Difficile de trouver un papier sur Dick sans qu'il y soit fait mention de Johnny et Eddy alors évacuons d'entrée le sujet, écoutons Dick : "Lorsque j'arrive au Québec je n'ai pas l'impression d'être le même Dick... on ne me casse pas les couilles avec Johnny et Eddy car là bas ils sont inconnus ! J'en ai marre qu'on me compare toujours à eux. Nous sommes tellement différents... on parait indissociables car c'est une question de génération. Je me sens plus proche d'Alain Bashung" (les citations de cette chronique sont extraites d'une interview donné à la revue BCR, à lire dans le No27). En effet, durant toute sa carrière Dick est resté dans l'ombre de ces 2 mastodontes de la scène française, comme il l'explique lui même il est arrivé chronologiquement en troisième derrière Johnny puis Eddy, et le tiercé est resté le même, le français étant conservateur...Pourtant sa production n'a rien à leur envier, écoutez "Linda Lu Baker", "Mississippi river's" ou "Holly days in Austin" ou plus récemment "L'homme sans âge"...
Seconde injustice, il reste encore pour tout le monde le chanteur des "Chats sauvages" alors qu'il n'a été avec eux que de Avril 1961 à Aout 1962 ! (les Chats continueront jusqu'en Mai 1964 avec un nouveau chanteur ; au fait leur nom venait du rocker anglais Marty Wilde et ses "Wild Cats"). Depuis il a sorti si j'ai bien compté 40 albums studios et une bonne poignée de hits, du rock'n'roll à la country, en passant par le blues ou la chanson "crooner"; tout en restant superbement ignoré des plateaux de télé, squattés par des abrutis dénués de talent ( "Drucker? je m'en fous de Drucker...Pour Drucker je n'existe pas!").
Dick Rivers - qui tire son nom de scène de Deke Rivers, personnage joué par Elvis dans le film "Loving you"- est surement un gars bien, un serviteur du rock'n'roll, fan de Elvis, Johnny Cash et Creedence Clearwater Revival, plein d’autodérision, qui ne s'est jamais compromis et ne traine pas de casseroles dont pourrait se repaitre la presse "people". Tiens j'y pense, pour l'anecdote, c'est lui qui lança dans sa première partie en 1973 un certain... Coluche.
Mais venons en à ce "Mister D", qui sort tout pile un demi siècle après les débuts des Chats sauvages, ça ne nous rajeunit pas... 50 ans de carrière c'est quand même quelque chose et ça inspire le respect, surtout quand il s'agit d'un opus de cette qualité, à faire honte à pas mal de jeunots qui se la pètent (Rockin! des noms ! cliquez ici..). Hors donc ce nouvel album voit ses textes signés Jean Fauque (ex Bashung, Bashung qui a travaillé avec Dick sur 3 albums de 1972 à 1974) et Joseph d'Anvers avec à la musique et à la production Oli le Baron.
Le Baron qui joue tous les instruments (guitare, basses, drums, Hammond B3, accordéon, claviers, les choeurs, mandoline et "autres bizarreries en tout genre"). Un multi instrumentiste sur lequel Dick ne tarit pas d'éloges, "cet album il en est très fier et moralement autant propriétaire que moi à 50%". On y trouve également quelques invités dont le guitariste Charlie Sexton, une violoncelliste (Isabelle Sajot) et 2 saxophonistes.
- Hé Rockin ! on se l'écoute ce disque ou quoi? quand tu veux !!
Oui oui, voilà, ça vient, c'est qu'il y en a des choses à dire sur le père Dick ; 50 ans de carrière ça mérite bien quelques lignes !
L'album ouvre avec "Reverse", sur un tempo blues rock, qui revient justement sur le parcours de Dick "ça fait déjà 50ans que je chante/ que je vis ma vie, la vie que j'invente/ à tracer mon sillon dans les microsillons/ survivre aux rayures sans faire attention/ les années 60 c'est hier/ je respire encore leurs poussières (...) /J'suis pas encore mort, j'entends les cormorans/ qui me crient le ciel , le ciel peut attendre". Suit "Bloody movie", un superbe titre country au "beat" swamp blues qui convoque les esprits du vaudou et nous ballade dans le bayou pour une "road song" en compagnie d'un vampire. "Automatic" durcit le ton pour un rock nerveux qui évoque le son des Cramps avant le country rock "C'est pour ton bien" qui brocarde avec humour les monceaux d'interdits qui nous gonflent. La suite de l'album nous réservera 3 ballades ( "la ballade de l'echographié", "Désormais", "le coeur dans le cendrier") , la belle "Histoire de vie" country rock cool, "Demain" rock enlevé rehaussé par l'harmonica de Mickey Blow, les bluesy "la fièvre" et "Dur d'être dieu" (à rapprocher du "Je suis dieu" de Gerard Manset ). J'ai gardé mon titre préféré pour la fin, "Johnny", ça tombe bien c'est aussi le préféré de Dick ("dans le chant j'ai tout donné"), oui il a tout donné de sa voix burinée par les ans sur ce blues profond , avec cette slide à la Ry Cooder qui s’élève dans le désert au dessus des cactus et des carcasses laissées par les vautours, accompagnant cette histoire à la Johnny Cash; terrible!
Vous l'aurez compris, c'est peu dire que j'aime ce disque, qui laisse loin derrière les derniers... Johnny et Eddy (on y revient toujours à ces 2 là!) : qualité des textes, des musiques, gros son, voix de velours qui sait se durcir quand il le faut, racines roots, country, blues, rock mais pas pour autant poussiéreux ; bref, le pied !
(Il est de bon ton dans certains milieux de trouver Dick ringard, à ceux là je dirai de laisser leurs préjugés de côté et d'écouter avant de juger, et puis Guetta, Grégoire, Obispo ou Justin Bieber ne sont ils pas plus ringards finalement...)
Ajoutons qu'il existe une version double CD avec 4 titres en bonus, pas indispensables à mon sens, hormis "Y'en a qui méritent", blues rock aux accents sudistes; les 3 autres sont une reprise de Nina Simone , très slow ("fodder on her wings"), une autre version de "C'est pour ton bien" et "Mon septième ciel", reprise de Johnny (on y revient toujours, bis), elle même adaptation d'un titre ricain "Seven steps to love", très slow aussi, c'est bien mais perso ce n'est pas dans ce registre que je préfère le Dick.
A lire également le livre du même titre, "Mister D", sous forme d'entretiens avec Sam Bernett.
"Bloody movie" sur une de ses rares apparitions télés, sur france 3
(A signaler le clin d’œil à Dick signé d'un jeune groupe parisien, Clouzot: "Suck my dick rivers", avec la voix de Dick en guest star; à écouter ici: myspace.com/clouzot)
Dick Rivers ? Sortie du portrait du fan pur et dur ( sympa ! )de Antoine de Caune avec Didier L'Embrouille ,pour ma part le seul rocker français encore vivant de nos jours.
RépondreSupprimerLe seul rocker français dont les tubes les plus mémorables de son come back 80's ont été écrits par... Didier Barbelivien... J'admire la longévité du monsieur, son amour immodéré du rock'n'roll, de la country, de la culture US, et de ne pas s'être laissé servir la soupe par les Drucker and Cie. Je comprends aussi son agacement à être cité toujours après Smet et Schmoll, mais à une époque, je pense que cela l'a bien servi aussi. Avec Johnny, pas grand chose à voir, effectivement, par contre, avec M'sieur Eddy, je ne pige pas l'embrouille, les deux personnages sont tout de même artistiquement assez proches. Y aurait-il une petite frustration de ne pas être reconnu autant que la Chaussette Noire ?
RépondreSupprimeralors Luc, je tiens à préciser qu'il n'y a aucune embrouille entre Dick et Eddy, et qu'ils ne sont absolument pas brouillés; le truc c'est que Dick est assez remonté (à juste titre à mon avis) envers les médias "officiels", les Drucker et Ruquier par exemple qui l'ont toujours ignoré. Et c'est vrai que son univers musical se rapproche plus de celui de Mr Eddy.
RépondreSupprimerbonjour, qui pourrait indiquer les interpretes originaux des chansons que Dick a repris
RépondreSupprimer-je n'ai pas reconnu ma vie
-et toi tu t'endors (avec le titre)
-mary
merci
bonjour et désolé de répondre si tard, cette question m'avait échappé; ça c'est une véritable colle, la seule chose que j'ai pu trouver c'est le titre original de la première : It could have been Nashville (je n'ai pas reconnu ma ville)
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