lundi 1 avril 2024

R.I.P. – série noire – le pianiste MAURIZIO POLLINI nous a quittés (1928-2024)


Pollini vers 1960

"Il y a des disparitions d'artistes qui chagrinent plus que d'autres…" Vous aurez lu cette phrase trois fois en un mois, lors de la disparition de Seiji Ozawa, puis la semaine passée, pour un autre pianiste, Byron Janis pressenti dans les années 50 pour succéder à Vladimir Horowitz dont Byron fut l'unique élève, mais l'arthrite avait mis fin à une carrière prometteuse dans les années 70.

Une carrière interrompue, ce ne fut pas le cas de Maurizio Pollini, dont le cœur a décidé de trahir son maître de 82 ans et qui, sauf les dernières années, a vécu en complicité avec son clavier. Heu, j'essaie d'en profiter par ces billets de vous faire écouter des musiques que ces artistes avaient portées au firmament tant au concert qu'au disque. Une écoute d'un best of plus consolatrice qu'un panégyrique funèbre conventionnel…

Une anthologie qui montre que la vie musicale continue. Sinon les chroniques plus élaborées bimensuelles se perdraient au second plan dans une intarissable rubrique nécrologique.

Nous sommes le 1er avril. Certaines années, le deblocnot surfe sur le loufoque, la farce du jour, le film improbable, la cantate jamais composée… Faute d'idée, Schubert et d'autres sous les doigts de Maurizio Pollini sont au programme. J'aurais préféré délirer sur un gag invraisemblable…

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Pollini et Christian Thielmann (Brahms-2011/2013)
 
 

J'avoue ma déception en lisant le bien maigre article en français de Wikipédia accordé à Maurizio Pollini. D'aucun considère ce pianiste comme l'un des plus essentiels de la seconde partie du XXème siècle et des deux dernières décennies. Faiblesse de cette encyclopédie sur certains sujets… Pour des artistes ayant enregistré 3-4 albums avant de disparaître d'une overdose, l'article peut atteindre des milliers de mots… peu de musique, mais une profusion d'anecdotes people plus ou moins sordides. Bon, pas de polémiques, ce site précieux offre moults informations que l'on ne trouve nulle part ailleurs (exemple : le portait détaillé du compositeur Adolf Fredrik Lindblad dont nous avons écouté deux symphonies jeudi dernier) et Maurizio Pollini bénéficie d'un article en italien très développé, merci au traducteur automatique…

La presse spécialisée ou pas rend nombre d'hommages à Pollini. Je ne les concurrencerai pas. Trois chroniques lui ont déjà été consacrées. Une biographie succincte est à lire dans celle présentant les quatre scherzos de Chopin gravés en 1991 (Clic). Autres chroniques : le quintette de Brahms avec le quartetto italiano en 1979 et le 2ème concerto de Bartók avec son ami Abbado également en 1979

Petits rappels : Maurizio Pollini voit le jour à Milan en 1928. La ville sera occupée jusqu'à la chute du Duce en 1945, mais ne souffrira pas de combats destructeurs. Fils de la pianiste Renata Melotti (qui ne jouait jamais devant son gamin 😊), le jeune Maurizio Pollini révèle tôt ses dons et suit les cours du conservatoire de Milan. Sa famille bourgeoise éveille l'intérêt de l'adolescent pour l'art et la philosophie et même la politique… Avant de commencer une carrière intensive, il continue de suivre des masters-class, notamment auprès du très pointilleux virtuose Arturo Benedetti Michelangeli qui dira "…très peu à enseigner à Pollini".


Claudio Abbado - Luigi Nono - Maurizio Pollini

Entre 1958-1960, voici le temps des concours, dont le plus prestigieux, le concours Chopin de Varsovie où il remporte le premier prix.     Présidant le jury, le magicien de Chopin de l'époque : Arthur Rubinstein affirmera "Ce garçon peut jouer du piano mieux que n'importe lequel d'entre nous".

Sa carrière dans les meilleures salles de la planète débute enfin. Parallèlement, le virtuose humaniste milite très à gauche. En vrac : Il s'est produit avec Claudio Abbado à La Scala dans un cycle de concerts pour étudiants et travailleurs. Les deux hommes se lient d'amitié avec Luigi Nono, compositeur très engagé dans les mouvements communistes italiens. Ils produiront tous ensemble une œuvre et un disque dont je parle plus loin. Il prend des positions contre la guerre du Vietnam, la dictature Pinochet ou la junte argentine, prononçant même des petits discours en fin de concerts sous les huées du public conservateur !

Le répertoire immense de Maurizio Pollini s'étendait du classicisme au romantisme jusqu'aux expériences les plus modernistes en s'attaquant à des partitions de Pierre Boulez et de l'extravagant Stockhausen. Puis à partir de 1970, sa carrière se poursuivra de manière plus traditionnelle jusqu'à 2024, bien qu'une affection cardiaque l'ait contraint à lever le pied à partir de 2012

Pollini a enregistré à ses débuts quelques disques, mais dès 1972, il enregistrera en exclusivité pour le label DG.

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1 – SCHUBERT : les 3 dernières sonates et 3 impromptus posthumes

Pour les curieux désireux de mieux connaître ces chefs-d'œuvre de la dernière période de Schubert, les sonates N° 20 D959 et N° 21 D960 ont donné lieu à la rédaction de deux chroniques, la N°20 interprétée par Rudolf Serkin, la N°21 par Wladimir Horowitz. (Index)

Ce coffret de deux CD réunissant les sonates et trois Klavierstücke (impromptus) date du début de l'ère numérique. Un critique écrivit "qu'il n'y avait aucun commentaire possible face à une telle perfection". Légèreté, intimité, souplesse du phrasé… Je confirme… l'allegro de la D958 rend jaloux tout pianiste apprenti !

Sonate

Sonate

Sonate

 

No. 19 en Do mineur

D. 958 (Playlist 1-4)

 

No. 20 en La majeur

D. 959 (Playlist 5-8)

No. 21 en Si b majeur

D. 960 (Playlist 9-12)

 

(Playlist 13) & (Playlist 14-16)

I. Allegro

II. Adagio

III. Menuetto (Allegro)

IV. Allegro

 

I. Allegro

II. Andantino

III. Scherzo (Allegro vivace)

IV. Rondo (Allegretto)

 

I. Molto moderato

II. Andante sostenuto

III. Scherzo (Allegro vivace con...

IV. Allegro ma non troppo

 

Allegretto en do mineur D. 915

3 Klavierstücke D. 946

No. 1 en Mi b mineur (Allegro Assai)

No. 2 en Mi b mineur (Allegretto)

No. 3 en do majeur (Allegro)

2 – BEETHOVEN : les concertos N°3, 4 et 5 "Empereur"

En 1976, le maestro autrichien Karl Böhm décide au crépuscule de sa carrière d'enregistrer une dernière intégrale des concertos pour piano. D'abord le N°4, puis le N°3 en 1978 et le N°5 paraissent un à un. Il fait équipe avec le jeune Maurizio Pollini déjà une star du clavier. Puissant et électrisant. Pour le 5ème, on parle de "Jupitérien". La mort ayant fauché le vieux maître, Eugen Jochum dirigera les concertos 1 et 2 en 1983 également avec la Philharmonie de Vienne pour achever l'entreprise… Des mélomanes sont moins convaincus par le duo Pollini - Abbado du remake de 1994 à Berlin, toute raison gardée.

Playlist 1 : Concerto N° 3  /  Playlist 2 : Concerto N° 4  /  Playlist 1 : Concerto N° 5

Articles disponibles sur ces trois concertos (Index)

Concerto N°3 - Martha Argerich - Claudio Abbado

Concerto N°4 - Emil Gilels - George Szell

Concerto N°4 - Wilhelm Backaus - Philharmonie de Vienne - Hans Knappertsbusch (live 1962)

Concerto N°5 "Empereur" - E. Fischer & W. Furtwängler vs A-B. Michelangeli & et C-M Giulini




3 – LUIGI NONO : Como una ola de fuerza y ​​luz

Cette vidéo (les 7 premières plages de la playlist) est proposée à titre d'illustration des recherches avant-gardistes du trio Luigi Nono (1924-1990), Claudio Abbado et Maurizio Pollini. Cette œuvre de musique trèéééés contemporaine fait appel à un piano, une soprano et à un orchestre à l'effectif délirant (genre Mahler). Une bande magnétique fixe les tempos…

Le titre en espagnol peut se traduire par "Comme une vague de force et de lumière". Ébauchée début des années 70, en pleine période de mise en place de dictatures sanglantes en Argentine et au Chili, le compositeur imagine son œuvre en forme d'hommage aux luttes antifascistes, principalement dédiée au militant de gauche chilien Luciano Cruz mort mystérieusement à 27 ans et au poète argentin Julio Huasi. Claudio Abbado crée l'œuvre à la Scala de Milan en 1972 en compagnie de Pollini et de la soprano Slavka Taskova. DG produit le disque en 1973. D'autres versions ont suivi. Bien qu'impressionné voire glacé par cette musique, la chroniquer se révèle très difficile…

 

4 – STRAVINSKI, PROKOFIEV, WEBERN, BOULEZ

Maurizio Pollini est très connu pour son immense discographie consacrée au catalogue classique et romantique, mais sans doute moins pour son intérêt pour des œuvres plus contemporaines. Ce disque est une anthologie de quatre œuvres du XXème siècle qui donnent un aperçu de son talent pour faciliter l'accès au piano moderne. Là encore des idées de petites chroniques germent dans ma caboche. 😊

Stravinsky : 3 mouvements de Petrouchka

1.     Danse russe. Allegro giusto

2.     Chez Petrouchka

3.     La semaine grasse. Con Moto - Allegretto - Tempo...

Webern : Variations pour Piano, Op. 27

7.     Sehr mäßig

8.     Sehr schnell

9.     Ruhig, fließend

Prokofiev : Sonate No. 7 en si bémol majeur Op. 83      

4.     Allegro inquieto - Andantino -...

5     Andante caloroso - Poco più animato...

6.     Precipitato

 

Boulez : Sonate No. 2 (1947-48)

10.  Extrêmement rapide

11.  Lent

12.  Modéré, presque vif

13.  Vif

 

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