public qu’elle restera à l’affiche plus de deux ans.

Cet album extravagant et psychédélique donne le ton. Dans les années 60, elle devient l’égérie de la musique alternative. En 1965, puis en 1968, sortent deux albums avec un son jazzy puis pop «Brigitte Fontaine est folle !», ainsi que deux simples dont « Cet enfant que je t’avais fait» en duo avec Jacques Higelin. En 1969, elle entame une longue collaboration avec le musicien Kabyle, Areski Belkacem. Avec celui-ci et Higelin, elle crée un spectacle entre théâtre et chanson «Niok». Elle écrit ensuite une série de textes en vers libres et en prose qui composeront le show «Comme à la radio»  qui deviendra un disque enregistré avec l’Art Ensemble of Chicago. Un disque qui marquera une coupure avec la chanson française et ouvrira la porte à la World-Music, elle devient alors une figure incontournable de l’underground français.

- M’sieur Pat, elle est très complexe cette Brigitte Fontaine, je ne comprends pas tout ce qu’elle raconte !

- Vous z’inquiétez pas mam’zelle Sonia ! Moi aussi des fois, je suis un peu perdu dans ses textes !

L’affable Brigitte Fontaine

Oui je sais, vous allez encore me dire que je commets des jeux de mot faciles sur mes titres. Mais Brigitte Fontaine est vraiment quelqu’un de très affable et son petit grain de folie y est pour quelque chose. En une demi-douzaine d’albums publiés pour la plupart chez Saravah, elle a exploré différents mondes poétiques. Renonçant au rime, elle enregistre avec très peu de moyens, parfois sur un simple deux pistes. Des chansons qui abordent humour ou gravité selon humeur. Dans les années 80, elle délaisse un temps la chanson pour se consacrer à l’écriture et au théâtre. Elle joue sa pièce «Acte 2», publie plusieurs romans (19 à ce jour, je vous conseille «Portrait de l’artiste en déshabillé de soie»). Nouvel album en 1984 «French Corazon». Dans la décennie des années 1990, elle se rapproche plus de l’univers de Björk en expérimentant de nouvelles formes musicales, plus électroniques. «Genre humain» rencontre un beau succès avec des titres comme «Conne», «La femme à barbe» ou l’on entend bien le son oriental d’Areski dans la musique (Son mari et compositeur) ou le poétique «Il se mêle à tout ça…».  

En 1997 sort «Les palaces» avec, autour d’elle, la même clique, le mari Belkacem et le grand frère de cœur Higelin , et un nouveau compagnon de jeu : Alain Bashung. Inspiration renouvelée dans les textes, moins abstraits peut être, mais tout aussi poétiques. Adulée par certains, décriée par d’autres, Brigitte Fontaine déclenche les passions. Au début de l’été 2001 le nouvel album «Kékéland» sera son premier disque d’or. Sur cet album, Archie Shepp, Ginger Ale, M, Noir Désir …. Un album loufoque et rigolo avec la chanson «Y a des zazous»  en duo avec M.

Après plusieurs albums dont le très beau «Rue Saint-Louis en île» en 2004, elle apparait en 2006 sur la scène du Barbican theater de Londres, au coté de Jarvis Cocker et d’autre chanteurs anglais pour la première interprétation public de l’ «Histoire de Melody Nelson». En mars 2007, elle est sur la scène de l’Olympia avec ses potes Jacno, Arthur H, Christophe, Anaïs et Jacques Higelin (Bien sur !!). Depuis cette date, trois autres albums sont sortis dont «Prohibition» en 2009 avec la chanson «Harem» qui dénonce la condition des femmes opprimées.

En 2012, elle reçoit (En plus des autres distinctions qu’elle a déjà eues), la médaille Grand vermeil de la ville de Paris, ce qui nous donnera une apparition de Brigitte Fontaine comme on aime la voir. A 73 ans elle est et elle restera une éternellement une femme dans le vent.  

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