Après deux albums qui l’ont solidement installé au sein de la scène musicale française, Magma est en cette année 1972, à la croisée des chemins. Trois problèmes majeurs doivent être résolus. Le 1er est de trouver un « manager » professionnel. Le second, qui découle du 1er est de signer avec un nouveau label, Philips ayant jeté l’éponge. Le 3eme est d’engager de nouveaux musiciens. En effet, insatisfait de « Magma 2 » Christian Vander et ses partenaires ce sont séparés. François Cahen et Yochko Sefer sont partis créer le fabuleux groupe « Zao », Francis Moze et Claude Engel deviennent musiciens de studio, les autres feront partie de diverses formations de « pop » ou de « jazz », ou entameront des carrières solo. Des 1ers Magma seuls Vander, Blasquiz et Garber sont encore là. Teddy Lasry, bien que crédité sur « Mekanik destruktiw kommandoh ( MDK) » ne fait plus partie du groupe. Il est cité en tant qu’arrangeur des cuivres.
C’est Giorgio Gomelsky qui devient le manager du groupe. Gomelsky n’est pas un inconnu. Ce géorgien installé à Londres, a été le manager des Yardbirds et des Rolling Stones. Il était également le propriétaire du fameux « Crawdaddy », qui a vu débuter la bande à Jagger. Gomelsky est un pro. Il va vite prouver ses compétences. Concernant la maison de disques, c’est elle qui va venir à Magma. Au mariage de Michel Magne, à Hérouville, le trompettiste de jazz, Herb Alpert, fait partie des invités. Alpert a été impressionné par les 2 premiers disques de Magma. Il décide de les aider. Il est en effet le A du prestigieux label A & M. Magma signe pour un album sur le label américain. Concernant les nouveaux musiciens, Jean-Luc Manderlier, Claude Olmos, Jannick Top et Stella Vander sont recrutés. Arrêtons-nous un peu sur les deux derniers noms. Stella Vander est l’épouse de Christian et chanteuse. Elle a débuté sa carrière dans les années 60, à l’âge de 14 ans et a publié quelques disques. Pour une connaissance exhaustive de sa carrière pré-Magma, je vous conseille de lire le très bon article que lui a consacré Christian Larcheron sur son blog : « une seconde et l’éternité » : une seconde et l'eternité/ Magma
Jannick Top, lui vient de Marseille ou il a fait le conservatoire (piano, violoncelle direction d’orchestre). « Monté » à Paris il fait quelques séances de studio, enregistre des pubs avant d’intégrer « Magma ». Avec top, Christian Vander trouve son parfait alter-ego. Les deux musiciens ont une vision identique de la musique.
« MDK » qui est le 3eme mouvement d’une trilogie appelée « Theusz Hamtaak », a été le 1er des trois mouvements à être joué sur scène. Les deux autres seront développés et enregistrés ultérieurement », explique Vander. Pour lui « Magma » est né avec « MDK » ; les deux albums précédents étant de la décantation.
Le disque est enregistré en Angleterre, au « Manor Studio », sous la houlette de l’ingénieur maison, Simon Heyworth. Durant l’enregistrement Un évènement, qui se révèlera d’une grande importance pour la suite, survient. Christian Vander raconte : « C’est une triste histoire à raconter, mais les choses doivent être dites. Un certain Mike Oldfield a volé ma musique et plus précisément des extraits de « Mëkanik » et de « La Dawotsin ». Quand nous avons enregistré « Mëkanik Kommandoh », lui se préparait à enregistrer « Tubular Bells », qui est en fait un extrait de ma musique. C’est un thème que j’ai joué devant lui, sans même pouvoir imaginer qu’il aurait le culot de la reprendre et de se l’attribuer. Quand je suis allé voir « l’Exorciste », tel l’idiot du village, j’ai trouvé que la musique était fantastique. Forcément puisque c’était ce que j’étais en train de faire. Je n’ai pas fait la relation tout de suite. Jusqu’au jour où on m’a rappelé que Mike Oldfield était présent dans le studio quand on a enregistré « Mëkanik Kommandoh ». Il n’a jamais rien refait dans cet esprit d’ailleurs. Quant à moi je ne pouvais plus jouer ma musique sans risquer d’être accusé de plagiat. Ça devenait complétement fou. J’avais composé à l’époque la suite de « Mëkanik Kommandoh », mais je me suis senti freiné et j’ai dû partir dans une autre direction harmonique. La seule chose positive, c’est que ça m’a permis d’aller plus vite. J’ai dit : « bon, à partir de maintenant il n’y a plus rien qui doit ressembler à « Mëkanik Kommandoh » ! Donc je suis passé à « Köhntarkosz »
Plagiat ou pas chacun pourra se faire son opinion en écoutant des extraits de « Tubular Bells » et de « La Dawodsin » . En attendant cet évènement est d’importance parce qu’il a obligé Christian Vander à partir dans une autre direction musicale et que , de ce fait, le destin du groupe en a été bouleversé.
Lorsque l’album sort, on sent que c’est une affaire sérieuse. Ce avant même d’en avoir écouté la moindre note. Enregistré en Angleterre, publié sur un label prestigieux, A et M, Magma vise à l’international, après seulement trois albums. Et quand on connait la frilosité des français vis-à-vis de l’international, l’évènement n’est pas anodin.
« MDK » est une longue suite répétitive ou les chœurs féminins sont omniprésents. A l'entame du disque Christian Vander hurle un long récit d'introduction puis les cuivres, magnifiques, interviennent donnant à la musique une force peu commune. La formation évolue en rangs serrés, comme un pack de rugby. La puissance du groupe est phénoménale, tout en retenue. Contrairement aux albums précédents, Magma semble se retenir, laisse monter l'énergie qui se déploie peu à peu. Puis, la musique s'accélère en un maelstrom de notes venues du tréfonds de l'âme. On a l'impression d'assister à un rite d'exorcisme, on se sent un peu menacé par cette musique jamais entendue auparavant. « MDK » peut paraitre répétitif. Les morceaux peuvent paraitre similaires. Trop emphatiques. Bref, si on écoute le disque d'une oreille distraite « MDK » peut vite devenir ennuyeux. Ce serait oublier que la musique de Magma s'adresse d'abord à l'esprit de l'auditeur et qu'il faut du temps pour l'apprivoiser. « MDK » est un voyage initiatique. Soit on l'accepte, soit on le rejette. Pas de demi-mesure. En attendant « MDK »va asseoir définitivement la réputation de Magma, jusqu’à la lointaine Amérique ou le groupe sera invité à jouer. Pour beaucoup, « MDK » constitue le magnum opus de Magma. Surtout sur scène ou le groupe de Christian Vander déploie une énergie monstrueuse. Il faut avoir vu Magma interpréter au moins une fois « MDK » pour se rendre compte ce que talent veut dire. Avec « MDK » Magma s’installe comme étant l’un des plus grands groupes du monde, l’un des plus passionnants.
Plus. L’esprit musical défendu par Vander commence à générer des groupes tels qu’Univers Zéro, Eskaton, Art Zoyd ou encore Présent. La musique « Zeuhl » prend son envol. Cependant, personne ne le sait encore, mais avec « MDK » Magma n'a pas atteint son zénith. L’album qui suivra : « Kohntarkosz » sera encore plus passionnant que « MDK »
Personnel :
Christian Vander : batterie, chant, orgue, percussions
Klaus Blasquiz : chant, percussions
Jannick Top : basse
Jean-Luc Manderlier : claviers
René Garber : clarinette basse, chant
Claude Olmos : guitare
Stella Vander : chant
Muriel Streisfield : chant
Evelyne Razymovski : chant
Michèle Saulnier : chant
Doris Reinhardt : chant
Teddy Lasry : cuivres , flûte
La seconde vidéo est le thème de "Tubular Bells" et la 3ème, un film avec la musique de "La Dawodsin", c'est plus que troublant.
Oui, super article qui donne envie d'en savoir plus même à ceux qui connaissent déjà...On en apprend toujours. Merci.
RépondreSupprimerJe connaissais pas l'anecdote avec Oldfield, assez édifiant! Si l'original est de Vander, c'est très beau.
RépondreSupprimerBonne présentation de cette œuvre culte qui donnera envie à beaucoup j’en suis sûr de la découvrir. J’ajoute mon petit grain de sel à propos de la qualité de l’enregistrement en rappelant qu’elle n’est pas fameuse, comme le reconnait d’ailleurs Vander lui-même. Si je me souviens bien il ne disposait que d’un quatre pistes pour un enregistrement devant gérer un trop grand nombre d’instruments et de chants différents, ce qui a donné au final un son compressé et écrasé, très faible en dynamique. Du coup, l’idéal est surement d’écouter la version de Mekanik présente dans le live "Retrospektiw 1&2" de 1981. Là le son est parfait et en plus, la composition a reçu un "lifting" qui la rend plus homogène et fluide. Les voix sont magnifiques (et pas fatigantes comme sur la version studio pour les raisons évoquées plus haut).
RépondreSupprimerA propos de l’affaire "Tubular Bells VS La Dawodsin", Vander s’en est expliqué souvent. Pour moi la ressemblance n’est pas forcément évidente mais l’histoire doit être vraie, il n’y a pas de raisons de mettre en doute la parole de Vander.
Alain, j’en profite pour te dire que j’ai bien lu ton message me concernant dans ta page Amazon via les commentaires sur le disque U RiGIRU ("...pour répondre à christian larcheron du blog Une seconde, et l'éternité",..." etc, etc) mais je te signale que je n’ai pas pu y répondre et que je ne pourrai d’ailleurs plus jamais y répondre car les responsables de ce site consternant et médiocre m’ont coupé définitivement la chique ! En effet j’ai été banni à jamais des discussions entre commentateurs pour de fausses raisons totalement arbitraires, comme beaucoup d’autres personnes d’ailleurs ces derniers mois. Vu que je n’y écrivais déjà plus de chroniques, voilà donc un site qui ne me sert plus à rien et que je ne regrette pas d’avoir quitté. Mais donc je t’informe : je ne pourrai plus te laisser de commentaires sur tes chroniques amazoniennes, et si nous voulons dialoguer, cela ne pourra se faire qu’ici (ou sur mon blog, bien entendu, terre de liberté). Et aux chiottes l’asile Amazon !
Salut Christian,
RépondreSupprimerContent d'avoir de tes nouvelles. Effectivement j'avais remarqué ton absence, mais je ne savais pas qu'on t'avais censuré. C'est consternant.
Pour MDK je trouve le son de la réédition de 2009 assez bon, mais tu as raison c'est sur "retospektiw" qu'il faut écouter cette oeuvre
a bientôt et porte toi bien
C.S
ATTENTION MESSIEURS DAMES, INFO DE DERNIÈRE MINUTE, SOURCE DE CHRISTIAN VANDER LUI-MÊME VIA UNE "ALERTE MAIL" (y suis abonné, désolé) :
RépondreSupprimer"JOHN COLTRANE L'HOMME SUPRÊME...
Le 17 Juillet 1967, le temps s’est arrêté.
A l’âge de 40 ans, le grand saxophoniste John Coltrane nous a quitté. J’ai eu la chance de découvrir très jeune ce musicien exceptionnel. La beauté, la spiritualité, la force, la douceur, et aussi la fragilité de ses notes…L’expression de ce son envoûtant qui me parlait comme une voix. Dès ce moment, il est devenu mon pain quotidien. Indispensable.
Nul ne peut ignorer l’immensité de son œuvre visionnaire. Elle résonne encore sur toutes les musiques d’aujourd’hui et certainement de demain.
En 1997, j’ai fait un rêve, un disque dédié à John Coltrane… Un enfant peignait sur un carton blanc un soleil, et sous le soleil, il écrivait un titre en bleu. « John Coltrane l’homme suprême » … Ce disque a été enregistré jour après jour, du 17 Juillet, date de son départ, au 21 Juillet, jour de ses funérailles. Chaque jour, une offrande, un don musical, poétique, pour lui, réalisé en temps réel. Le 21 à minuit, le disque était terminé.
DISPONIBLE EN LIGNE LE 15 OCTOBRE ET LE 27 OCTOBRE CHEZ VOTRE DISQUAIRE..."
J'ai vu la pochette, sublime. Va falloir encore violenter le porte-monnaie. Il était au courant de la nouvelle, le Selmogue ?
Heu... Photo de la pochette en ligne sur mon blog, pour ceux que ça intéresse...
RépondreSupprimerMERCI Christian pour cette info de 1ere main. Le 27 octobre tu dis? on sera là ou il faut ce jour là.
RépondreSupprimerEt non il était pas au courant de celle là le selmogue, mais tu triches, t'es abonné!!!!!!!!!!!!!!!!
a+
christian s
Splendide photo d'un soleil resplendissant. Question, c'est du vander ou du jazz coltranien, ce disque?
RépondreSupprimermerci
c.s
Pas plus d'infos pour le moment. A mon avis le disque pourrait bien ressembler dans sa forme à celui que Vander a enregistré fin 1988 en mémoire de son ami disparu Jean Paul Fenneteau (combattant comme lui pour la "Zeuhl Wortz"): ce magnifique album "To love" où Vander prouve à ceux qui en doutaient encore l'incroyable et stupéfiant chanteur qu'il est (particulièrement dans les plus beaux morceaux dont "To love " et "You glory the one" : voix extrêmement PUISSANTE et aérienne, totalement impressionnante !)
RépondreSupprimerCe disque d’hommage à venir pourrait donc être "du Vander", mais un Vander cherchant à retranscrire par la grâce de sa seule voix et de son piano la SUBSTANCE de la musique de Coltrane (ce qui pourrait décontenancer ceux qui s'attendent à des enregistrements purement jazz...)