vendredi 31 juillet 2020

LA CHAMBRE DES CURIOSITES de Preston & Child (2002) par Luc B.


Preston et Child, de leurs petits noms Douglas et Lincoln. Des noms que vous avez déjà croisés sur le Déblocnot’ car des auteurs qu’apprécie notre Claude, qui m’a initié à ce couple d’écrivains américains donnant que le polar, le thriller, avec des relents de fantastique. Je me suis embarqué dans cette aventure qui a pour héros l’inspecteur du FBI Pendergast, de son petit nom Aloysius Xingu Leng. (ça rappelle le héros de Connelly, Harry Bosch, prénommé en réalité Hieronymus).

Pendergast est un type à la fois étrange, fascinant, on se demande parfois s’il existe vraiment. Décrit comme un grand bonhomme mince à la peau blanchâtre, cheveux blond très clair (limite albinos ?) très distingué, issu d'une riche famille du Sud, détaché au bureau de la Nouvelle Orléans, d’une culture encyclopédique, se déplaçant en Rolls-Royce Silver Wraith de 1959 blanche, conduite par son chauffeur Proctor. Il a un appart dans le Dakota Building, sur la 5ème avenue à NY. Donc assez loin du profil de Columbo…
LA CHAMBRE DES CURIOSITES a pour décor principal le muséum d’histoire naturelle de New York. Un endroit que Douglas Preston connait bien, il y a travaillé presque 15 ans comme auteur et éditeur de collections. Pour ceux qui ont eu la chance de visiter ce musée (assez extraordinaire) la lecture du roman fourmille de mille détails, notamment dans ce que le public ne connait pas : ses archives. Car c’est là que se noue l’intrigue…
L’action commence par un gros coup de pelleteuse. Les promoteurs immobilier Moegen-Fairhaven détruisent un ancien site de Manhattan pour construire un gratte-ciel. Le chantier est stoppé lorsqu’on découvre, dans des cryptes, une trentaine de squelettes humains, datant de plus d’un siècle. Découverte qui intéresse l’inspecteur Pendergast qui enrôle une archéologue du muséum, Nora Kelly, pour enquêter. Qui met sur le coup son ami journaliste William Smithback. Mais les ossements sont rapidement retirés – subtilisés ? – par l’entrepreneur qui ne souhaite pas voir son chantier à 100 millions de dollars retardé.
La première phase de l’enquête consiste à identifier les victimes et si possible le meurtrier. Ces passages sont de loin les plus intéressants, on enquête sur des restes, des ossements, morceaux de vêtements, on fouille le passé, les archives, le cadastre, et petit à petit le profil d’un tueur en série sévissant à New York vers 1880 prend forme : le docteur Leng, qu’on soupçonne de quelques expériences médicales pas franchement honnêtes… Les enquêteurs remontent une piste centenaire, donc peu d’indices et beaucoup de jugeote. La quatrième de couverture évoque le digne héritier de Sherlock Holmes. On n’en est pas loin.
Mais l’affaire se complique quand de nouvelles victimes sont retrouvées, de nos jours, avec le même modus operanti. A-t-on affaire au même tueur (comment ce serait possible ?) un émule, ou au hasard ? L’intrigue titille le lecteur, qui imagine une resucée du film C’ETAIT DEMAIN (1979) ou Malcom Mc Dowell pourchassait Jack L’Eventreur dans le futur grâce à la machine à remonter le temps.
Pour le savoir, il faudra se goinfrer les 700 pages du roman, qui se lisent très bien, car les auteurs savent y faire. Même s’ils abusent de figures de styles redondantes malheureusement propres au genre, « son sang se glaça dans ses veines » et autres « il n’y avait pas une seconde à perdre » balancées à chaque paragraphe. C’est très agaçant, surtout à la fin, une course contre la montre. Plutôt que de se grouiller et les faire agir, Preston persiste à commenter l’action de ses personnages : « elle savait qu’il fallait agir, et vite ». Et ben vas-y cocotte, le lecteur n’attend que ça !
On pourra aussi reprocher des descriptions à rallonge, comme s'il fallait absolument placer la documentation exhaustive, contenu de chaque bocal ou objet retrouvé dans tel laboratoire secret, chaque porte ouvrant sur une salle dotée d’une autre porte qui ouvre sur une autre salle… ça n'en finit plus, un procédé qui étire l’action au-delà du raisonnable. Un peu comme au cinéma où une action rapide est filmée au ralenti, un contre sens total.
Mis à part Pendergast, dont le bouquin nous révèle son passé, les autres personnages sont tout de même traités à la truelle, le journaliste avide de scoop, le promoteur véreux au sourire carnassier, la jolie et brillante archéologue, le capitaine de police con comme un sac qui cherche la reconnaissance des médias. Était-ce utile de nous asséner les pensées profondes du capitaine Custer sur le mode « ah ah ah, ils vont voir ce qu’ils vont voir, à moi la gloire » alors que le lecteur sait déjà qu'il se plante dans les grandes largeurs. L'énoncé des faits suffit. Par contre, mention très bien pour le personnage de O’Shaughnessy, un flic mis en rencart par sa hiérarchie, qui enquêtera pour le compte de Pendergast 
Les 100 dernières pages versent dans le classique montage parallèle. Custer certain d’avoir chopé le bon gars et rêvant de sa médaille, contre Pendergast justement en chasse du vrai meurtrier. Procédé à mon sens mal venu et lourdingue puisque le lecteur a toutes la cartes en main.
Malgré ces défauts qu’on retrouve hélas dans 90% de la production littéraire policière contemporaine qui semble prendre le lecteur pour des billes ou des novices, LA CHAMBRE DES CURIOSITES est un polar à la lisière du fantastique (Pendergast s’autohypnose pour revenir dans le temps) à l'intrigue plutôt bien foutue, qui doit beaucoup à la personnalité de son héros. Une bonne lecture - facile - pour l’été.

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La semaine prochaine : un autre bouquin d'un tout autre genre, qui parle d'un général-président bien connu des français...   

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