mercredi 10 octobre 2012

RIVAL SONS " Head Down " (2012) by Bruno


Confirmation

     Après un premier disque, « Before the Storm », auto-produit et uniquement disponible en téléchargement (il y eut une édition CD en tirage limité) en 2010, un second, « Pressure & Time », en 2011, plutôt bien accueilli (avec des ventes perçant timidement dans les charts US, un peu plus dans les canadiens, et encore plus dans les anglais et les pays scandinaves), Rival Sons, soufflant sur les braises de leur petit succès, débarque avec leur troisième réalisation : HEAD DOWN.

     Head Down est dans la continuité du précédent. Gros son organique, production consistante et irréprochable, et culture d'une atmosphère générale « seventies ». La tonalité est pratiquement la même si ce n'est que Scott Holiday favorise un tantinet plus la Fuzz que l'Overdrive, au point où parfois on songe à Josh Homme (à moins que Scott ait tout simplement favorisé sa Fender Jazzmaster - customisée par des micros Lollar - au détriment de ses Gibsons Firebird). Le quatuor a évité le piège de calquer - suite à son relatif succès - le précédent opus, cependant sans pour autant changer un iota de sa personnalité.


   Cela débute très fort avec « Keep On Swinging ». C'est dur et appuyé, assis sur un riff en béton et cela respire le Led Zep à plein nez sans en être un ersatz ou un plagiat pur et simple. Le genre de truc qui s'incruste dans la tête. Et d'entrée, on note l'importance de chaque musicien, chacun tenant une place prépondérante. Le chanteur et le guitariste évidemment, car le format du Heavy-rock les place en avant ; toutefois il est indéniablement que la section rythmique va au-delà d'un simple statut de soutien. En plus d'être une section du genre appliquée, travaillée et inébranlable, elle dépasse souvent ses attributions habituelles afin d'enrichir les compositions, au point d'être parfois à deux doigts de voler la vedette à ceux qui, de part leur position, accaparent généralement l'attention.
De là à les comparer aux grands binômes du genre (Bogert-Appice, Jones-Bonham, Thain-Hartley, Ridley-Shirley, Petersson-Carlos), il n'y a qu'un pas.
A près une telle entrée en matière, on craint pour la suite : en comparaison cela risque de paraître fade. Et bien non, « Wild Animal » resserre les rangs. Moins Heavy, mais plus enlevé, (plus frais ?). Une pièce qui pourrait faire le lien avec la jeune scène rock actuelle, si ce n'est qu'elle l'enterre aisément.
« You Want To » fait dans le Heavy-noisy-psyché et renoue ainsi avec le premier opus « Before the Storm », tout comme son frère de sang, « Three Fingers » (on frôle presque les Sonic Youth et Pixie).

   Riff entre les Stones et les Kinks pour « Until The Sun Comes », qui d'ailleurs a un p'tit parfum sixties, « Swinging London ». Même le court solo a le cul coincé entre un Pete Townshend improvisant et le solo de Jimmy Page sur « You Really Got Me » (Non ! de Davis, of course). Cela évoque à la fois les Who (ère 60's), les Small-Faces et les Kinks, qui profiteraient de la nouvelle technologie d'enregistrement. Vivifiant.
« Run From Revelation » atomise le Country-Blues ; R.L.Burnside meets Granicus et Samuel Prody.

   Tout comme sur le précédent, Rival Sons fait preuve d'une grande sensibilité dès qu'il se frotte aux ballades. Ainsi « Jordan » est un moment d'introspection, une complainte poétique, miné par le regret. C'est joué avec retenue et sans pathos, et ce même lorsque la mesure s'alourdit avec un Michael Miley qui n'hésite alors pas à s'en donner à cœur joie, brutalisant ses fûts sans que cela paraisse déplacé.

   Tempo et chœurs Rhythm'n'blues sur l'entraînant « All the Way », qui évoque le glam-rock du Gary Glitter de 1972-73 (la guitare imite même le saxo de Harvey Ellison - ou bien est-ce un effet aux claviers ?-), avec une touche du Grand Funk Railroad de « Shinin' On », de « We're American Band », lorsque la bande de Mark Farner injectait une bonne - et bienvenue - dose de la Motown des 60's. Ce qui est formidable sur cette pièce c'est que la guitare ne se fend d'un riff qu'après 1 minute 30, et que son absence ne manque aucunement. D'ailleurs, elle ne se manifeste ici qu'un couplet sur deux. Less is more.

« The Heist », malgré un riff carré, s'immerge dans l'Acid-Rock Californien ; on pense notamment à Grace Slick et son Jefferson Airplane, ainsi qu'à Black Pearl.
 

 « Rava » est un baume apaisant après l'agression sonique de « Three Fingers ». Un instrumental à la guitare acoustique dont la tonalité nous ramène à « Black Mountain Side » (sans les percus), voire à « Bron-Y Aur », de Sir Patrick James Page.

   Un interlude avant la pugnacité de « Manifest Destiny Pt.I » et « Pt.II ». Là, on touche le sulfureux. C'est rampant, moite, poisseux, menaçant. C'est le Black Sabbath de l'époque Ozzy qui renaît de ses cendres ! Avec une légère touche de psychédélisme. Riff basique reposant sur le Tremolo, apparemment d'une tête Fender.

   Clôture sur l'acoustique et intimiste « True »... devant lequel on ne peut que se recueillir. Il suffit ici d'une seule guitare folk et du chant angélique, aux réminiscences celtiques, de Jay Buchanan pour imposer le silence, forcer l'attention devant cette brassée d'émotion pure et limpide. C'est beau. Oui, beau, un terme que l'on n'emploie guère en musique, a priori, pour les groupes actuels dits Rock (et je ne parle pas de...) . On pourrait citer comme point de référence « Battle of Evermore » (de qui déjà ??), toutefois, on peut se demander si, ici, Jay Buchanan ne supplante pas Robert.

     Si Scott Holiday n'est toujours pas un virtuose, en dépit d'une nette amélioration, il est par contre une véritable usine à riffs. Des riffs biens sentis, viscéraux, en apparence simples, mais efficaces, qui tentent de retrouver la magie des saigneurs du genre de la première moitié des 70's. En l'occurrence la science des Tony Iommi, Paul Kossof, Jimmy Page, Leslie West, Mel Galley. On peut regretter ses interventions solistes en mode noisy-psyché (Andy Patridge en survoltage), heureusement fort courtes et revues à la baisse, et donc l'absence d'envolées lyriques telles que pouvaient le pratiquer les protagonistes sus-cités, cependant le besoin ne sent fait pas particulièrement sentir.
Holiday est un franc-tireur, qui va droit au but et ne s'encombre pas d'enluminures.
Malgré tout, on peut dorénavant trouver deci-delà quelques soli potables, pas désagréables, et dans le ton. Paradoxalement - et heureusement - la seule intervention qui s'étire, tire néanmoins son épingle du jeu grâce à une utilisation futée (ou bien roublarde ?) d'une réverbe stratosphérique, d'une wah-wah ample et de la puissance d'amplis surchauffés (un peu comme on peut quelques fois l'entendre sur certains témoignages lives des années 68 à 73).
 

      On mesure toute l'importance du batteur (quelle frappe ! quel swingue !). Décidément ce Michael Miley me donne l'impression de retrouver ces fameux batteurs des années 60 et 70, que l'on disait à la fois plus techniques et groovy que leurs homologues, plus versatiles également. D'ailleurs, en aparté, Miley aborde la prise dite Tambour (
la position de la baguette dans la main dédiée à la caisse claire - soit la gauche pour les droitiers-  en opposition avec la  Prise Timballier, soit paume vers le haut) peu usitée dans le milieu du Rock. A une certaine époque, des potos, amateurs de martèlements furibonds sur des peaux, avançaient que cette prise était une preuve d'un apprentissage qui était passé par le jazz. Une technique (pas évidente au début) acquise favorisant le swingue et la rapidité (des noms ? Ian Paice, Stewart Copeland, Dennis Chambers, Carl Palmer). Quoiqu'il en soit, ce Miley est tout sauf roboratif. Il sait allier puissance et pulsation savante.

     Quant au travail de Robin Everhart on n'est guère étonné qu'il ait complété son éducation musicale, via un cursus jazz, à l'UNT, une université du Texas (Denton). Il cite volontiers, pêle-mêle, pour heros, sources d'influences : Sting, Flea, John Entwistle, James Jamerson, Larry Graham, John Paul Jones, Verdine White, John Patitucci, Paul Jackson Jr., Prince, Paul McCartney et Paul Chambers. Des musiciens qui ont marqué irrévocablement les groupes dans lesquels ils ont officié. Et devant lesquels, il n'a pas à rougir (hormis Entwistle).

     Alors que la première écoute m'avait laissé un léger goût amer de déception (léger car certaines pièces sont si évidentes qu'elles séduisent dès les premières mesures), « Head Down » s'inscrit dorénavant comme le digne successeur de « Pressure & Time ». Il est même plus équilibré. Et ce, même si je ne goûte pas vraiment « You Want Me » et «  Three Fingers » , car trop Noisy ou Heavy-psyché à mon goût.


1."Keep On Swinging"  2:59
2."Wild Animal"  3:27
3."You Want To"  4:15
4."Until The Sun Comes"  2:28
5."Run From Revelation"  4:14
6."Jordan"  6:18
7."All The Way"  5:10
8."The Heist"  3:13
9."Three Fingers"  3:17
10."Nava"  2:01
11."Manifest Destiny, Part 1"  8:20
12."Manifest Destiny, Part 2"  4:24
13."True"  4:43




Comment ?? On m'annonce que les gamins de 1D ont gagné un bibelot pour leur clip ?!? Du foutage de gueule oui ! Sans prendre en considération le facteur musical (et déjà là, y'a pas photo), ni l'authenticité (pas photo non plus), ça c'est un clip. Un vrai.
 


Lien sur autre chronique :
Rival Sons ; "Pressure and Time"

10 commentaires:

  1. Je trouve ça sympa mais un peu trop appliqué/propre !
    PS : Combien de fois faudra t-il répéter que ce n'est pas Jimmy Page qui joue le solo sur You Really Got Me mais bien Dave Davies ?

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    1. Comme le disait Shel Talmy (le producteur) : " You know how many times I've answered that question? I wish I had a buck for each one. Jimmy Page did not play the solo on "You Really Got Me," he played rhythm guitar".
      Jimmy ne joue pas le solo, ce qu'il avait déjà nié lors d'un interview en 70.
      (par contre il jouerait la rythmique - parce que Ray Davies n'aimait pas trop chanter et jouer de la gratte en même temps -).

      Mea Culpa. (la hooonnte)
      En punition je serai privé de bière jusqu'à... ce soir minuit. Bon okay, demain midi.

      Effectivement, j'avais déjà lu tout ça, mais... (avec l'âge ?) j'ai tout mélangé... Et puis, j'ai jamais osé lui poser la question directement ; avec Jimmy on parle pas trop boulot...
      Comment ? Heingue ? Ben non , j'suis pas mytho ! C'est comme la dernière fois, avec Holiday, lorsque je lui disais "Non Scott ! Ton solo comme ça. Te fais gdf*$ ! Utilises la pentatonique mineure, comme je t'ais montré, fous-y d'l'disto, un peu d'réverb, et ça passe toujours". Hummm.... comment ? je ?

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  2. "Propre" ? Pas vraiment, toutefois en comparaison de "Before the Storm", mouais.
    "Appliqué", la section rythmique effectivement. Mais c'est parce qu'elle est bonne.

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    1. Je suis dans un période The Who alors tout me parait propre à côté, ce doit être la raison !

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    2. Ha, Okay.
      Cependant, si je puis me permettre, en comparaison, avec "Head Down" (of corse), "Who Are You" c'est du Rock policé.
      Même "Who's Next" (y compris la version avec les titres avec Leslie West) me paraît bien moins dirty que ce "Head Down". Certes pas au niveau de la batterie.

      Bon, évidemment "Live At Leeds" est hors-concours, puisque c'est un Live. (sinon c'est d'la triche)

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  3. Ils sont nombreux aujourd'hui tous ces p'tits nouveaux groupes qui sonnent plus 70' que les 70' eux mêmes. Sitons The Answer, Wolfmother ou encore les bien plus obscures Witchcraft que je viens de découvrir il y a à peine quelques semaines de cela. Étrange tout de même ce "revival" depuis quelques années...
    Est-ce en réaction à la médiocrité musicale (généraliste) ambiante ? Quoi qu'il en soit, du moment que c'est de cette qualité là, je suis plus que jamais preneur.

    Quand même ! Quand je pense a ce qu'avaient pris dans les dents les Kingdom Come (il y a 25 ans de ça) sous prétexte que leur premier album transpirait le Led Zeppelin à plein nez...

    Je dis ça moi... J' dis rien.

    Vince.

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    1. Au sujet de Kingdom Come, ce qui avait surtout agacé les journalistes c'est le fait qu'un des deux gratteux disait qu'il ne connaissait Led Zep que de nom. Vu les similitudes, on avait peine à le croire, d'autant plus qu'aux USA "Stairway to Heaven" passait encore à la radio plusieurs fois par semaine.
      Le précédent groupe de Lenny Wolf, "Stone Fury", n'avait pas subi tant de foudres.
      Et puis à l'époque, on sortait à peine de la période NWOBHM, et il semble bien, avec le recul, que paradoxalement il y avait plus d'écart entre le Hard 70's (souvent appelé maintenant Classic-Rock) et la vague Heavy-Metal des 80's. Même le "Hard-FM" voulait couper les ponts avec la décennie précédente (du moins ce qui se rapporte à la période 70-76). Une incidence du Punk ?

      Il y a aussi l'importance du net. Un groupe comme Rival Sons n'aurait peut-être pas eut son mot à dire sans l'aide du net. De plus, grâce à ce support, l'influence de la presse est beaucoup moins forte. Sans leur 1ère réalisation mise en téléchargement sur leur site, il est probable que Rival Sons aurait végété encore quelques temps ;un laps de temps suffisant pour qu'au moins une partie du groupe se décourage et que la formation implose avant d'avoir pu graver quoi que se soit.

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  4. Tout cela me paraît assez fondé et pour le moins pertinent ami Bruno. Il est vrai que pour ce qui est des musiciens de Kingdom Come, leurs déclarations n'étaient pas faites pour arranger les choses.

    Le net a en effet bouleversé énormément de choses au sein du Music Business. On a souvent tendance à pester, nous les quadras (au moins !), dans la façon que la musique et les musiciens sont aujourd'hui traités. Mais ce que tu soulignes à propos de l'opportunité qui est désormais offerte aux artistes pour se mettre en avant, via donc le net, est aussi la preuve qu'en toute chose il y a toujours du bon. Les musiciens sont peut être aujourd'hui plus maître du jeu (le leur) et de le carrière que lorsqu'ils étaient contraint, liés, spoliés par leur Major Company respective.

    Gros débat.

    @ +

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  5. Ta petite chronique m'a convaincu, je vais aller jeter une oreille sur ces groupes "seventies",ayant jusqu'a présent jeté mon dévolu sur les groupe US tendance southern -rock seventies, tels Blackberry Smoke , Whiskey Myers et autre American Minor.
    Que vaut "The Answer"?
    PS: j'écoute en boucle l'opus de"Royal Southern Brotherhood", (Devon Allman, Mike Zito, Aaron Neville) Te le conseille vivement Amicalement. JP

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    1. Ça m'a tellement convaincu que j'ai acheté le digipack.
      Gros gros kiff, en particulier pour Until The Sun Comes.
      Buchanan est un sacré bon chanteur!
      Merci pour la reco ( encore une...)!

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