JOHNNY HALLYDAY "Jamais seul" (2011) par Christian Selmogue

J.H.

Johnny Hallyday. L’un des plus grands artistes du 20eme siècle. 50 ans de carrière. Capable du meilleur comme du pire.
Le meilleur est loin, depuis un bon bout de temps. Le pire est notre lot habituel. Des tonnes de disques ni fait ni à faire, bâclés, surproduits, caricatures du rock américain. Quelques rares bonnes chansons de temps en temps. Maigre . Mais voilà 50 ans de carrière au top. Qui dit mieux, du moins en France ? Inexplicable ce succès quand on voit la médiocrité du matériel proposé. 
Alors. Alors quoi ? Johnny possède un truc qui fascine même ses plus irréductibles critiques. Ce truc ça s’appelle le charisme, la présence, la force , l’invincibilité en somme. Normal que ça en énerve plus d’un. Invincible, Johnny s’est toujours senti invincible. Un roc.
Alors lorsqu’une banale intervention chirurgicale a des conséquences qui tournent mal, lorsqu’il se retrouve cloué au lit, mis en coma artificiel, quasiment donné pour mort, à 8000 km de chez lui, quand il voit défiler ses « potes » avec leurs tronches d’hypocrites et déclarent que le « vieux » est, au moins, bon pour la retraite, il voit rouge, Johnny quand il se réveille .
Quand il (re) prend conscience, que tous ses « amis » sont là afin de mieux l’enterrer, les rats ! Allez pas chercher plus loin pourquoi il les a tous virés ses amis de 30 ans. Seule Laeticia a conservé sa confiance. « Réveille toi, Johnny » qu’il a râlé le Camus. C’est précisément parce qu’il s’est réveillé qu’il l’a mis hors course le Camus. Pensez donc Johnny lui demandait des sous et de lui organiser une tournée et quelques « Stade de France ». Quel inconscient ce Johnny. Même pas capable de se rendre compte qu’il était fini. Camus lui a dit : « Johnny c’est fini tout ça ». Laeticia a répondu : « dehors ». Pareil pour les autres, du balai. 

Ouais, il s’est réveillé le Johnny. La meilleure chose qui pouvait lui arriver. Prendre conscience que depuis des décennies le show biz parisien le saigne à blanc, tous ces bons amis ! Tu parles avec le fric qu’il leur a fait gagner. Et le voilà qu’il se fâche en plus. Tout ça de la faute à Laeticia. Celle là pour qui elle se prend ? Une autre Yoko Ono ? Elle perd rien pour attendre Laeticia. Les parasites l’attendent au tournant. S’en sortira pas comme ça. De quoi elle se mêle ? Depuis quand une « morue » s’occupe des affaires des hommes ? Sûrs et certains qu’ils étaient que Johnny serait incapable de se débrouiller sans eux. Que son disque il le ferait jamais , ou que s’il y parvenait ce serait, au mieux, pathétique. Mathieu Chédid ou pas.
Sauf que le disque il l’a fait. Sauf que ce disque est son meilleur depuis « Flagrant Délit », depuis 40 ans. Sauf que ce disque est, peut être même son meilleur. Pourtant il a failli ne jamais voir le jour, le disque. Parce qu’à sa sortie de l’hosto, Johnny était lessivé. Un corps qui fait grève, une terrible dépression et la voix qui a fichu le camp. Des mois pour s’en remettre . Jour après jour. Patiemment. C’est Laeticia, encore elle qui a eu l’idée de Mathieu Chedid. Et ce dernier a fait bosser Johnny comme jamais il ne l’avait fait. Johnny a expliqué que, jusqu’à maintenant , lorsqu’ il préparait un nouvel album, on lui proposait des chansons et il faisait son choix. Posait sa voix et basta emballez c’est pesé. Le résultat était toujours le même, un disque insipide, sans âme ni envie sur lequel le chanteur ne s’investissait pas beaucoup. Faut dire que le studio, Johnny il s’en fout. Son truc c’est la scène. Il ne vit que pour ça. Et là tout le monde est d’accord, il est l’un des plus grands « showman » de tous les temps.

C’est à st Barthélémy que le disque a été préparé. Loin du boucan parisien, loin des bons amis, loin du qu’en dira-t-on. Johnny et Mathieu, face à face (çi dessus); guitares en main, construisant les chansons en duo. Du solide ces chansons. L’enregistrement a eu lieu à Los Angeles , en petit comité. Chant, basse, batterie, guitare. C’est tout. On a laissé l’artillerie lourde à paris et on a bien fait.
Le disque débute par la chanson « Paul et Mick ». un rock blues carré , dru , qui annonce les chansons à venir. Pas de chichis, pas d’arrangements symphoniques ni de grosses guitares empilées. Ça continue avec « Guitar Hero », un hommage à Hendrix . Johnny se souvient de Joe. Le grand morceau du disque est « Tanagra » . une chanson tout droit sortie de chez Led Zep, mon copain Yann, lui, me dit que ce serait plutôt de chez  Cream . Bref, « Tanagra » avec son intro monstrueuse et ses solos de guitares est la meilleure chanson du disque, l’une des toutes meilleures jamais enregistrée par Johnny. Et puis ils y a aussi les solos de Mathieu, courts, pleins d’énergie et de feeling, arrivant toujours au bon moment. Ce gars est un grand. Ce qu’on remarque aussi c’est la durée des chansons. Ça oscille entre 2.20mn et 4mn. Ramassées, efficaces elles tapent juste. L’album se termine par « Jade Dort », une berceuse dédiée à sa fille Jade. Enfin on a droit à une chanson cachée, « Jalousie », pas vraiment indispensable, mais bon.
On l’aura compris « Jamais Seul » est un très grand disque . j’ai écrit plus haut que c’était, peut- être , le meilleur de Johnny. Le chanteur ne voulait pas tirer sa révérence sur un échec. Il a magistralement réussi son retour. Chapeau l’artiste.

Personnel :
Johnny Hallyday : chant
Mathieu Chedid : guitares, chœurs
Maxim Nucci : basse, chœurs
Vincent Polycarpe : batterie, percussions
10 titres - 47’17 ‘’

  Tanagra :