mardi 4 août 2020

L’ARMEE DES OMBRES de Jean-Pierre Melville (1969) - par Pat Slade



J’ai toujours été amateur de ce genre de film, ceux qui racontent une période historique. Un grand réalisateur, une grande distribution, une grande histoire ne peuvent que donner qu’un très grand film.



LES SOLDATS SANS UNIFORMES




J.P Melville- P.Meurisse-S.Signoret
Après «La Bataille du Rail» de René Clément en 1946, voici un autre film qui parle de la résistance en France à l’époque de l’occupation. Une histoire entre fiction et réalité. Jean-Pierre Melville plonge dans le quotidien de ces hommes et ces femmes en lutte contre l’occupant nazi. Melville est toujours resté sous son nom de résistant (Jean-Pierre Grumbach), caché derrière ses inséparables Ray-Ban et son Stetson, il va adapter le livre de Joseph Kessel que ce dernier avait écrit en 1943 et inspiré par les nombreux témoignages de résistants français, alors membre des Forces Française Libres, qu’il a recueillit depuis son exil à Londres  en 1940.

J.P Cassel-P.Meurisse
Lino Ventura, Paul Meurisse, Jean-Pierre Cassel, Simone Signoret, Paul Crauchet, Claude Mann, Christian Barbier, Serge Reggiani : une affiche comme on n’en trouve plus maintenant. Eric Demarsan signait sa première musique de film mais on pouvait entendre aussi dans le film le quatrième mouvement (Protest) des Spirituals for string Choir and Orchestra de Morton Gould qui servira de générique à l’émission «Les Dossiers de l’Ecran».

Les problèmes de ravitaillement, de planque, le matériel secret... tout est vrai. Ecrit en 1942, Joseph Kessel changera les lieux et les noms afin de ne « griller » aucun réseau. Inspiré de Jean Pierre-Bloch homme politique socialiste et résistant et de Paul Rivière homme politique, compagnon de la libération et résistant, Philippe Gerbier (Lino Ventura) Ingénieur distingué des Ponts et Chaussées, soupçonné de pensée gaulliste est interné dans un camp français puis transféré au quartier général de la Gestapo de l’hôtel Majestic à Paris qui était le siège du haut commandement militaire allemand en France. Il s’évade en tuant une sentinelle.
Nous sommes à Marseille ou Gerbier et des hommes de main du réseau Félix et Le Bison (Paul Crauchet et Christian Barbier) sont chargé d’exécuter l’homme qui les à trahis. 

L.Ventura
Félix retrouve Jean-François (Jean-Pierre Cassel) un ancien ami de régiment, il le fait rentrer dans le réseau et le charge d’aller porter à  Paris un poste émetteur à Mathilde (Simone Signoret), il en profite pour rendre visite à son frère Luc Jardie (Paul Meurisse) grand bourgeois rêveur dont il ignore qu’il est le chef de son réseau de résistance. Gerbier et Jardie embarque pour l’Angleterre, pendant ce temps Félix est arrêté par la Gestapo et subit la torture. Jean-François se dénoncera inutilement pour sauver Félix qui sera lui-même torturé. Mathilde, grâce à un astucieux stratagème, réussit à s’introduire, avec Le Bison et Le Masque (Claude Mann), dans le Q.G. de la Gestapo pour les faire évader, en pure perte.
P.Meurisse-L.Ventura-C.Barbier
Gerbier est arrêté dans un restaurant suite à une rafle par la milice et sera pris comme otage. Mathilde et le réseau le feront évader au moment de son exécution, un épisode qui fait beaucoup penser à celui de Lucie Aubrac qui fit évader son mari Raymond. Mathilde sera arrêtée par la Gestapo, elle ressort libre au bout de deux jours. A-t-elle parlé ? Elle n’a pas été torturée. En fait, elle a commis une imprudence contre toutes les règles, elle a gardé sur elle une photo de sa fille son point faible. A-t-elle trahi pour éviter que sa fille soit envoyée en Russie dans un bordel pour soldat allemand ? La seule solution sera de l’éliminer. Une scène où tous les protagonistes de l’histoire entassés dans une voiture assisteront à son exécution. Ses compagnons de l’ombre ne lui survivront pas longtemps, On nous précise même les atroces souffrances de certains, ainsi Le Bison est décapité à la hache, Jardie, quant à lui, est mort sous la torture en ne donnant qu’un nom, le sien, Gerbier lui sera cette fois exécuté.

S.Signoret
C’est donc un univers sombre, cruel, sordide que nous montre Melville, ce n’est pas un récit romanesque sur la guerre, c’est un monde brut de décoffrage et réaliste. Des dialogues réduits au minimum, des couleurs bleutée, grisonnantes, froides, souvent des extérieur de pluie et des intérieurs sombres. Une ambiance pesante, une atmosphère étouffante voir claustrophobique qui enfonce bien le clou dans l’intrigue du film.

«L’Armée des Ombres»:  la vie d’hommes et de femmes qui ne se sont pas résignés devant la bête immonde. Un chef-d’œuvre du cinéma, et le plus grand film sur la Résistance. A voir absolument pour l’histoire et le devoir de mémoire. 

La Bande-annonce suivie de "Protest" extrait des Spirituals for string Choir and Orchestra de Morton Gould (1913-1996)

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