Les frères Gurvitz (Paul et Adrian), qui se rebaptisent Curtis (sous les conseils de leur père dans une optique commerciale), bien que très jeunes, possèdent déjà une expérience des salles de concert anglaises. Issus du freakbeat, via The Knack et Rupert's People(1), (Adrian aurait même joué pour Screamin' Lord Sutch) ils décident en 1967 de former leur propre groupe. Ils embauchent Louis Farrell à la batterie (qui jouait déjà avec Paul au sein de The Knack), et fonde un power trio du nom de GUN. Jon Anderson (Yes) y fit un bref passage.
1968 : leur premier opus sort dans les bacs. L'enregistrement, le placement des instruments et des arrangements donnent la sensation d'un album terriblement en avance sur son temps. L'ombre du Heavy-rock plane sur l'ensemble, dont les ingrédients nécessaires au genre (ou aux stéréotypes, c'est selon) sont déjà présents et en place. Le son de la guitare, entre fuzz Big-Muff et Overdrive crémeuse, une basse lourde et offensive, et une batterie qui fait le lien entre l'aisance d'un batteur de jazz, la pulsation du blues urbain et la frappe d'un bûcheron.
L'opus démarre sur des chapeaux de roues. Une introduction de chœurs à la Uriah-Heep (soit avant l'heure) soutenue par force cuivres et cordes, qui intronisent un riff de guitare, épaissi par une fuzz grasse, qui aurait pu être le début d'un solo de Ritchie Blackmore, une rythmique en cavalcade, des rires démoniaques, un solo effréné et nerveux. Un boogie-rock ramassé gothique, qui préfigure un des archétypes du Hard-Rock enlevé et soutenu, jusque dans la forme du solo. C'est le désormais classique « Race with the Devil » (qui n'a strictement aucun rapport avec celui de Gene Vincent). Un hit sorti de nulle part qui culminera à la 8ème place des charts anglais, et qui marquera définitivement les esprits, au point que l'on passera le titre sur les ondes jusque dans les 80's (même en France, via Wango-Tango de Zegut).
Hélas, nombreux sont ceux qui ont focalisé (non sans raison) sur cette chanson, alors que l'album entier recèle des trésors de Heavy-rock originaux, qui s' agrémentent de senteurs Pop, symphoniques ou psychédéliques.
D'entrée, on est surpris par une approche sonique aussi moderne, et de si bonne qualité. Bien que très jeune, Adrian Curtis maîtrise parfaitement sa guitare, avec un jeu d'une fluidité exemplaire, où l'on sent parfois l'influence d'Hendrix sur certains soli, et de Clapton (ce sera parfois plus probant pour la suite dans sa carrière) mais aussi de la musique classique, voir hispanique (il débuta l'instrument à huit ans et étudia à la Royal Academy of Music). Un son de Gibson LesPaul qui déborde de Fuzz massive et incandescente, relativement grave, chaleureuse.
Une basse vrombissante et alerte de Paul Gurvitz - qui a été guitariste-chanteur depuis 1963, jusqu'à ce que son frère le rejoigne pour former ce groupe -, et une batterie parfaitement collée à la mesure, évitant tout débordement inutile.
Trop souvent comparé, à tort, à Cream, (même si en tant que groupe Anglais, il n'ont pu échapper à l'influence du mythique trio), alors que la particularité première de Gun était de mélanger avec bonheur des orchestrations symphoniques (mais pas exclusivement) avec un la force d'un power-trio. Ils avaient déjà brisé le carcan du Blues (du British-Blues) pour accéder à de nouvelles contrées. Certes « Yellow Cab Man » peut rappeler Cream, mais cela s'arrête là. Le reste est un voyage dans un univers musical où se marient orchestre symphonique endiablé, lyrisme Pop à la Beatles et/ou Yardbirds, quelques réminiscences psychédéliques, Rock Progressif (avant l'heure) et Hard-Rock. Un style difficilement classable.
Déjà, par exemple, il a été écrit qu'un titre comme « The sad saga of the Boy & the Bee », avec moult violons, chœurs extatiques, envolé de chorus de guitare, et final entièrement symphonique, annonçait le Rock Progressif. Tandis que « Rat Race » préfigure Uriah Heep.
Et que dire de l' instrumental revigorant, « Ruppert's Travel » qui est assis sur une guitare hispanisante, flirtant avec le flamenco. Et ce « Sunshine », au parfum Beatles, qui aurait pu faire partie de la comédie musicale « Hair » avec une guitare qui, lorsqu'elle se manifeste, sonne foncièrement Heavy (pratiquement pré-Leslie West).
On émettra tout de même quelques réserves sur « Take Off », pur free-jam de Heavy-rock-psyché joué par une bande d'aliénés en pleine crise de délire, dont les dix minutes sont un peu dures à digérer.
La superbe pochette est de Roger Dean, connu, est-il besoin de le rappeler, pour son travail pour Yes, Uriah-Heep, Budgie, Osibisa, Badger, etc... et non, injustement et étonnamment, pas pour le film Avatar. Probablement son premier travail pour une pochette de disque.
P.S. : « Race with the Devil » fut repris par Girlschool (sur Demolition), Black Oak Arkansas (Race With the Devil) et Judas Priest (Sin After Sin).
Et que dire de l' instrumental revigorant, « Ruppert's Travel » qui est assis sur une guitare hispanisante, flirtant avec le flamenco. Et ce « Sunshine », au parfum Beatles, qui aurait pu faire partie de la comédie musicale « Hair » avec une guitare qui, lorsqu'elle se manifeste, sonne foncièrement Heavy (pratiquement pré-Leslie West).
On émettra tout de même quelques réserves sur « Take Off », pur free-jam de Heavy-rock-psyché joué par une bande d'aliénés en pleine crise de délire, dont les dix minutes sont un peu dures à digérer.
La superbe pochette est de Roger Dean, connu, est-il besoin de le rappeler, pour son travail pour Yes, Uriah-Heep, Budgie, Osibisa, Badger, etc... et non, injustement et étonnamment, pas pour le film Avatar. Probablement son premier travail pour une pochette de disque.
P.S. : « Race with the Devil » fut repris par Girlschool (sur Demolition), Black Oak Arkansas (Race With the Devil) et Judas Priest (Sin After Sin).
Le suivant, « Gunsight » (1969), bien que comportant encore quelques belles pièces - dont « Drown Yourself in the River » repris par Vince Converse (⏪ lien) - ne réitère pas la magie ni la fraîcheur du premier. Certains titres sont quelque peu foutraques, les orchestrations ont été supprimées, on retrouve très parcimonieusement quelques plans de guitare espagnole qui ensoleillent quelques mouvements. Mais finalement, l'ensemble donne l'arrière goût d'une démo de luxe plutôt qu'un album travaillé et abouti. Même le mixage manque parfois d'équilibre. Pourtant Gunsight a ses (h)ardants défenseurs.
The Gun est souvent considéré comme un des précurseurs du Heavy-rock, et, plus rarement, du Rock Progressif, notamment par le mélange des genres.
Adrian Gurvitz partira rejoindre le Buddy Miles Express avant de retrouver son frère pour monter un nouveau trio sous le patronyme Three Man Army (là c'est sans conteste plus sincèrement Heavy-rock).
Adrian prouvait déjà, avec ses deux premiers opus, que son bagage était large et qu'il pouvait s'attaquer à différents genres sans heurts. On le verra d'ailleurs, tout au long de sa carrière, se frotter à tous les genres de la musique populaire américaine; du Heavy-rock, au Funk, en passant par le Jazz-rock, le progressif, la disco et le sirupeux. Ces deux derniers genres lui vaudront la reconnaissance du « grand public » américain (notamment avec le hit "Classic"). Il écrira également pour d'autres.
Adrian prouvait déjà, avec ses deux premiers opus, que son bagage était large et qu'il pouvait s'attaquer à différents genres sans heurts. On le verra d'ailleurs, tout au long de sa carrière, se frotter à tous les genres de la musique populaire américaine; du Heavy-rock, au Funk, en passant par le Jazz-rock, le progressif, la disco et le sirupeux. Ces deux derniers genres lui vaudront la reconnaissance du « grand public » américain (notamment avec le hit "Classic"). Il écrira également pour d'autres.
(1) source Hard'n'Heavy 1966-1978, de Jean-Sylvain Cabot et Philippe Robert
J'aime bien également la reprise de race with the devil par Black Oak Arkansas.
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