Do you know
Bleech ? Non ? Ben, moi non plus jusqu'à ce que le skeud me
soit remis par mon facteur préféré, envoyé
en express par le Déblocnot.
Et sans
l'ouverture d'esprit du mag virtuel, je n'aurais sans doute jamais
fait la démarche par moi-même, étant –
peut-être à tort – échaudé par tout ce
qui se réclame du Rock alternatif. A mon sens, appellation
fourre-tout, synonyme d'un Rock qui manque d'âme et qui se
donne parfois des airs faussement intellectuels. Toutefois, je le
concède, une généralité qui n'a pas
nécessairement de réels fondements.
En bref, à
l'évocation des mots Rock Alternatif, je suis plutôt du
genre circonspect.
Or, voilà t'y pas que cette petite galette, sombrement baptisée « Nude », regorge de saines vibrations.
Bleech est un
trio Londonien, créé par deux jolies donzelles, les sœurs O'Neill qui se sont
adjoint les services d'un copain d'école pour le placer
derrière les fûts. Le gars en question, Matt Bick, ayant
d'autres cordes à son arc, mais avec Bleech ce sera la
batterie ; toutefois, on peut le voir empoigner une guitare lors de
sets acoustiques ou semi-acoustiques.
Bleech délivre
un Rock frais, spontané, mélangeant avec aisance une
énergie Punk-rock à des mélodies Pop efficaces.
Certaines saveurs
évoquent irrémédiablement le travail de Melissa
Auf der Maur. Le timbre de voix de Jennifer A. O'Neill, entre fausse fragilité
et conviction inébranlable, y étant certes pour
beaucoup, mais la manière d'aborder sa Gibson 335 (ou de sa
réplique par Vintage) et d'y plaquer ses accords peuvent
également y faire référence. Dans le
cheminement, on pourrait faire le lien avec les titres les plus Pop
de Hole, toutefois Courtney a un timbre bien plus rauque et âpre,
et un chant plus désinvolte et agressif.
On peut aussi
faire la comparaison avec la musique des irlandais de Ash, en moins
cossue toutefois, ces derniers frôlant de temps à autre
un Heavy-rock à la Cheap-Trick. Avec Feeder aussi (sans toutes
les ornementations), ainsi que The Subways, pour qui Bleech à
ouvert, voire Kings of Leon, Breeders et Foo Fighters. Sans omettre
une pléthore de Brith-pop indie des 90's.
Leur premier
single « Is It True That Boys Don't Cry »,
sorti courant 2011 en vinyl, gagne son passage sur plusieurs radio.
Le Ep de quatre titres qui suit leur sert de passe-port pour une
tournée aux USA, et de carte de visite pour le Royaume-Uni, où
il séduit assez rapidement une frange du public. Le mensuel
anglais Clash élit « The Worthing Song »
à la place honorifique de chanson du mois. Même
Kerrang!, le magazine dédié depuis trente ans à
la musique qui fait du bruit, a cédé aux charmes des
O'Neill en juin dernier. N.M.E vante aussi les mérites du
trio. Le batteur des Skun Anansie, Mark Richardson, Billy Lunn, le
chanteur de Subways, et des personnalités des média
anglais sont fans. Il n'y a là rien de surprenant car il
faudrait être sourd, ou de mauvaise foi, pour ne trouver aucun
attrait à ce sympathique trio.
Grâce à
des premières parties pour des groupes et artistes jouissant
d'une certaine notoriété (dont Pete Doherty et
Wolfmother), Bleech parvient à jouer dans des salles moins
modestes et en conséquence à toucher un plus large
public.
En 2012, sort
enfin ce premier album. Dès « Weirdo »,
on est happé par cet explosion de Power-Pop catchy vivifiante.
Le titre suivant, au demeurant plus binaire, est vite rattrapé
par un refrain bourré d'énergie et de conviction
communicative propre à une jeunesse insouciante. « Mondays »,
si ce n'est le riff binaire qui est remplacé par quelques
accords égrelés, présente le même cas de
figure. Ce titre est repris par la BBC pour la série
« Waterloo Road ».
« The
Worthing Song » (issu de leur Ep) déballe leur
facette Punk-rock, savamment habillée de sensibilité
féminine, où l'on pourrait croire que Courtney Love est
venue pousser la chansonnette.
Cerise sur le
gâteau : Bleech n'est pas qu'une machine, bien huilée,
propice à concocter de bonnes sensations Power-Pop déversant
sans ménagement leur dose d'électricité
bienséante. En effet, « Flowerhands »
repose essentiellement sur un simple arpège de guitare couplé
à des notes détachées de basse ; ces deux
reposant sur tissu vaporeux fait d'un violon et d'un violoncelle.
Mark Flethman (Nine Below Zero, sur le dernier opus de Rory Gallagher, "Fresh Evidence", et sur un titre du précédent)
vient déposer délicatement un court chorus d'harmonica
plaintif. Mélancolie et nostalgie au programme. Plus parc
anglais nimbé dans un brouillard d'automne que printemps chaud
et fleuri. Une ambiance floue, vaporeuse, à la David Hamilton.
Retour des enfants-fleurs de la fin des sixties.
« Adrelanin
Junkies » aurait pu être une composition lambda d'un
rock alternatif lorsqu'il se contente de copier ses aînés,
ou de rabâcher des grilles conventionnelles, s'il n'y avait ce
petit truc, ce petit plus, qui élève les chanson de
Bleech au-dessus du lot. Est-ce la voix émotionnelle de
Jennifer, tiraillée entre pudeur et passion, sa guitare qui
sait tirer parti de ses faiblesses et de sa technique (d'apparence ?)
rudimentaire, la basse de Katherine qui parvient au besoin à
extraire des lignes mélodiques de ses câbles (de sa
Fender Precision) ? Même Bick sait modérer ses ardeurs,
varier sa frappe, pour servir les compositions – et non son égo
– . En fait, qu'importe l'analyse, doit-on vraiment disséquer
la musique ou la prendre telle quelle se présente et se
laisser toucher (si affinités évidemment) par les
émotions et les sensations qu'elle génère. Dans
ce cas, Bleech réussit, sans forcer, sans matraquage
médiatique d'aucune sorte, à charmer.
« Holidays »
trompe son monde en débutant telle une ballade douce amère,
mais avant d'atteindre la première minute, elle se mue en
Power-Pop-rock aux Grunge, alliant une grâce féminine à
un souffle chaud irradiant d'énergie électrique
ardente.
« I
Wanna Be Me » (également repris de leur Ep) balance
un rythme furieux, à la fois vindicatif et entraînant.
« When
I Get Old » renoue presque avec l'ambiance particulière
de « Flowerhands » bien qu'étant ici
nettement plus électrique. La sensibilité des O'Neill
transpire à travers leurs instruments et la voix douce et
sussureuse de Jennifer à la somptueuse chevelure de feu. Inspiration de fées – rockeuses - de
Cottingley ?
« Dancing
with Me » et « The Hippie And Me »
représente à mon sens les deux points faibles de
l'album. Enfin, c'est relatif, car ces deux pièces en
apparence un tantinet moins habitées, comportent tout de même
leur part de bonnes vibrations. Là encore, on retrouve la
capacité de Bleech à pondre des refrains accrocheurs,
jusqu'à en être parfois entêtants.
On peut regretter
un format, certes typiquement Pop, ou Punk, des chansons qui
avoisinent les trois minutes – l'album atteignant juste les
trente-huit minutes avec douze pièces – alors que certaines
compositions auraient gagné, sinon à s'étirer,
du moins à se doter d'un couplet en plus, de quelques mesures
supplémentaires, ne serait-ce que pour prolonger le plaisir.
Mais le credo de Bleech, c'est d'aller droit à l'essentiel –
sans pour autant réduire ses compositions à quelque
chose de binaire, de primaire - ; d'ailleurs les soli semblent
proscrits.
Avec Bleech, la
terre anglaise n'a pas fini de faire germer de la bonne Pop, qu'elle
soit fortement ou non imbibée de Punk ou/et de Rock, et de
nous enchanter avec.
shocking
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