Avec
les amis du blog, nous avons l'affreux sentiment que le Deblocnot a une
rubrique nécrologique très (trop) chargée ces temps-ci. Ce matin, Bruno nous parlait d'Alvin Lee qui lui apporta la gloire à
l'école primaire (Bruno pas Alvin). Richie Heavens,
le folkman hier. De mon coté, au rayon classique, RIP Colin
Davis la semaine passée et le 15 avril Jean-François
Paillard disparait plus discrètement (dans les médias). Concours
de circonstances, samedi dernier, dans l'article consacré au Te Deum de Charpentier,
dans la
présentation de William Christie, je le mentionnais comme l'un des précurseurs de l'interprétation baroque .
Jean-François Paillard va sans doute rafraîchir la
mémoire des mélomanes qui atteignent ou dépassent la cinquantaine, moins les
jeunes. Trois raisons à cela. L'artiste avait 85 ans, sa carrière avec l'orchestre qu'il avait fondé s'est déroulée
en France principalement et dans l'unique répertoire baroque et classique. Enfin,
troisième raison, même, si dès les années 50 il avait compris que l'on ne
pouvait plus ou pas jouer la musique baroque à "la romantique" comme
il était d'usage en ses temps-là (orchestre de 60 musiciens et plus), Jean-François Paillard n'adopta jamais les
nouvelles règles du jeu : voix masculine pour chanter soprano et alto, instruments
anciens, diapason plus bas… Les nouveaux intégristes de la critique officielle
ne lui pardonneront pas cette fidélité à un son passéiste qui avait encore un
public, public parfois dérouté par le style Harnoncourt. Il crée son propre
orchestre en 1953 (Orchestre Jean-Marie Leclair, qui devient Orchestre Jean-François
Paillard en 1959),
aux dimensions réduites (12 cordes et clavecin), offrant ainsi une lecture plus
transparente et allègre du répertoire baroque et classique.
Jean-François Paillard parcourra le
monde avec son orchestre au service des mélomanes qui apprécient la musique
sans chercher à la disséquer. Il jouera dans les petites salles, dans les MJC, les
églises et visitera toute la planète. Il dirigera aussi des orchestres de haut
niveau comme l'English Chamber Orchestra. Si
Jean-François Paillard
n'était pas un baroqueux de la lettre, il était celui de l'esprit. Et
c'est cela qui expliquera son succès auprès d'un public non puriste. Son style
de direction se voulait élégant. Il ferra les beaux jours de la firme Erato (300 albums !) en enregistrant beaucoup avec des
solistes d'exception, ses complices pour les parties de flûte, de hautbois, etc…
Un album paru en 1963 avec le concerto pour clarinette de Mozart avec Jacques
Lancelot fut l'un de mes premiers disques, et a été réédité en
CD sans discontinuité… Il a vendu près de 10
millions de disques !
Loin
du star system et des projos des médias, Jean-François
Paillard a permis à plusieurs générations d'accéder à la musique
dite "classique" avec simplicité. Il a dirigé près de 1500 fois les
quatre saisons de Vivaldi
!!!!
Et
pour dire adieu à Jean-François Paillard qui à rejoint Bach,
Vivaldi et Pachelbel, deux extraits :
1
– Le Concerto Brandebourgeois N°2 de Bach avec Maurice
André à la trompette, Jean Pierre
Rampal et Alain Marion
aux flutes. Repiqué d'un vinyle, ça gratouille, ce sont des instruments
modernes, mais l'élégance du style et la vivacité du trait n'ont en rien vieilli
(1958).
2
- Le canon de Pachelbel.
L'osmose entre les styles romantique et baroque : douceur et tendresse des
timbres…
XXX
Merci à vous pour ce témoignage !
RépondreSupprimerJean François Paillard, c'est vraiment l'émotion immédiate, la beauté, la virtuosité aussi. Quand on fait écouter ses enregistrements à ceux qui ne connaissent pas, ...tout le monde adhère !
J'ai quelques 33 tours de Jean-François Paillard dont l'ensemble était passé plusieurs fois dans ma ville. J'aimais bien l'orchestration classique, sobre et poétique de la musique du 17ème et du 18ème siécle, si différente de celle des baroqueux d'aujourd'hui.
RépondreSupprimer"Sobre et poétique"
RépondreSupprimerJe crois que vous résumez à merveille avec ces simples mots l'art de Jean-François Paillard. Il n'est pas faux que certains artistes baroqueux actuels, en cherchant trop l'innovation musicologique passe à coté de l'essentiel. Enfin pas tous, bien heureusement.
Merci pour ce témoignage.