mardi 7 juillet 2020

H.BERLIOZ - «Le Chant Des Chemins De Fer» (1846) & «La Mort De Cléopâtre» (1829) - par Pat Slade




Le Deblocnot est l’exutoire de mes envies, le déversoir de mes passions, l’antidote de mes frustrations, la soupape de sûreté de mon trop plein de mots. Berlioz aurait pu dire une telle phrase, mais lui était plus grandiloquent, plus dithyrambique, plus sentencieux, plus emphatique et tous ces adjectifs s'appliquent très souvent à sa musique.




Hector en Italie





Hector Berlioz Rome 1832
On ne devient pas un musicien reconnu du jour au lendemain, il y a des embûches et des obstacles à surpasser et Berlioz va les rencontrer. Pour pouvoir ce faire connaitre à l'époque, il faut obtenir le grand prix de Rome. Le grand prix de Rome n’est qu’une expression qui désigne le concours des Académies royales. Plusieurs disciplines sont représentées : L’architecture, la peinture, la gravure, la sculpture et la composition musicale bien sûr.

Mais pour y concourir, c’est un véritable parcours du combattant. Comme une composition sportive, il y a deux tours à passer pour pouvoir arriver en final pour pouvoir concourir. Le premier consiste à l'écriture d'exercices de contrepoint et de fugue et le second requiert l'écriture d'une cantate pour voix solistes et orchestre. Les candidats sont logés entre vingt cinq et trente jours à cause de la complexité de l’orchestration moderne et l’épaisseur des livrets poétiques imposés nécessitent un temps de réalisation plus long. L’heureux lauréat qui décrochait le premier prix, était envoyé pour trois ans à l'Académie de France à Rome à la villa Médicis. Les deuxièmes premiers grands prix et des seconds grands prix sont aussi accordés, mais ils ne permettent pas normalement de partir à Rome, sauf de manière exceptionnelle et pour une durée moindre. Hector Berlioz va concourir cinq années de suite. En 1826  il est éliminé à l'examen préliminaire qui consiste en la composition d'une fugue, En 1827 sa cantate «La Mort d'Orphée» est déclarée « inexécutable » par le jury, en 1828, il n'obtient que le deuxième premier grand prix avec la cantate «Herminie» (Oui gagner le "deuxième premier" peut paraître étrange, mais cinq récompenses étaient attribuées : Premier grand prix, deuxième premier grand prix, second grand prix, deuxième second grand prix et mention.) 

La mort de Cléopâtre
En 1829 l’année où il compose «La mort de Cléopâtre» le premier grand prix n'est pas décerné et finalement en 1830, il remporte le Prix de Rome avec sa cantate «Sadarnapale». Pendant son séjour à Rome, il composera peu, l’ «Ouverture de Rob-Roy», la Scène aux champs de la «Symphonie fantastique», le Chant de bonheur de son mono-drame «Lélio» et une mélodie «La Captive» sur un poème de Victor Hugo. Son voyage le marquera et plusieurs de ses ouvrages porteront l'empreinte de l'Italie : «Harold en Italie», «Roméo et Juliette» et «Benvenuto Cellini» en sont des exemples flagrants. 

Berlioz détruira presque complètement les partitions de ses cantates : «La Mort d’Orphée» et de «Sardanapale» mais il réutilisera une partie des autres dans divers œuvres.  En juillet 1829, il va composer «La Mort de Cléopâtre» elle est aujourd'hui l'une des œuvres lyriques du compositeur les plus souvent exécutées. La partition de «Cléopâtre» recèle plus d’un piège, une introduction convulsive : les cordes se mettent à décrire les vagues roulantes d’une sonorité angoissante. Le son entêtant d’une clarinette vient s’immiscer dans ce paysage d’inquiétude, bientôt relayée par les violoncelles. Quatre notes sortent d’outre-tombe jouées par les contrebasses… Cléopâtre soupire ! On attend avec angoisse que la reine mette la main dans le panier pour recevoir le baiser mortel du serpent : «Contre l'horreur qui m'environne, Un vil reptile est mon recours».

Une discographie très riche pour cette œuvre, donc je ne conseillerais (Mais les conseilleurs ne sont pas les payeurs !) qu’une seule version. Chez Philips et le cycle Berlioz par Colin Davis un enregistrement de 1988 ou l’on pourra aussi trouver quelques airs d’ «Herminie» et quelques autres œuvres dont «La Captive».  

Jules Janin
Revenons sur un sujet plus gai, «Le Chant des Chemins de Fer». Une cantate pour ténor solo composée en 1846 par Hector Berlioz sur des paroles de Jules Janin écrivain et critique dramatique. Alors qu’il rentrait d’une longue tournée en Europe, Berlioz fut sollicité par la ville de Lille afin de composer une cantate pour l’inauguration de la ligne de chemin de fer qui la reliait à Paris. Il devra mettre de coté la composition de «La Damnation de Faust». Il fut sans doute l’un des premiers à emprunter la nouvelle ligne de chemin de fer, puisqu’il se rendit à Lille en train alors que l’inauguration n’avait pas encore eu lieu. Le 14 juin, à l’Hôtel de ville, il dirigea l’Apothéose de sa «Symphonie funèbre et triomphale», suivie de sa cantate pour ténor solo, chœur et orchestre. la musique est nerveuse et vigoureuse, l’orchestration bondissante, on pourrait trouver l’ensemble grandiloquent et lourd, mais le message social de Jules Janin, dont le poème s’adressait au peuple des travailleurs collait parfaitement avec la partition.


 «C’est le grand jour, le jour de fête, jour du triomphe et des lauriers. Pour vous, ouvriers, La couronne est prête.»
A Lille, on vola toute la musique du «Chant des chemins de fer», elle sera retrouvée vers 1849 dans des circonstances mystérieuses, la partition d’orchestre ne fut publiée qu’en 1903. Elle est rarement jouée et les enregistrements ne court pas les rues. Il doit en exister d’autres, mais la seule que j’ai trouvée et qui soit surtout récente (2010) se trouve chez Erato avec l’Orchestre National du Capitole de Toulouse sous la baguette de Michel Plasson et Rolando Villazón comme ténor (Qui a été un très bon Don José).




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