Est-il besoin de présenter le bonhomme ? Quelques repères chronologiques devraient suffire, sinon je vous en colle l’équivalent de trois bottins (on ricane pas, mon brouillon est prêt, ce n'est pas une menace en l'air !)
1935 : naissance de Elvis Aaron Presley, à Tupelo Mississippi. Pour la petite histoire, maman Presley est enceinte de jumeaux, l'ainé (Jesse Garon) était décédé à la naissance. Elvis intègre la chorale de l'église locale, et gagne sa croûte comme chauffeur de camion.
Juillet 1953 : enregistrement chez Sun Records de deux chansons pour l’anniversaire de sa mère “My happiness” et “That's when your heartache begins”. (à cette époque on enregistrait, pressait le disque dans la foulée, et le client repartait avec).
Juillet 1954 : Elvis est rappelé par Sam Philips, propriétaire de Sun Records, sur les conseils de la secrétaire... du genre : "y'a un type qui etait passé l''année dernière, y chantait bien, je dois encore avoir son adresse quelques part...". Elvis Presley, entouré par deux musiciens, Scotty Moore à la guitare et Bill Black à, la contrebasse, enregistre « That’s allright Mama ». Début de la collaboration Presley/Philips, des concerts, des tournées, des émissions de radio…
Mars 1955 : Tom Parker (surnommé « le colonel ») reprend Elvis sous contrat, et le signe chez RCA. Le phénomène Presley inonde l’Amérique.
Janvier 1958 : Elvis part au service militaire, en Allemagne.
Mars 1960 : démobilisation, retour aux affaires. Sa mère meurt entre temps. Elvis, très croyant, enregistre beaucoup de disques de gospel. Le colonel Parker incite Presley à faire du cinéma. Les films tournés (95% de navets) n’ont qu’un but : le faire connaître du monde entier via la puissance marketing hollywoodienne. Et ça marche. 27 films entre 1960 et 1969 ! Sauf qu’aucun disque digne de ce nom ne sort, à part des compilations, les BO, disques de Noël, de variétés... Mais pas une once de rock’n’roll à l’horizon. On retiendra ELVIS IS BACK (1960) contenant "Fever" et "Reconsider baby" (pour moi le plus grand morceau gravé sur vinyle !)
Mai 1967 : mariage avec Priscilla Baulieu, et naissance de Liza Marie en févier 68.
1968 : le colonel Parker négocie une émission de télé sur NBC, en exclusivité, à l’occasion des fêtes de Noël. Elvis Presley n’était plus passé à la télé depuis son retour de l’armée, avec le show de Franck Sinatra. L’émission pour NBC sera enregistrée fin juin 1968.
En 1968, Elvis Presley n’est plus le roi incontesté. Le règne n’aura duré que de 1955 à 1957. Dix ans d’absence sur scène, une croulée de disques médiocres, la vague anglaise qui arrose l’Amérique (Beatles, Stones, Cream, Flyod, Ten Years After…), de nouveaux styles musicaux (revival blues, psychédélisme, folk, prog, hard) de nouveaux héros (Hendrix, Dylan, Morrison), des mouvements sociaux et contestataires ont renversé les valeurs des années 50. Le colonel Parker est bien décidé de frapper fort (entendez par là, question audience) avec cette soirée télévisée : Passer Noël avec Elvis ! Le but était donc de faire chanter au King des chants de Noël. Mais pour la première fois de sa carrière, Presley lui tiendra tête. Soutenu en cela par Steve Binder, le réalisateur du show, il décide d'y chanter ce qu'il veut, ce qu'il aime. Il y aura les chansons de variétés, mais aussi des standards blues et rock’n’roll avec grand orchestre, ou groupe électrique, du gospel, et surtout, un set acoustique, en petit comité, où Elvis retrouve son groupe historique : Scotty Moore à la guitare et DJ Fontana aux percussions (un étui à guitare fera l’affaire). Bill Black, son contrebassiste était décédé. Lance LeGault aux tambourins, et Charly Hodge à la guitare complètent l’ensemble. Elvis au chant et à la guitare. Le groupe est installé sur une petite scène carrée, le public assis autour, pour ce qu’on appelle désormais le « Sit down show ». Il y aura deux enregistrements, live, mais seuls quelques extraits seront finalement diffusés pour le réveillon 1968.
Le « Sit down show » constitue évidemment la pièce maîtresse de cette émission, où Elvis Presley, bardé de cuir, beau comme un dieu, plus sexuel que jamais, chante, joue, improvise, rit, s’emmêle les pinceaux, oublie les paroles, repart de plus bel, mêlant ses classiques et des standards rhythm’n’blues. Il incarne à lui seul l’esprit Rock’n’roll, animal, viscéral, sur jouant volontiers, se moquant de lui-même, de son rictus des lèvres. Mais surtout, il nous offre une leçon, une démonstration de chant. Visiblement heureux d’être là, entouré d’amis, retrouvant enfin le répertoire qu’il aime. Il annonce au début : "nous voulions vous montrer comment on jouait, à mes débuts, comment cela sonnait...". Des titres seront d’ailleurs joués plusieurs fois, trois reprises de « Baby what you want me to do » ou de « One night ». Elvis fait feu de toutes parts, rugissant, crachant ses hymnes rock’n’roll. Frustré par les décisions autoritaires de son manager, Elvis Presley veut rattraper le temps perdu. Cela donne un show d’une intensité rare, une démonstration de force, un message lancé à la face du monde : The king is not dead !
N’oublions pas le set gospel, absolument prodigieux, Elvis est dans son élément, et il enchaine dans un medley étourdissant de 15 minutes les titres « Sometimes I Feel Like a Motherless Child / Where Could I go But To The Lord / Up Above My Head / Saved »…
Ce show est disponible dans de multiples éditions, la plus complète de 2008 qui comprend 4 CD, avec bien sûr des redites. Le « Sit down show » a été enregistré en mono, le son n’est pas exceptionnel (dans la version double CD que je possède) mais on s’en tape totalement. Enfin, une édition DVD de trois disques, propose l’intégral de tout ce qui avait été enregistré en juin 68, soit 7 heures de programme, avec prises alternatives à gogo.
L’émission est un succès immense, et relance la carrière de Presley, qui reprend l’enregistrement de disques, comme FROM ELVIS IN MEMPHIS (1969) repart en tournée, résolu à faire revivre son répertoire 50’s sur scène, ses nouveaux titres, et les reprises de tubes de Creedence, ou des Beatles. En juillet 1969, il se produit à L’International de Las Vegas, deux concerts par jour pendant un mois. On connaît la suite… tournées incessantes, fatigue, dopage, excès (nourriture, boisson, médoc), jusqu’au jour funeste du 16 août 1977…
Deux classiques captés au Sit down show, avec "One night" (quand je dis qu'il rugit, ce n'est pas qu'une expression...) et la plus grande de toutes, le Graal des Graal, le saint des saints, la crème de la crème, la cerise on the cake, le JL sur le Rockin' "Heartbreak hotel". Visez-moi ce départ tonitruant...
Si une délégation de Mars, Vénus, ou Jupiter venait par chez nous et demandait une définition du mot rock'n'roll (après les échanges de politesse d'usage entre deux peuples amis), plutôt qu'un long discours théorique, il suffirait de leur montrer ça ! Les mecs ne remonteraient pas dans leurs soucoupes, mais demanderaient l'asile politique sur Terre ! Quand il s'assoie, on l'entend dire "my fifteen minutes"... allusion aux fameuses 15 minutes de célébrité auquel chacun aura droit, selon Andy Wahrol. Si ce n'était que 15 minutes...
Elvis Presley, Elvis Presley ... ça me dit quelque chose ...
RépondreSupprimerAh, j'y suis ... le beau-père à Michael Jackson ... Là, pour le NBC show, il avait piqué les fringues à Gene Vincent ...
Cet épisode (le coup du beau-fils King of pop) m'était sorti de la tête... Merci de m'avoir fait replonger en plein cauchemar ! L'ironie veut que les deux bonhommes (le gendre et beau papa) aient fini prématurément à cause de leur médecin... (le blouson : celui de Gene Vincent ou de Dick Rivers ? )
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