L’anti Twilight…
Dès la première phrase : « Je viens d’années sans frontières, de villes ensevelies, de cimetières qui me parlent, de chants dont nul n’a souvenir », on sait, de manière imperceptible que l’on est en présence d’un grand auteur. Car en tant que lecteur, on possède une intuition, et celle-ci ne nous fait, en général, jamais défaut.
« La ville intemporelle ou le vampire de Barcelone » est un roman absolument remarquable. Je n’ai, à ce jour, pas lu de livres dont la composition narrative était similaire. Un chapitre est consacré au vampire de Barcelone, à sa vie et son errance sur plusieurs siècles, à ses rencontres avec des mortels célèbres ou inconnus (de sa naissance dans un lupanar au Moyen Age à nos jours) et aux évolutions qu’il voit s’opérer dans sa ville, qu’il ne quitte que très rarement. Un autre chapitre est consacré à l’enquête que mène la jeune archéologue-historienne Marta Vives, sur le mystère de ses origines familiales et le secret qui la lie à la famille Masdeu.
Francisco Gonzalez Ledesma rend hommage à la ville de Barcelone, sa ville, c’est sans doute la raison pour laquelle il a choisit la figure énigmatique du vampire. L’immortalité de son personnage en fait le témoin vivant de différentes époques, endossant différentes identités et exerçant différentes professions. Ici, on est assez éloigné du vampire traditionnel des romans gothiques tels que « Dracula » de Bram Stocker ou « Carmilla » de Sheridan Le Fanu et à une bonne année lumière des vampires gentillets et lisses de la saga « Twilight » ! Le vampire de Ledesma est asexué, il tue plus pour survivre que par plaisir , il n’a pas besoin d’une grande quantité de sang pour exister, il peut se nourrir, il ne craint pas la lumière du jour, il est charitable car il lui arrive de tuer pour épargner des souffrances à autrui, il est capable d’aimer de manière désintéressée, ce qui le rend très humain, alors qu’il dit souvent être une créature vouée au Mal.
L’écriture est fluide et d’une incroyable richesse. L’auteur n’écrit pas seulement son amour pour Barcelone, il rend également hommage aux femmes, à leur courage, leur force, leur dignité, leur abnégation et leur intelligence au travers de portraits plus ou moins touchants ou bouleversants (du sacrifice de sa mère pour lui sauver la vie, à l’amour de Rita pour une enfant trisomique, ou de Claudia partisane de la liberté).
Les thèmes du Bien, du Mal, de l’Immortalité, de l’Obéissance et de la religion y sont développés avec discernement et ne nous laissent jamais indifférents. A noter, dans le chapitre 35 « La conversation », le propos développé sur le Duel que se livrent Dieu et le Diable, assez époustouflant et mémorable.
On est plongé dans l’Histoire et dans une ambiance, au sens noble du terme et on dévore les pages du roman sans jamais fléchir tant on est pris par les 2 récits qui ne vont pas manquer de se rejoindre à partir du chapitre « Les ouvriers de Dieu », dans lequel j’ai adoré la rencontre du vampire et du génial architecte Gaudi.
Bien entendu au fil des pages, on découvrira l’énigme entourant la famille de Marta, et surtout on découvre l’explication du meurtre de Guillermo Clavé, qui faisait l’ouverture du roman. La fin m’a laissé une sensation pénétrante, car Ledesma ne manque pas de lever le voile sur l’étrange père Olavide....
Pour conclure, je ne dirais qu’une seule chose : lorsqu’un auteur manie si bien la plume et l’intrigue, et qu’il arrive à nous faire passer tant d’informations et de faits historiques sans que cela nous semble indigeste, alors on ne peut que saluer son talent et s’incliner très humblement.
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