A l'aube des
années 80, il y avait un guitariste qui suscitait
l'admiration de tous les apprentis guitar-heros en mode Metôl,
ou Heavy-rock mélodique. Il s'agit de Michael Schenker,
frère de Rudolf, le leader, compositeur et guitariste
rythmique des venimeux teutons de Scorpions.
Souvent surnommé l'ange blond, ou le Schenk, l'histoire de Michael débute dans les années soixante, lorsque, piqué par le virus de la musique (comme son frère Rudolf et sa sœur Barbara), à l'âge de dix ans, il décide de suivre l'exemple du frérot en se mettant à la six-cordes. Avec l'ambition de devenir meilleur que son aîné. Ainsi, grâce à un travail quotidien, il fait rapidement preuve de prometteuses aptitudes. Pour y arriver, il bosse parfois matin et après-midi (jusqu'à huit heures par jour), évidemment au détriment de ses résultats scolaires. Dès 1968, à seulement treize ans, il est le soliste d'un groupe, Kopernikus, où officie au chant un certain Klaus Meine. L'année suivante, Rudolf pense qu'il est préférable qu'il laisse sa place au chant à un meilleur (vrai ?) chanteur, et essaie aussi de trouver un soliste digne de ce nom pour son groupe, Scorpions. Ainsi donc, en 1969, la première mouture solide et sérieuse de Scorpions s'appuie sur les frères Schenker et Klaus Meine. En 1971, premier opus avec « Lonesome Crow », mais déjà Michaël ne souhaite pas rester dans l'ombre de son frère, et aimerait bien sortir des frontières de l'Allemagne en intégrant un groupe étranger.
Alors
que Scorpions assure la première partie de la tournée
allemande d'un groupe anglais U.F.O., l'occasion se présente
le soir où Bernie Marsden (Wild Turkey, Babe Ruth, Paice Ashton & Lord, Whithesnake, Alaska, Moody Marsden Band, Company of Snakes) quitte son
poste sans préavis. Phil Mogg demande alors à
Michaël de les dépanner. Conséquence : Michaël
part en Angleterre avec sa Flying V (cadeau de Rudolf), laissant
alors un Scorpions moribond, qui aura bien du mal à
s'en remettre.
Pour U.F.O. C'est un tournant important. Tout en durcissant le son, il prend parallèlement des allures mélodiques chromées portées par la guitare volubile et chantante du jeune Schenker. L'U.F.O décolle vraiment, dès « Phenomenon » (album mésestimé, à redécouvrir). Sans franchir pour autant le mur du son, en cinq galettes il pose désormais les bases d'un Heavy-rock flamboyant et cossu qui servira d'exemple. C'est l'âge d'or du combo de Phil Mogg et Pete Way (1). A 23 ans, le Schenk quitte un vaisseau au faîte de sa gloire. Mogg a la réputation de régler les divergences à l'aide de ses poings (notamment avec Way), une attitude qui déplaît à l'Allemand qui prévient que le jour où cela le concernera, il partira illico. C'est ce qui arrive en 1978. On croit à une réconciliation lorsqu'il revient pour aider au mixage de « Stranger in the Night » (double live sorti en 78). Mais il y a autre chose. Perturbé par un succès arrivé certainement trop vite et trop jeune, l'éphèbe blond a un besoin urgent de faire un break avant de griller un fusible. De plus, des problèmes d'addiction aux drogues n'arrangent rien, au contraire. Parfois ses soli trahissent une sensibilité, qu'il n'a pas su gérer, protéger, du cirque du rock-business.
Sa
participation à l'album « Lovedrive »
de Scorpions (en 1979), et le fait d'accompagner pour deux
tournées d'anciens compagnons de route lui font du bien.
Les
accus rechargés, quelque peu rasséréné,
en 1980, il fonde le MICHAEL SCHENKER GROUP (ou M.S.G.). Les débuts
sont houleux, car dorénavant, certainement miné par
diverses substances illicites et autres médicaments (il
fait une overdose de tranquillisants, suivie d'une rechute), il
aura toujours du mal à gérer sa carrière, à
garder l'équilibre. C'est cette année qu'il se coupe
les cheveux pour éviter d'être reconnu. Il est alors
assez paradoxal de vouloir débuter une carrière solo
alors qu'il a tant de problème avec la pression imposée
par la notoriété. De plus, ce qui n'arrangera rien
par la suite, il n'a pas les qualités requises pour être
le leader d'un groupe, fuyant les responsabilités dès
que l'ambiance se dégrade.
Les
deux premiers opus sont un succès. Les fans du Heavy-rock
ouvragé, à l'instinct mélodique affirmé,
d'UFO et orphelins des soli lumineux du germain se précipitent
dessus, sans être vraiment regardant. Car, en dépit
de la qualité indéniable des belligérants et
de quelques compositions fortes (surtout en ce qui concerne le second qui comporte tout de même un beau petit lot de classiques), cela sonne dans l'ensemble assez
creux. Ces galettes sont en général plutôt
bonne, mais sans surprise, trop empreintes d'un certain
classicisme. Le petit lord Schenker paraît avoir perdu la
flamme qui l'animait sur des disques tels que « Lights
Out », « Obssession »,
« Phenomenon », « Strangers in
the Night ». Le double live qui suivra me paraît
un peu précipité, et semble trahir avant tout une
optique purement marketing. Toutefois, le live a donné la
force et le mordant qui manquaient, élevant ainsi les
compositions du MSG à un niveau correspondant plus à
la notoriété du guitariste.
Après un premier opus réalisé, à l'exception du chanteur Gary Barden, avec des musiciens de studio renommés, le second présente enfin une formation stable : Chris Glen à la basse, Cozzy Powell aux fûts, et Paul Raymond aux claviers et à la guitare rythmique. Pratiquement un super-groupe. Cependant, comme Schenker n'assume pas pleinement son rôle de leader, fuyant les conflits internes plutôt que d'essayer de les atténuer, de les gérer, l'ambiance se détériore rapidement.
Gary
Barden et Paul Raymond se sont cassés après la
tournée de 1981, laissant, une fois de plus, Michael dans
l'embarras. C'est grâce à Cozy Powell qu'il parvient
rapidement à rebondir. Suivant le conseil de Powell, il
embauche Graham Bonnet (2). Et l'album qui suivra, « Assault
& Attack », bien que décrié par une
frange des fans de MSG, me paraît le meilleur de la
discographie solo du Schenk.
La
section rythmique se compose désormais de deux compères de vieille date : Chris Glen à
la basse (Tear Gas, Sensational Alex Harvey Band, The Party Boys) et de Ted McKenna à la batterie (Tear Gas, Sensational Alex Harvey Band, Rory Gallagher, Ian Gillan, Gwyn Ashton).
Il faut bien le dire, les avis divergent sur cet opus. Or, lors de sa sortie, l'enthousiasme était presque unanime (du moins dans la presse – et mon entourage -). Et pour cause. Schenker semble avoir retrouvé toute sa verve et sa pertinence. Il est dans ses grands jours. Et la voix puissante et légèrement rauque de Bonnet se marie à merveille avec ce Hard-Rock qui sait se montrer lyrique sans être scintillant, ou maniéré.
L'entrée
en matière, « Assault & Attack »,
annonce la couleur. No quarter. Rien de compliqué ni
d'alambiqué, non. Ce titre s'annonce comme un leitmotiv du
genre « je suis toujours là, prêt à
rendre les coups – still alive & well – (ou – still alive
& kicking »). Et le rouquin du Lincolnshire n'avait
encore jusque-là jamais fait preuve d'un chant aussi
rageur.
La
composition suivante baisse le tempo mais pas les armes. Le groupe
fait front sur la base d'un Hard-blues binaire au possible (qui
n'aurait pas déplu à certains combos des antipodes
justement). Seul les ponts, avec l'aide de nappes de claviers de
Tommy Eyre, versent vers un semblant d'harmonie... et,
progressivement, Schenker se laisse aller vers un chorus à
la fois échevelé et mélodique, vaguement
wagnerien.
« Dancer »,
le 45 tours, le titre taillé pour les radios.
La
première face se termine sur « Samouraï »
; un rien roboratif, presque l'archétype du titre
Heavy-rock du débuts des 80's. Bonnet tente de surnager
au-dessus d'une rythmique sans relief, et ses efforts parviennent
à sauvegarder l'ensemble. Et, encore une fois,
l'intervention de la Flying V bi-colore fait des merveilles.
On
découvre la face 2 par un « Desert Song »
qui est désormais un classique du MSG (également
repris par Bonnet en solo).
« Broken
Promises » ! Le genre de truc qui m'électrise le
sang, m'hérisse le poil, me file la patate. Mouuaarrgghhh
!!!! Rien que l'intro à la batterie, pourtant fort simple,
me met dans l'ambiance. Ted McKenna fracasse ses peaux dans les
règles de l'art. Schenker foudroie son ampli avec un riff
syncopé et Chris Glenn se joint à l'effort avec une
basse tournoyante. - « Et Graham ? » Ben quoi Graham ? Il s'égosille, s'arrache les cordes vocales, et
cela va crescendo.
Après
cette passe-d'arme, « Searching for a Reason »
ferait presque pâle figure.
Final
avec l'instrumental « Ulcer ». Gros travail
de rouleau compresseur de McKenna.
La réédition (remasterisée) de 2009 offre en bonus la face B du 45 tours de « Dancer ». Sympa, sans plus. Cela rappelle les Moxy, Dirty Tricks et consorts. Assez carré, avec une harmonie de poète de l'âge de pierre.
L'album
a été produit par Martin Birch, le sorcier de
Deep-Purple qui eut droit à un nouvel essor grâce à
Iron-Maiden qui l'a remis au goût du jour.
L'entente
entre Bonnet et Schenker ne dure pas (à l'exception du
Japon où il atteint un score de vente qu'il n'approchera
plus jamais, même de loin, le classement dans les charts
baisse, notamment aux USA).
Il y a une rumeur sur la cause de la rupture. Graham aurait été viré par Schenker parce qu'il aurait dit, sur scène de surcroît : - "Voici le guitariste qui fait les soli que le bosch ne peut jouer". (sic !)
L'année suivante, Bonnet fonde
un nouveau combo de Heavy-rock racé, en dégottant
une jeune recrue suédoise au nom imprononçable :
Yngwie Malmsteen.
En
aparté, rappelons que Graham Bonnet n'a pas toujours eu la
côte avec le fan lambda de Hard-Rock des années 80.
En effet, ce rouquin, ancien australien d'adoption, n'a pas
remporté tous les suffrages des hordes de chevelus, de jeans
et de cuirs vêtus, par faute d'un look à cent
lieux de leurs signes de reconnaissance (3). L'intolérance a
plusieurs formes et niveaux. L'habit ne fait pas le moine ?
Schencker
renoue avec Barden pour enregistrer un passable « Built
to Destroy ». Certes, Barden sait chanter.
Malheureusement, dès qu'il force sur sa voix, on dirait une
imitation des tics des hurleurs des 80's (n'est pas Gillan qui
veut). On a même parfois du mal à croire qu'il s'agit
bien du même chanteur qui officie sur « MSG »
et « One Night at Budokan ».
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Side one
- "Assault Attack" (Schenker, Bonnet, Glen, McKenna) - 4:16
- "Rock You to the Ground" (Schenker, Bonnet) - 5:48
- "Dancer" (Schenker, Bonnet) - 4:41
- "Samurai" (Schenker, Bonnet, Glen) - 5:16
Side two
- "Desert Song" (Schenker, Bonnet) - 5:51
- "Broken Promises" (Schenker, Bonnet, Glen) - 6:21
- "Searching for a Reason" (Schenker, Bonnet) - 3:46
- "Ulcer" (Schenker) - 3:53
(1) Il ne faut surtout pas renier les excellents « You Are Here » et « Monkey Puzzle ».
(2) Powell connaissait Bonnet pour avoir travaillé à deux reprises avec lui. La première au sein de Rainbow, avec notamment l'album « Down to the Earth », puis sur le disque solo de Bonnet, « Line Up ».
(3) Même Ritchie Blackmore le lui avait reproché.
Pour en savoir plus sur U.F.O. : U.F.O. "The Story (Part One " by Philou
U.F.O. "The Story (Part Two) by Philou
Graham Bonnet...
RépondreSupprimerL'une des plus grande voix du Hard Rock, même le Troubadour avec sa lute ( Blackmore ) est tombé sur le cul lorsqu'il a réceptionné une K7 ( bin ouai à cette époque il y avait des K7 ) avec des chants de G.Bonnet, il l'a embauché directement dans Rainbow.
Mais dis le bordel le nom du groupe avec le suédois qui descend des soli à la vitesse grand V ( je ne suis pas fan )... ALCATRAZ !
ALCATRAZ avec le somptueux Steve VAI.
Ouaip, et il me semble bien que la fameuse K7 concernait le petit hit qu'il avait réalisé à l'âge de 17 ans avec son cousin. Tous deux émigrés en Australie, ils avaient fondé un petit groupe, The Marbles, et étaient potes avec des frères Gibb (des Bee-Gees).
SupprimerQuand je dis je ne suis pas fan je parle de YyziinZgy Marcel.
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