- C'est rare Claude que tu nous fasses écouter un récital instrumental.
Aujourd'hui des concertos pour basson, un instrument moins bien servi
dans ce répertoire que le piano ou le violon…
- Pas faux Sonia… La plupart du temps, il s'agit de curiosités
divertissantes que des compositeurs écrivent pour un ami virtuose du
grand-père basson de petit Pierre dans le conte musical de Prokofiev
Pierre et Loup…
- Et par ailleurs, nous allons rencontrer quatre compositeurs encore
absents de l'index… A priori, ce sont les artistes et les producteurs du
disque qui ont fait ce choix…
- En effet, Franz Berwald le suédois est assez connu, contemporain de
Beethoven, mais je n'ai jamais commenté l'une de ses symphonies pourtant
réputées…
- C'est rigolo, tant le bassoniste que le chef sont des balaises fort
dégarnis, on dirait des frangins et des gaillards à ne pas trop
taquiner…
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Bernhard Henrik Crusell |
Édouard Du Puy |
Franz Berwald |
Eduard Brendler |
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Clarinette de Heinrich Genser |
Cet album original nous vient de Finlande. Ondine est un label
imaginatif. Nous avons déjà écouté la
symphonie N°2
de
John Corigliano
gravée par ce label, une œuvre contemporaine du compositeur Yankee qui n'a
qu'un seul disque concurrent chez… Chandos.
Le programme réunit
deux concertos
de forme classique en 3 mouvements signés
Bernhard Henrik Crusell
et
Édouard Du Puy
mais également un
Konzertstück
de
Franz Berwald
et pour terminer un
Divertissement
de
Eduard Brendler.
J'avoue que je ne connais que de nom
Franz Berwald
sans en être fan et… pas du tout les trois compères qui l'entourent
! Quelques lignes pour chacun dans l'ordre d'apparition sur le disque
:
Carré de compositeurs du Nord
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| Jaakko Luoma |
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| Basson vers 1800 |
Bernhard Henrik Crusell : né en
Finlande en 1775 et mort à Stockholm en 1838 doit sa célébrité
à sa virtuosité comme clarinettiste, instrument nouveau à l'âge classique
des Lumières. Il construit son début de carrière en interprétant brillamment
les concertos de
Mozart, puis de
Weber,
Krommer,
Beethoven
et d'autres moins connus. Il bénéficia des progrès considérables apportés à
la clarinette en jouant avec des instruments du facteur
Heinrich Genser de Dresde dont celle illustrant cette page : 11
clés en laiton, une caisse en buis et des anneaux en ivoire.
Crusell
composera peu : quelques
opéras, et des pièces de chambre ou des
concertos
principalement pour les vents. La discographie n'est pas indigente, loin de
là. Il existe plusieurs albums comportant des
concertos pour clarinette, logique.
Édouard Du Puy : né en Suisse
en 1770 (comme
Beethoven) il acquiert plusieurs cordes à son arc, ou plutôt à son violon, l'un des
instruments qu'il maitrisait tout comme le piano et la voix (basse
chantante). Il est également maestro et compositeur ! Pendant la période
troublée des guerres napoléoniennes, il soutient l'Empereur, ce qui lui
vaudra d'être banni de la Suède par le roi Gustave IV Adolphe et de
partir pour Copenhague. Son interprétation de
Don Giovanni
le rend célèbre. Mais
Il y a quelque chose de pourri au Royaume du Danemark
et les embrouilles politiques conduisent
Du Puy à un nouveau
bannissement et après un passage à Paris, il est de retour en 1810 à
Stockholm (Gustave IV Adolphe ayant été déposé par un coup d'État,
Édouard est amnistié) jusqu'à sa
disparition en 1822. On lui doit onze
opéras-ballets,
opéras-comiques, etc. dont fort peu ont traversé les âges et des œuvres chambristes ou
orchestrales dont neuf
concertos
pour divers instruments. La discographie propose quelques disques dédiés à
ce répertoire instrumental.
Franz Berwald :
(1796-1868). Il est né à Stockholm. La musique de ce jour trouve des
racines nordiques indéniablement. Côté cancans, son grand-père aurait eu 25
enfants, ce qui fait de
Bach un petit joueur 😊, avec vingt naissances (bien peu ont atteint l'âge
adulte 😟). Dans la nombreuse descendance, on rencontre moult de musiciens
dont le père de
Franz,
Christian Friedrich Berwald est violoniste et donne les premières leçons à son fils à l'évidence
surdoué. Franz
occupe de 1812 à 1828 un poste de violoniste et d'altiste dans
l'orchestre de l'opéra royal. Il compose déjà. En 1829, il part
tenter sa chance comme compositeur à Berlin. Dans un Berlin musicalement
hyperactif, le suédois ne trouvera pas sa place et devient orthopédiste. Il
crée un institut d'orthopédie. Il invente des appareillage efficaces et en
1835 la société a pignon sur rue. Il faut bien se nourrir…
|
| Janne Nisonene |
Toujours obnubilé par sa vocation de compositeur,
Franz
déménage pour Vienne en 1841,
capitale européenne de la musique haut de gamme. Marié depuis peu, il doit
faire bouillir la marmite et il tente de concilier composition et
orthopédie. À Vienne, ses premières
œuvres sont remarquées et même jouées. Malgré tout, un an plus tard, en
1842 il retourne à
Stockholm pour une période de quatre
ans qu'il met à profit pour composer ses
quatre symphonies
qui de nos jours constituent le cycle le plus apprécié de son catalogue.
1846, départ pour Paris, tout en
bourlinguant entre les grandes villes européennes. L'Europe l'apprécie, il
est nommé membre honoraire du Mozarteum de Salzbourg
en 1847 ! Financièrement,
Franz
galère toujours et devient maître verrier dans le nord de la
Suède. Il continue de composer en
dilettante… Son catalogue ne comporte que 80 pièces et il faut attendre le
XXème siècle pour le voir reprendre sa place dans l'histoire de la musique.
Il meurt en 1868 à Stockholm.
Franz Berwald personnage pittoresque et pour le moins créatif…
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| Prince Oskar |
Eduard Brendler : Rendons-nous
à Dresde, où
Eduard Brendler
voit le jour en novembre 1800. Il part avec sa famille pour la Suède
en 1801. Son père flutiste réputé décide pourtant que son fils vivra
du négoce… Pourtant le garçon aime la musique et joue de la flûte avec
talent. Il devient un proche du roi Oskar et de certains membres de
la cour.
Il ne pourra composer que pendant les quatre dernières années de sa vie. Un
destin tragique l'attend, il meurt brutalement de maladie à 30 ans. Il
s'essayait à tous les genres, y compris un opéra,
Ryno, que le jeune prince Oskar de Suède achèvera.
Dans ses rares compositions, on distingue l'influence de Louis
Louis Spohr.
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Casting
Jaakko Luoma
est originaire de Lohja, ville finlandaise proche d'Helsinki. Il est né en
1973. Jeune ado de 11 ans il débute ses études de basson avec
Matti Tossavainen
puis intègre l'Académie Sibelius pour se perfectionner avec
László Hara
et
Jussi Särkkä. Ajoutons un passage à Paris auprès de
Pascal Gallois, instrumentiste de grande réputation. Diplômé en 1993, il devient
membre du
Tapiola Sinfonietta
dirigé par
Jean-Jacques Kantorow. De 1996 à 1998, il est bassoniste solo de l'Orchestre de Paris alors dirigé par
Semyon Bychkov
dont nous parlerons dans quelques temps. Il a également occupé ce pupitre de
l'orchestre de la radio de Berlin (Rundfunk-Sinfonieorchester) alors dirigé par
Christoph Eschenbach
entre 2001 et 2003.
Après ce début de parcours prestigieux, il poursuit sa carrière comme
soliste tant sur des
bassons de type français qu'allemand (Vélocité pour le mécanisme
français donc bien adapté pour les concertos virtuoses, gravité et puissance
pour son confrère germanique ce qui est appréciable dans l'orchestre) mais
aussi sur des bassons de l'époque baroque. Sa discographie est diversifiée,
de
Mozart
à
Hummel, en passant par nombre de petits maîtres tels ceux écoutés ce jour…
Wikipédia récence 70 concertos dont 38 de
Vivaldi
et sachant que ceux proposés dans notre disque n'y figurent pas
(compositeurs trop peu connus), on réalise que le répertoire est sans fin…
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Janne Nisonen
est un violoniste et chef d'orchestre finlandais. Sa date de naissance reste
très secrète ! Son âge estimé ? disons entre 40 et 50… Il a étudié le violon
dès l'âge de quatre ans. Devenu virtuose, il joue sur un Nicolo Gagliano de
1751 (prêt de la société Lähi Tapiola). Il ne s'arrête pas là et à
l'Académie Sibelius, auprès de
Hannu Linnu
et
Atso Almila, il étudie la direction d'orchestre.
Nisonen
devient premier violon solo du Tapiola Sinfonietta dont il assure la
direction depuis 2016. Il est invité à diriger des phalanges de renom telles
l'Orchestre symphonique de la radio finlandaise, l'Orchestre philharmonique de Tampere,
l'Orchestre philharmonique d'Helsinki
et l'orchestre de chambre de Brème.
Janne Nisonen
devient un spécialiste incontournable du répertoire de l'époque classique et
du début du romantisme, exemple : le programme original d'aujourd'hui. Entre
2007 et 2025, il a gravé cinq disques pour Ondine.
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Quatre concertos et pièces divertissantes
De la fin du baroque tardif au début du XVIIIème siècle jusqu'au
début du romantisme un siècle plus tard, le perfectionnement des instruments
à vent est considérable. La qualité de la fabrication, l'ajout de clés
remplaçant les perforations obstruées par les doigts et l'apparition de la
clarinette permettent une vélocité et une précision accrues du jeu des notes
naturelles ou altérées. Ces progrès techniques expliquent la profusion de
compositions pour les virtuoses.
Le disque comporte quatre ouvrages dédiés
Frans Carl Preumayr
(1782-1853), bassoniste d'origine allemande mais très présent en Suède. Il
fut également chef d'orchestre et de chœur dans l'armée allemande. Son
talent a conduit les quatre compositeurs cités à lui écrire ces concertos ou
pièces concertantes. Aucune ne justifie une analyse psychologique très
poussée, elles sont destinées à permettre à un instrumentiste de talent de
faire briller toutes les possibilités du basson.
|
| Frans Carl Preumayr |
Le
concerto
de
Bernhard Henrik Crusell, fut publié à Leipzig en 1829.
Concerto
? admettons de par sa composition en trois mouvements. Il ne répond guère
aux règles formelles du concerto, pas d'introduction symphonique très
marquée, pas de mouvement lent méditatif. Il est techniquement d'une
difficulté redoutable, la thématique est riche, opposant galanterie et
poésie. L'allegro moderato est
curieusement rythmé et impose des trilles au soliste. Le développement
exige une vélocité diabolique. La forme sonate cède la place à un
enchaînement de passages sereins ou hardis. Très inspiré
Bernhard Henrik Crusell
😊.
Le
concerto
de
Édouard Du Puy répond à une forme concerto plus classique. Ainsi, l'Adagio Non Troppo – Allegro Moderato ne se limite pas à faire briller le soliste. L'écoute de la dramatique
introduction en témoigne. Le basson dialogue plus intimement avec
l'orchestre plus complet que dans celui de
Crusell. Des trois œuvres du disque, voici la plus romantique, violente et là
encore, on n'imagine pas que l'on puisse jouer des mélodies aussi exaltées
avec un basson, soulignons les sauts de tessiture vertigineux… À connaître
et à inscrire plus souvent aux programmes de concert. L'adagio
oppose mélancolie et climat épique. Comme tout
rondo, le final déploie une
chevauchée un peu folle mais un tantinet plus banale car au discours trop
appuyé sans période de repos. Grandement amusant cependant…
Le
Konzertstück de
Berwald
et Le
Divertissement
d'Eduard Brendler sont des ouvrages fantasques et courts construits autour d'une thématique
festive et des variations.
Le tableau suivant la vidéo YouTube indique le plan des œuvres et leur
orchestration.
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Écoute au casque ou avec des enceintes additionnelles plus que conseillée. Le son des PC, sauf exception, est vraiment une injure à la musique…
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INFO : Pour les vidéos ci-dessous, sous réserve d'une écoute directement sur la page web de la chronique… la lecture a lieu en continu sans publicité 😃 Cool. |
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1774 |
Bernhard Henrik Crusell
:
Concerto pour basson en si bémol majeur
(Partition) |
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[1] Allegro Brillante
[2] Allegro modéré
[3] Polacca
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Orchestration :
2 hautbois, 2 cors, violons I & II, altos, violoncelles et
contrebasses à l'unisson. |
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1812 |
Édouard Du Puy :
Concerto pour basson en do mineur |
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[4] I. Adagio Non Troppo – Allegro Moderato
[5] II. Adagio 6h00
[6] III. Rondo – Allegretto
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Orchestration : 2 flûtes, 2 hautbois, 2 clarinettes, 2
bassons,
2 cors, 2 trompettes, 1 trombone (Rondo), timbales et cordes. |
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1827 |
Franz Berwald :
Konzertstück en fa majeur, op. 2
(Partition) |
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[7] Allegro non troppo |
Orchestration : 1 flûte, 2 hautbois, 2 bassons, 2 cors, 2
trompettes,
timbales et violons I & II, altos, violoncelles et
contrebasses à l'unisson.. |
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1828 |
Eduard Brendler :
Divertissement en si bémol majeur
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|
[8] tempo di marcia |
Orchestration : 2 flûtes, 2 clarinettes, 2 cors, timbales et
cordes. |














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