Le Deblocnot est
l’exutoire de mes envies, le déversoir de mes passions, l’antidote de mes
frustrations, la soupape de sûreté de mon trop plein de mots. Berlioz aurait pu
dire une telle phrase, mais lui était plus grandiloquent, plus
dithyrambique, plus sentencieux, plus emphatique et tous ces adjectifs s'appliquent très souvent à sa musique.
Hector en Italie
«C’est
le grand jour, le jour de fête, jour du triomphe et des lauriers. Pour
vous, ouvriers, La couronne est prête.»
Hector Berlioz Rome 1832 |
On ne devient pas un musicien
reconnu du jour au lendemain, il y a des embûches et des obstacles à surpasser
et Berlioz
va les rencontrer. Pour pouvoir ce faire connaitre à l'époque, il faut obtenir le grand
prix de Rome. Le grand prix de Rome n’est qu’une expression qui désigne le
concours des Académies royales. Plusieurs disciplines sont représentées : L’architecture,
la peinture, la gravure, la sculpture et la composition musicale bien sûr.
Mais pour y concourir, c’est un
véritable parcours du combattant. Comme une composition sportive, il y a deux
tours à passer pour pouvoir arriver en final pour pouvoir concourir. Le premier
consiste à l'écriture d'exercices de contrepoint et de fugue et le second requiert l'écriture
d'une cantate pour voix solistes et orchestre. Les
candidats sont logés entre vingt cinq et trente jours à cause de la complexité
de l’orchestration moderne et l’épaisseur des livrets poétiques
imposés nécessitent un temps de réalisation plus long. L’heureux lauréat qui
décrochait le premier prix, était envoyé pour trois ans à l'Académie de France
à Rome à la villa Médicis. Les deuxièmes premiers grands prix et des
seconds grands prix sont aussi accordés, mais ils ne permettent pas
normalement de partir à Rome, sauf de manière exceptionnelle et pour une durée
moindre. Hector Berlioz va concourir cinq années de suite. En 1826 il est éliminé à l'examen
préliminaire qui consiste en la composition d'une fugue, En 1827 sa cantate «La Mort d'Orphée» est déclarée « inexécutable » par le jury, en 1828, il
n'obtient que le deuxième premier grand prix avec la cantate «Herminie» (Oui
gagner le "deuxième premier" peut paraître étrange, mais cinq récompenses étaient
attribuées : Premier grand prix, deuxième premier grand prix, second grand
prix, deuxième second grand prix et mention.)
La mort de Cléopâtre |
En 1829 l’année
où il compose «La
mort de Cléopâtre» le premier grand prix n'est pas décerné et
finalement en 1830, il remporte le Prix de Rome avec
sa cantate «Sadarnapale». Pendant son séjour à Rome, il composera
peu, l’ «Ouverture de Rob-Roy», la Scène aux champs de la «Symphonie
fantastique», le Chant de bonheur de son mono-drame «Lélio» et une mélodie «La Captive» sur un poème de Victor Hugo. Son voyage le marquera et plusieurs de ses
ouvrages porteront l'empreinte de l'Italie : «Harold en Italie», «Roméo et
Juliette» et «Benvenuto Cellini» en sont des exemples
flagrants.
Berlioz détruira presque
complètement les partitions de ses cantates : «La
Mort d’Orphée» et de «Sardanapale» mais il réutilisera une partie des autres dans divers œuvres. En juillet 1829, il va composer «La Mort de
Cléopâtre» elle est aujourd'hui l'une des œuvres
lyriques du compositeur les plus souvent exécutées. La partition
de «Cléopâtre» recèle plus d’un
piège, une introduction convulsive : les cordes se mettent à
décrire les vagues roulantes d’une sonorité angoissante. Le son entêtant d’une
clarinette vient s’immiscer dans ce paysage d’inquiétude, bientôt relayée par
les violoncelles. Quatre notes sortent d’outre-tombe jouées par les
contrebasses… Cléopâtre soupire ! On attend avec angoisse
que la reine mette la main dans le panier pour recevoir le baiser mortel du
serpent : «Contre l'horreur qui m'environne, Un vil reptile est mon
recours».
Une
discographie très riche pour cette œuvre, donc je ne conseillerais (Mais les
conseilleurs ne sont pas les payeurs !) qu’une seule version. Chez
Philips et le cycle Berlioz par Colin
Davis un enregistrement de 1988
ou l’on pourra aussi trouver quelques airs d’ «Herminie»
et quelques autres œuvres dont «La Captive».
Jules Janin |
Revenons
sur un sujet plus gai, «Le Chant des Chemins de
Fer». Une cantate pour ténor solo composée en 1846 par Hector Berlioz sur des paroles de Jules Janin écrivain et critique dramatique. Alors qu’il rentrait d’une longue tournée en Europe, Berlioz
fut sollicité par la ville de Lille afin de composer une cantate pour l’inauguration
de la ligne de chemin de fer qui la reliait à Paris. Il devra mettre de coté la composition de «La Damnation de Faust». Il fut sans doute l’un des premiers à
emprunter la nouvelle ligne de chemin de fer, puisqu’il se rendit à Lille en
train alors que l’inauguration n’avait pas encore eu lieu. Le
14 juin, à l’Hôtel de ville, il dirigea l’Apothéose de sa «Symphonie funèbre et triomphale», suivie de sa
cantate pour ténor solo, chœur et orchestre. la musique est nerveuse et vigoureuse, l’orchestration
bondissante, on pourrait trouver l’ensemble grandiloquent et lourd,
mais le message social de Jules Janin, dont le
poème s’adressait au peuple des travailleurs collait parfaitement avec la
partition.
A Lille, on vola toute la musique du «Chant
des chemins de fer», elle sera retrouvée
vers 1849 dans des circonstances
mystérieuses, la partition d’orchestre ne fut publiée qu’en 1903. Elle est rarement jouée et les enregistrements
ne court pas les rues. Il doit en exister d’autres, mais la seule que j’ai
trouvée et qui soit surtout récente (2010) se trouve chez Erato avec l’Orchestre
National du Capitole de Toulouse sous la baguette de Michel
Plasson et Rolando Villazón
comme ténor (Qui a été un très bon Don
José).
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