vendredi 29 octobre 2010

ROBERT PLANT EN CONCERT, par Luc B.

BAND OF JOY, Paris, palais des Sports, 24/10/10



Le palais des Sports de Paris était plein pour écouter Robert Plant et son Band of Joy. Je ne parlerais pas d’ovation, mais d’un chaleureux accueil, lorsque les cinq musiciens entrent en scène, à 21h15. Plant ne se présente pas en premier, ni après les autres. Le groupe fait corps. Plant domine par sa stature (1,85m), avec ses éternels cheveux blonds, longs, bouclés. Tiags grises, jean clair et chemise mauve délavée. Il attaque direct. Soulagement immédiat : la voix est là, reconnaissable entre mille, posée, juste, sans maniérisme. L’homme affiche une décontraction, une humilité quasi monacale. Une simplicité aussi, dans ses rapports avec le public. Il parle, plaisante, explique, en anglais, mais aussi en français (« merci les potes » !), s’exclamant à plusieurs reprises « sacrebleu » ! Il pourrait se la jouer, le Robert, et honnêtement, qui lui en voudrait. Mais non. Lorsqu’au bout d’une demi-heure il présente ceux qui l’accompagnent, il se met en retrait, à gauche de la batterie, harmonica au bec, pour laisser Buddy Miller (guitare électrique, qui avait piqué les cheveux gris et le chapeau de Peter Green) chanter un titre. Il fera de même pour Darrell Scott (guitare, banjo, mandoline, pedal steel, extraordinaire musicien, imposant) et pour Patty Griffin (chant, guitare). Pendant 10 minutes, la vedette était donc reléguée en simple accompagnateur. Duo improbable avec Griffin, toute menue, brune, petite robe noire pailletée, et qui arrive péniblement à 1,52m (talons de bottes de 15 cm compris).

Les titres de son dernier album représentaient le plus gros du show, « Angel dance », le ténébreux « Silver Rider », ou encore « Monkey » sur laquelle Buddy Miller bidouillait je ne sais quel boitier de distorsion. Ce même Miller qui je crois n’a pas joué un seul titre avec la même guitare ! Le son était très travaillé (comme sur l’album) parfaitement rendu par l’acoustique irréprochable des lieux. Les versions présentées étaient assez conformes aux créations studios, à l’exception (et c’est tant mieux) de « You can’t buy my love », plus pêchue, avec deux chorus en plus. Après la pause, Robert Plant ré attaquera avec la très belle « Harm’s swift way ». D’autres titres venaient d’un répertoire folk-country, voire gospel. Mais sans que cela fasse réunion de vieux baba autour du feu de camp. Je crois que le duo Byron House (basse, contrebasse) Marco Giovino (batterie) ont joué chez Massive Attack et Portishead. Giovino jouait le plus souvent avec des maillets ou des sticks, et beaucoup de percussions. Les titres ne s’éternisaient pas, on était loin des envolées psychédéliques du Band of Joy version 1968.


Darell Scott.

Evidemment, ce que le public attendait aussi, c’était le répertoire de Led Zeppelin. D’abord « Misty mountain top » (une de mes préférées, tirée du IV) et qui valut au chanteur une ovation. Le public se lève et converge vers la scène. Ce qui fera dire à Plant, ironiquement : « Jusqu’à présent, il n’y avait qu’une japonaise debout, devant moi, et maintenant, y’a 300 français… vous faisiez quoi pendant les trois premières chansons ? ». C’était presque gênant. Voilà un type qui reforme un groupe, ne va pas au plus facile (McCartney fait des beatles son fond de commerce, Plant pourrait faire pareil avec Led Zep), et le public semble lui dire, tes nouvelles chansons on s’en fout ! Sauf que même pour les reprises, Plant prend le contre-pied. L’instrumentation de « Misty mountain Top » était quasiment méconnaissable, seule la scansion des couplets a été conservée. Il l’a présentée avec (me semble-t-il) un brin de nostalgie dans la voix, disant que cela venait d’une époque ni pire ni meilleure, mais… différente. Il y a eu aussi « Gallow’s pole » et « Tangerine » tirées du troisième album du Dirigeable, chansons d’inspiration folk qui s’accordaient parfaitement avec l’ambiance de la soirée. Là encore, saluées comme il se doit. Mais rien en comparaison de l’accueil dantesque fait à « Rock’n’roll », dans une version assez fidèle à l’original, seul morceau où Plant a forcé la voix, retrouvant les accents d’antan. Sauf les « Ouh yé, ouh yé » qui venaient de la salle. Il a en encore sous le pied, le bougre, sacrebleu ! Et le célébrissime gimmick de batterie qui ouvre le titre était joué… à la fin !


(Robert Plant, aujourd'hui... la classe tout de même, non ? )

C’était bon, mais ce fut court… Vraiment trop court, limite frustrant. A bout d’une heure et quart, une petite pause. Robert Plant revient, une Pelfort brune à la main, et envoie donc « Harm’s swift » et « Rock’n’roll » puis le groupe interprète a cappella un air gospel qui portait bien son nom : « Good night ». Fin des hostilités. Merci, boanne souarée, bye bye. Durée du concert : 1h25.



On retiendra donc un show sans doute trop huilé, sans réelle surprise (j'attendais surtout quelques reprises roots, rockabilly, soul, blues...) mais un groupe de vieux briscards sacrément doué, pro, un peu trop sérieux. Robert Plant, lui, semblait le plus décontracté, heureux, souriant, avec comme on dit de beaux restes. Un déhanchement quand il faut, le pied de micro jeté d’un pied, rattrapé de l’autre, se concentrant sur ce qu’il sait faire de mieux : chanter. Il en impose. Quand on a à 12 mètres devant soi LE Robert Plant, ben, ça le fait !


"Satan your kingdom must come down". Les vidéos disponibles sont toutes issues de prises pirates de mauvaise qualité. Celle-ci fait exception. Et donne une idée assez juste de l'ambiance musicale du spectacle 2010.


La première partie était assurée par le britannique Justin Adams (qui jouait au côté de Robert Plant sur "Mighty ReArranger» en 2005) et du griot gambien Juldeh Camara. Ou la rencontre de la guitare punk-blues de Adams, et du ritti (violon ancestral à une corde). La claque ! Un bassiste fabuleux et un batteur les accompagnaient. Trois titres incisifs, le premier acoustique, tribal, les suivants électriques. Et puis, une intro blues, lourde, épaisse, à la John Lee Hoocker. Les poils qui se dressent. C’est Camara qui chante, en gambien. Mais ça colle. Le ritti fait office d’harmonica, et ça passe encore. Et le morceau se prolonge, s’étire, on n’en croit pas ses propres oreilles ! Ca vire au boogie, riff à la Bo Diddley, puis les musiciens prennent des percussions, et la tension ne fait que monter. Quelle claque ! En plus, Adams parle très bien français, nous a raconté plein de choses, c’est un passionné, la classe, en veston, mais on sent que la folie n’est pas loin. Ils ont reçu une véritable ovation à la fin du set. Et ils ont démonté leur matos eux-mêmes, aidés de quelques roadies de Plant pour aller plus vite ! On en reparlera ici, je crois savoir que notre ami Rockin’ apprécie les deux artistes.

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