Une chronique qui commencerait presque comme le
titre d’un guide de tests comparatifs. Après Jacques
Higelin et «BBH75», je continue mon petit inventaire de
certains albums de la chanson française du temps jadis. Ou étiez-vous en
1982 ? Qu’écoutiez-vous en 1982 ? Et surtout que faisiez-vous
en 1982 ? Essayez de plonger
dans votre mémoire comme aurait pu dire un amnésique apnéiste.
Pour ma part, j’étais chômeur, j’étais chez moi et
j’écoutais Charlélie Couture Le barbichu de la
place Stanislas. Ce dernier roulait sur la vague d’un succès grandissant grâce
à son précédent album «Poèmes Rock» qui avec ses histoires d’avion
sans ailes et de loups dans la bergerie se classera 22e meilleur album
de rock français dans l’édition nationale du magazine Rolling Stone. Mais ce qui marquera les esprits
sera surtout la voix du chanteur, avec son coté rocailleux et ses inflexions inhabituelles qui
lui donnent ce timbre nasillard, confondu à ses débuts comme un patois
néo-québécois-post-lorrain. Mais Charlélie Couture s’en fout ! «Je ne veux pas me faire
chier à bien chanter». Ce qui en fait sa manière toute personnelle
d’adapter le français aux contraintes phonétiques du blues et du rock.
J’avais
déjà consacré une chronique à cette célébrité de Nancy (Non ! Je ne parle pas de Nadine Morano !),
et l’idée de récidiver avec un article sur l'un de ses albums m’est venue après
m’être replongé dans l'un de ses bouquins «Les Dragons en Sucre». J’ai voulu piocher dans sa
discographie pour choisir un des disques de cet artiste pluridisciplinaire,
Mais lequel prendre ? Avec ses 21 albums studio en 38 ans de carrière le
choix est large. Quelle période prendre ? La Nancéienne ? L’Australe ?
La Parisienne ou la New Yorkaise ? Dilemme cornélien ! Après en avoir
réécouté certain, je faillis arrêter mon choix sur «ImMortel» en 2014 et puis sur «Art & Scalp» en 1985 pour enfin de compte prendre un
classique de 1982 «Quoi
Faire ?» un album de jeunesse, l’avant dernier de la période Chris Blackwell et
Island Records.
Quoi Dire ?
«Quoi
Faire ?» : Le premier titre et l’atmosphère de la photo de la jaquette,
les longs dimanche coincés entre le poulet hebdomadaire et la télévision à Nancy
qui te donne des envies de Meurthe… ! Une photo prise par Odette Michel la mère de Charlélie
où apparaissent son père, sa grand-mère, ce que je pense être le jeune Jean Thomas Couture plus connu sous le pseudo de Tom Novembre et, coincé dans le poste télévision,
l’acteur Yves Deniaud. Une chanson qui par ses
paroles retranscrivent bien l’ennui de ces dimanches après-midi. «Elle m’a écrit
des lettres» une
histoire d’amour a sens unique. «Le menteur de métier» ce gars un peut clodo,
beaucoup sdf qui raconte une histoire différente à chaque porte où il va
frapper pour uniquement faire l’aumône. «Un dernier
regard (On s’aperçoit qu’on s’aimait)» une histoire d’amour qui
prend fin sans jamais avoir vraiment commencé. «Ou étais-tu ?» la suite de
la chanson précédente ? Ce gars qui se demande où est passée sa belle après
une rupture. «Après
la fête/Blues» La triste réalité des fins de soirée après un
anniversaire ou une autre fête que le narrateur voit avec un œil réprobateur, qui
voit surtout le pauvre piano qui en a pris pour son matricule et tout le ménage
qu’il va y avoir à faire après. Les lendemains de fête avec les dégâts que ça a
engendrés, une situation que l’on a tous vécue au moins une fois dans sa vie.
«La route (Oui
mais Kerouac est mort)» Un clin d’œil à la beat génération. Charlélie lui-même,
à 16 ans, quittera famille et lycée et fera la route dans le sud de la France. «Guett’ la Chance» ou comment il faut profiter des petits instants de la vie avant qu’il ne soit
trop tard : «Tant d’choses à voir, tant d’choses
à faire. Quand on sera
mort, y s’ra trop tard». «Partie sans rien dire» La plus belle et la
plus triste de chansons de l’album. Un titre autobiographique ? Peut-être !
Les questions que l’on se pose quand on attend celle que l’on aime et que cette
dernière ne rentre pas de la nuit, les questions et les pourquoi de son
absence. «Jamais connu l’amour» : L’histoire d’une femme anonyme
et complètement coincée qui passe inaperçu, un passage dans l’existence sans se
faire remarquer et qui disparaîtra sans laisser de traces.
Charlélie reprend la
même recette que sur «Poèmes Rock», des textes qui racontent le quotidien ou chacun peut se retrouver avec une musique teintée de blues morose.
Ses musiciens New-yorkais lui ayant fait faux bond
avant la tournée du précédent album, ce sera le grand retour du gaucher
silencieux Alice Botté (qui plus tard rejoindra H.F.Thiéfaine) et de son vieux complice au clavier Jerry Lipkins qui était déjà présent pour son deuxième album «Le Pêcheur»
en 1979, il va aussi s’encadrer
du batteur François Abraham Causse qui restera
longtemps avec lui, du bassiste zappien Phillip’Geny
et du saxophoniste fous Pee Barney Douche.
Mon vieux ticket de concert qui a beaucoup vécu ! |
Une pochette intérieure constellée de photos en
tout genre mis en page (Art Work) par
B.Scout (Charlélie Couture lui-même) et Mah Duboy (Martine Dubois
qui était sa compagne de l’époque).
Après un Olympia en 1981 de reconnaissance, celui de 1983 sera celui de la consécration
Quoi dire d’autre ? Rien ! Quoi faire d’autre ?
Hormis écouter l’album !!!
Là par contre tu m'auras bel et bien coupé l'herbe sous le pied Pat :-)
RépondreSupprimerCe disque, ça fait un bail que je voulais en parler ici. sauf que quand ça veut pas, ben ça veut pas ! LOL.
Bel article que celui ci. Et j'avoue qu'a l'époque, alors que tout mes potes entonnaient le dernier tube des Téléphone, moi j'étais a fond Charlélie. Et ce disque est l'un de mes préférés juste derrière le monumental "Poèmes Rock".
J'avoue avoir ensuite totalement décroché après la sortie de l'album suivant, "Crocodile Point". Un disque bien terne ou surnage tout de même deux très bons titres. Les deux qui ouvrent l'album justement.
"Quoi Faire ?" est un disque sombre, cruel et même parfois un poil cynique selon moi. Dans le fond, c'est pour moi un disque qu'aurait pu écrire un blues man, sans pourtant utiliser aucun des codes liés habituellement a ce style justement (la pulsation ternaire, le refrain en 12 mesures, etc).
Ce disque est vraiment incroyable. Merci de l'avoir ici remis en lumière Pat.
"Quoi faire" tout comme toi, est un de mes préféré, il m'a accompagné quand j'ai fait mon périple allemand en 1983.Je te conseil de pousser tes investigations sur Charlélie avec des albums comme "Art & scalp", "Solo Boy" et sa petite soeur "solo girl" et qui donneront un très bon double live ("Trois folies live") et toute la période australienne avec "Melbourne aussie" "Victoria Spirit" jusqu'au "Les naïves" en 1994. "Crocodile point" est l'album que j'aime le moins, même si il y a quelques titres intéressant comme "Aboyer le chien", "Tu es loin" et "Des gens sûrs" (Que tu trouves dans son premier disque "Douze chansons dans la sciure"). Je pense surement que je ferais dans un avenir proche "Art & scalp" le dernier de la période Island et un peut plus rock que les précédents.
RépondreSupprimerRécemment je me suis procuré "Casque Nu". Le premier de son épopée New York-aise me semble-t-il ? Pas mal mais...
RépondreSupprimer"Double Vue", "109", "New Yorcoeur", "ImMortel", ces albums méritent-ils que je les acquières Pat ?
Personnellement, le dernier que j'ai acquis c'est "ImMortel" en vinyle. Bon album, mais le dernier "Lafayette" est tout bonnement magnifique. Un peut un retour au source dans sa musique avec un mélange de blues-cajun.
RépondreSupprimerTiens donc ! Prolifique le Charlélie dis donc. Je vais écouter ça avec attention. Thanks Pat !
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