mercredi 29 mai 2013

P.Y.G. "We Live, We Die" (2013) par Bruno



Second essai transformé


     Voilà enfin le nouvel opus de P.Y.G. Sincèrement, je l'attendais plus tôt, pensant qu'Yvan et sa troupe allaient battre le fer tant qu'il était chaud, mais mieux vaut sortir tardivement un produit fini que dans la précipitation un truc bâclé, qui fera à jamais tache, et qui pourrait s'avérer fatal.

Évidemment, ce « We Live, We Die » fait partie du premier lot. Toutefois, je craignais qu'il ne parvienne pas à faire aussi bien que le premier et fort réussi « End of the World » (voir chro./lien).
En fait, il serait même possible qu'il ait fait mieux. C'est en tout cas la première impression.
PYG au grand complet
     La pochette, un peu dans la tradition des groupe de Hard-Rock et de Rock-Progressif, reprend les mêmes caractères pour le patronyme que sur le disque précédent. Une manière de reconnaître au premier coup-d'œil la nature de la galette. Précédemment, les trois lettres de P.Y.G s'avéraient comme corrodées, ou plutôt liquéfiées par un virus, comme en putréfaction ; cette fois-ci, elles sont soudées au métal (du genre costaud, carrosserie d'engin de chantier) et commencent à souffrir de la rouille. Le Métal, car il s'agit bien de la matière première de PYG, et la rouille pour coller au titre, pour signifier que rien ne dure, que tout meurt. Même ce qui semble, ou que l'on croit inaltérable ; même l'acier le plus robuste finit par disparaître. C'est l'impermanence.

Yvan, Bernard, Jean-Noël & John

     Dans l'ensemble, « We Live, We Die », paraît être dans la continuité de son prédécesseur. On est plongé dans ce paysage de Heavy-Rock-progressif baigné de couleurs Heavy-Metal plutôt millésimé 80's. Une décennie que l'auteur du projet, Yvan Guillevic, revendique et assume sans problème comme influence, et comme son terreau. Pas d'hypocrisie chez Yvan.
     Pour son petit dernier, Yvan Guillevic (pour mémoire PYG signifie Projet Yvan Guillevic) semble avoir privilégié une facette plus franchement Hard-Rock ; celui des 80's, évidemment. Non pas FM, ni AOR dans le genre grandiloquent et pompeux, encore moins Thrash ou Speed. Rien de tout ça. C'est plutôt dans le direct, à gros riffs cossus, d'obédience mainstream, soit avec des réminiscences du Heavy US (mais pas que...). Certains titres me paraissent plus faciles d'accès et plus concis, avec parfois une relative simplicité dans les riffs. Des riffs puissants qui s'appuient sur les power-chords et un rythme plutôt martial. En quelque sorte, c'est un peu plus radical.

 Une certaine recherche commerciale ? Non, je ne crois pas ; cela aurait pu il y a vingt-cinq ans en arrière (alors que cette musique était en vogue), mais de nos jours ce ne sont certainement pas nos radios (libres ?? je pouffe) qui risquent de diffuser ce style de musique. L'heure est à l'uniformisation, et cela commence par les médias. C'est plutôt et tout simplement un nouveau développement de la personnalité de P.Y.G, qui, j'en suis sûr n'a pas fini de nous surprendre. C'est également une façon de ne pas se répéter, tout en gardant un fil (ou plutôt un câble – gros diamètre-) conducteur. On peut aussi subodorer le souhait d'avoir quelques titres plus percutants, propices aux concerts, avec des rythmiques (voire des tonalités), tant au niveau de la basse que des guitares, construites pour générer une puissance de feu prête à décoiffer et à ébranler les spectateurs.

Yvan et sa Charvel

     La guitare d'Yvan est un tantinet plus cossue, un degré de disto en sus. Sur des photos récentes, il s'expose fièrement avec une Charvel de forme stratoïde à double humburcker (une Pro-Mod - San Dimas ? - avec manche en érable, Floyd-Rose et micros Seymour Duncan "Distortion" - 1 SH-6N et un T6-6 -). Rappelons que les Charvel furent longtemps considérées dans les années 80 comme un des outils indispensables de l'attirail du métalleux désirant faire parler la poudre et rugir son ampli (des acrobates du manche tels que Eddie Van-Halen, Jake E Lee, George Lynch, Criss Oliva, DeMartini, avaient contribué au succès de la marque californienne). Elles sont conçues pour. (Depuis le rachat en 2002 par le géant Fender, Charvel aurait renoué avec la qualité). Alors ? Nouvelle arme pour explorer des contrées plus brutales ?

     Ce que l'on remarque aussi, c'est que les chants des talentueux Nelly Le Quilliec et Morgan Marlet apparaissent plus en osmose ; parfois ils se fondent même entre eux, à tel point qu'ils s'avèrent désormais inséparables. Nelly paraît plus présente, plus confiante également, et Morgan y est tout simplement meilleur. Le duo est également totalement intégré à la musique d'Yvan ; tout au long de l'album il est indissociable.

     Une petite progression également dans la production avec un développement de la dynamique. Un spectre sonore présentant un peu plus d'ampleur et un équilibre accru entre les différents instruments.

     Le disque débute par la chanson-titre, une composition en deux partie. La première est en fait une introduction sur une ambiance onirique, brumeuse, avec de longues notes de guitare étirées et baignées d'un delay long, entre le Floyd et le Rainbow des deux instrumentaux de « Bent out of Shape ».
« We Live, We die (part 2) » déboule tel un pur produit de bon Hard FM US (assez dans le style de Balance, entre « In for the Count » et « Equilibrium »), avec son riff aux claviers, cette basse qui roucoule, cette guitare qui dégouline de grosse disto, son refrain entêtant et le travail des harmonies vocales.
« Ocean Chaser » est un titre un peu lourd donnant l'impression d'un gros bâtiment progressant péniblement, ayant du mal à garder son cap sur une mer sombre et tumultueuse. Nelly se taille la part du lion, elle s'approprie la chanson. Petit break purement Heavy-Metal où Yvan transforme sa gratte en sulfateuse.

Nelly & Morgan

« The Dogs who wants to play » arrive tranquillement sur sa basse trottinante. Un vague air du fameux « Portrait » de Kansas. Toutefois, assez paradoxalement, c'est ici bien plus progressif que le titre du sextet américain, notamment avec des claviers planants qui génèrent une ambiance vaporeuse (que l'on croirait presque échappée d' »Oxygène » ou d' « Équinoxe » deJean-Michel Jarre), et un chant bien plus éthéré qui évoque davantage David Byron ou John Lawton que Steve Walsh. Le Rouennais Pat O'May fait une apparition en offrant un superbe solo de guitare, avec une approche mélo-dramatique totalement dans le ton du titre (ce qui n'est pas toujours le cas des interventions d'invités).

On vient juste de citer David Byron (et John Lawton)... Et bien justement, voilà une bonne surprise avec cette excellente reprise du « Easy Living » d' »Uriah Heep » qui devrait combler d'admiration Ken Hensley et Mick Box. Tout y est parfaitement en place, y compris le clavier d'Hensley et, gros obstacle, le chant de Byron. En bonus, une cavalcade, côte à côte de la guitare et de l'orgue, dans la pure tradition de Deep-Purple et du Heep, avec un son plus proche des réalisations récentes de ces deux dinosaures. Un bel hommage, pour un groupe injustement oublié (même s'il a toujours son noyau d'ardents défenseurs, y compris chez les jeunes – non, pas les minots -), malgré l'influence qu'il eut sur des groupes majeurs de Heavy et de Rock-progressif.


On ne laisse pas retomber la pression avec « Tonight I'll kill a king » qui fait une incursion dans l'heroïc-fantasy. Cela débute par une intro très calme, vaporeuse, jusqu'à ce qu'un gros riff estampillé Tony Iommi vienne plomber le tout sans ménagement. D'ailleurs ce titre aurait été à son aise sur le « Seventh Star » du gaucher de Birmingham.
Yvan ne fait pas de quartier lors de son solo : wah-wah colorée, vibrato traité sans ménagement, exploration du manche par (cinq ?) quatre doigts nerveux et tapping assassin en coda. Une pièce épique dont la pesanteur de la rythmique est atténuée par les claviers et le double chant. Un des sommets de l'opus.

« Beyond the last gate » est une superbe pièce instrumentale où Yvan brode un chorus plaintif, construit sur une poignée de notes. Une sélection travaillée au vibrato qui tend et détend les cordes sans pitié. Des cordes torturées par ce vibrato sadique qui les écartèle jusqu'à ce qu'elles crient leur souffrance dans une mélopée déchirante. Yvan extirpe quelques notes aigües qui réveilleraient un mort. Les arpèges fluides de la harpe celtique de Clothide Trouillaud tranchent sur cette complainte électrique. La harpe a toujours ce don d'évoquer l'harmonie d'une nature reposée, d'un printemps fleuri, d'une forêt accueillante et tempérée, ou d'un ruisseau bordé de mousse, d'un nemeton.
La harpe et le discret fond sonore de Jean-Noël Rozé exacerbent le côté mélancolique du morceau.

« I won't let you go » ballade heavy-rock progressif un peu dans le style d'Uriah-Heep des années 90 avec quelques légères montées en puissance. Un moment de relative accalmie qui met en valeur les performances de Nelly Le Quilliec.


« Hey Woman » reprend les hostilités en envoyant un mixte de Heavy-rock carré s'ébattant avec bonheur dans des eaux fréquentées par le Scorpions de « Blackout » et de « Love at first sting », voire de Warrant et de Ratt (avec un riff carré coloré au Flanger). Quelques saveurs de Glam californien et d'un Rock (héroïque ?) à la Simple Minds (« Goods news from the next world »).
« On the Wall » souffle le chaud et le froid en alternant entre un mouvement calme et reposé, et un autre martial et offensif (presque un riff à la Ramnstein). Yvan sort son attirail de pyromane et fait un joyeux feu d'artifice sur sa six-cordes, qu'il écourte... le manche commençait à fumer. Parfois, ça sent le Queenrÿsche.

« Song of the Werewolf » pourrait bien être l'Everest de l'opus. Last but not least. Certainement mon préféré. Une pièce de Heavy-Metal épique à la couleur dramatique hollywoodienne. On y retrouve du Iron-Maiden, du Uriah-Heep, du Warrior, du Dio, du Black-Sabbath, du Savatage. Une composition évoluant par paliers. Un invité (Alain Boccou) vient même pousser des borborygmes (du death growl) sur un passage primaire purement Heavy-Metal (Metallica). Après un solo de synthé de bataille spatiale, du genre Don Airey, (signé Jorris Guilbaud de Shadyon), Yvan lâche un superbe solo satrianien en diable annonçant le retour du côté mélodique.
Un autre sommet.


PYG étoffe son répertoire en évitant la redite, le plagiat cannibal, avec des compositions dans l'ensemble plus directes. Ce qui augure de bons concerts en perspective.

     Bien que tous les titres soient de la plume de Guillevic (à l'exception évidemment de la cover), à aucun moment il n'en profite pour en faire des tonnes, rien qui s'apparente à une digression. Même si, à deux ou trois reprises -au maximum-, Yvan se lâche dans un débit de notes que l'on pourrait considérer comme démonstratif (en étant vraiment tatillon) ; jamais aucun solo ne s'impose au détriment de la bonne tenue et de la cohésion de l'ensemble. D'ailleurs, à cet effet, les solos sont assez courts, Yvan préférant, sur des pièces plus longues, se fendre d'une seconde offensive plutôt que de s'égarer en babillage inutile.


L'année dernière, le magazine Hard Force avait élevé PYG au rang du Top 4 des meilleurs concerts de l'année. Avec le nouveau matériel en renfort, cela risque fort de chauffer.
Yvan souhaite s'attaquer à l'Europe ? Ça va chier. Certains groupes vont faire la gueule. 


Guitares, auteur, compositeur et producteur : Yvan Guillevic
Guitares additionnelles : John Chaussepied
Chants : Nelly Le Quilliec & Morgan Marlet
Claviers : Jean-Noël Rozé
Basse : Bernard Clémence
Batterie : Julien Oukidja


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Yvan nous parle lui-même de son nouvel opus


le "The Teaser"


... et la vidéo

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