jeudi 3 janvier 2013

MAXIME LE FORESTIER, Une Époque Au Poil - par Pat Slade




Maxime et la Clairvoyance des Producteurs


1972, au siège de la maison Polydor, autour d’une table, se tient la première réunion de promotion du premier album de Maxime Le Forestier. Album enregistré en volant des heures de séances studio non utilisées par Serge Reggiani. Jacques Bedos directeur artistique y croit. Sur la table, une pochette pour laquelle Polydor n’a débloqué aucun budget. Un pote photographe a fait quelques clichés de Maxime adossé à un mur de la butte Montmartre sur lequel Jacques Bedos a fixé une rose… avec du ruban adhésif. Le P.D.G de Polydor, Mr Kerner, se saisit de l’album et déclare à la cantonade : "Jolie pochette, monsieur Bedos, malheureusement, il n’y a rien à l’intérieur". Polydor vendra un million et demi d’exemplaires de ce premier album !


Maxime et sa Maison Bleue en Or


Si j’ai voulu écrire une chronique sur cet album éponyme, c’est surtout pour recadrer une chose qui m’énerve au plus haut point, mais j’y reviendrai en temps utile.
Je vais encore parler d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre (J’ai, des fois, l’impression d’écrire pour les maisons de retraite !), mais dont les lecteurs du Déblocnot, en général, se rappelleront surement (Mais je ne vous prends pas pour des patients d’une maison de gériatrie, loin de la !). Nous nous retrouvons dans une époque où l’affaire du Watergate commençait ses soubresauts, ou Salvador Allende formait son nouveau gouvernement, en janvier en Irlande du Nord, le tristement célèbre et sanglant "Bloody Sunday" fera plus tard le succès de U2. Naîtront à cette triste époque, Zinedine Zidane, Vanessa Paradis ou encore Brian Molko le chanteur de Placebo. Une année qui voyait disparaitre Maurice Chevalier, Bobby Lapointe et Pablo Casals.              
- Qui était Pablo Casals monsieur Pat ?
- Demandez à Mr Claude ma petite Sonia !
Notre président était Georges Pompidou et Maxime (Son vrai prénom est Bruno) avec sa barbe, son look néo-baba et ses chansons engagées mettait un coup de pied dans nos vies trop conformiste. Il explose après une mémorable première partie de Georges Brassens à Bobino. Mais le barbu n’en n’était pas à son premier coup d’essai. Avec sa sœur Catherine, ils avaient déjà formés un duo en reprenant des titres de Moustaki et Serge Reggiani qui interprétera même une de ses compositions en 1968 "Ballade pour un traître" qu’il reprendra lui-même plus tard sur scène.

En 1969 sort un premier 45 tour avec "La petite fugue".



L’Éducation Sentimentale d’Un Album


Maxime est accompagné de ses deux compères, Patrice Caratini à la contrebasse et Alain le Douarin à la guitare. Le vent contestataire de mai 68 et l’époque Hippies est encore dans l’air du temps. Chanteur un peu contestataire et franchement antimilitariste ("Parachutiste" écrit par sa sœur et repris plus tard par Joan Baez). C’est la consécration pour le premier album avec des titres qui resteront dans la mémoire collective. "Mon frère", est le morceau qui ouvre les hostilités. Beaucoup de personnes se reconnaitront dans ce titre, surtout, malheureusement, celles qui auront perdu un frère. Mais Maxime n’a jamais eu de frère, alors parle-t-il à un ami imaginaire ? Et puis un autre titre "L’Education Sentimentale".
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Qui n’a pas essayé sur une vieille guitare classique, sans aucune notion du solfège et de tempo, de rejouer l’intro ? Et puis tous les autre morceaux plus aussi célèbres les uns que les autres "Marie, Pierre et Charlemagne" que certains (Comme moi !) ont appris à l’école. Et puis il y a le pamphlet antimilitariste par excellence, "Parachutiste" (Maxime a été para pendant son service militaire) le titre fut censuré. "Comme un arbre", chanson écolo avant l’heure…
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Et puis arrive mon coup de gueule dont je parlais plus haut. Il y a une chanson sur cet album que tout le monde s’entête à nommer "La maison Bleue", cette chanson s’appelle "San Francisco" point barre ! Et d’ailleurs la maison existe bien (voir photo) et même une plaque y est apposée. L’adresse exacte ? N°3841 dans la 18ème rue à San Francisco, évidemment.



Le Steak Ou L'Album D'Une Certaine Consécration


Un an à peine après son premier album, un steak de vinyle tombe dans nos assiettes. Maxime confirme les espoirs placés en lui avec ses thématiques engagées. Hormis le morceau titre, l’attention est attirée par "Février de cette année-là", véritable petit cour d’histoire des éléments qui ont marqué la date de sa venue au monde. On retiendra aussi "Dialogue", chanson sur le conflit des générations.
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Le discours entre un père traditionnaliste et un fils rempli des valeurs que lui a apporté mai 68. "Autre dialogue" se fait plus tendre. Un homme fait des avances à une femme (Catherine le Forestier) qui reste insensible à son discours, peut être une chanson sur l’émancipation de la femme ? Et puis "J’m’en fous d’la France", un titre qui rejette chaque composante de la devise de la république : "Egaux ta femme et toi, mais pas la paye de fin de mois".


Maxime Le Saltimbanque


Après un album live à l’Olympia en 1974 avec les reprises de ses titres les plus connus, il rajoute en plus un titre de Jean-Michel Caradec "Mai 68".

Il sort l’année suivante "Saltimbanque".
Une galerie de portraits comme le montre la couverture dessiné par Cabu. Le morceau titre ouvre le bal avec une jolie comptine d’un enfant de la balle qui deviendra poète… Suivent "L’Irresponsable" ou une bonne critique de tous les marchands de drogue qu'ils soient dealers, spiritueux, buralistes ou pharmaciens se retrouvent entassés dans le même sac et mis au banc de la société, et puis "Petit robot", critique du formatage des esprits de la naissance à l’émancipation finale. "La vie d’un homme"…
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- Sonia ? Savez- vous qui était Pierre Goldman ?
- Heuuu… !? Le frère à Jean-Jacques Goldman ?
- Pas loin ! C’était son demi-frère ainé !
"La vie d’un homme" est une chanson dédiée à Pierre Goldman qui a été un activiste d’extrême gauche avant de tomber dans le banditisme. Il a été accusé (A tort ?) du braquage sanglant d’une pharmacie. Beaucoup de personnalités artistiques ou intellectuelles de gauche créeront des comités de soutien suite à son procès. Maxime écrira cette chanson alors que Pierre est incarcéré. Il est libéré en 1977. Il sera assassiné en 1979, assassinat revendiqué par un mouvement d’extrême droite "Honneur de la police".

Arrive, pour moi (Mais à chacun ses gouts !), la plus belle chanson de cet album "Les Lettres". Nous nous retrouvons en plein cœur de la première guerre mondiale avec un échange de courriers entre une femme et son mari parti au front. Pour faire vent contraire à la mélancolie et la tristesse de cette chanson, il finira par un morceau plus enjoué "L’Auto-stop".
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Le Maxime le Forestier de cette époque a disparu avec l’âge, ce qui est normal, nous vieillissons tous ! Ce qu’il fait maintenant ne m’intéresse pas. Même si il a une belle carrière, je regrette quand même l’époque post-néo-arnacho-gaucho-baba-folkeux-barbus du bonhomme, mais bon !!! Tout évolue avec le temps.


Fin d’une chronique qui n’était pas si "barbante" que ça !




Vidéos



Redécouvrez l’époque de la barbe avec «Comme un arbre dans la ville» - «Mon frère» et bien sûr «San Francisco»



4 commentaires:

  1. Et non pas barbante du tout ta chronique! J'y suis même plutôt sensible, 1972 année de sortie de ce superbe premier disque de Leforestier, cette année restant pour moi une année éblouissante, (j'avais 20 ans tout rond! ). Année bénie pour la musique! Hot Tuna, Tournée du Grateful Dead en Europe, découverte (en ce qui me concerne)de petits morceaux de buvard imbibés de substances au festival d'Avignon.....bref!
    Alors voilà ce disque reste emblématique pour moi et bien que pas trop chanson francaise, un petit chef d'oeuvre. Je comfirme "la maison bleue " existe bien, je l'ai vue de mes yeux vue! L'objecteur de conscience que j'étais alors ne pouvait que se régaler d'une chanson comme "Parachutiste", chantée aussi par Joan Baez si ma mémoire est bonne.

    PS: 20 ans en 72 certes mais pas encore en maison de retraite! Amicalement JP

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  2. Mes gamins ont appris "Né quelque part" à l'école... C'est le Maxime d'après, mais un beau texte tout de même...

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  3. le maxime d'après est tot aussi intéressant,il ne faut pas se cantonner qu'à la période que vous citez,même ses diques plus électroniques recèlent des trésors ,c'est un peu réducteur!!!!

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  4. pat slade3/1/13 13:19

    Cher Anonyme, cette chronique est une rétro des trois premiers albums de Maxime,je ne cites pas les plus récents ,ne les connaissant que très peut,mais je ne dit pas que les albums qui suivent sont mauvais, Maxime à été et reste un grand de la chanson Française.

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