vendredi 7 octobre 2011

THE BEATLES - "Abbey Road" - (1969) par Luc B. et la participation amicale et exceptionnelle de Rockin'Jl

Des cris nous ont alertés : quid des Beatles sur le Déblocnot’ ??? Pourquoi une telle impasse ? Nous répondrons : 
1) en un an et demi, on ne peut pas faire le tour de 60 ans de musique pop (mauvais argument) 
2) y’a des bouquins entiers sur les Beatles (mauvais argument) 
3) on n’aime pas les Beatles ! (pas très crédible…) 
4) on a le droit de… (non, nous n’avons que des devoirs…) 
5) on parle duquel en premier ? 
Aaaahhhh, voilà un bon argument ! La question du choix. Nous avons tiré à la courte paille. Je soupçonne quelques tricheries, mais c’est tombé sur la pomme ! Tiens, ma pomme ! Justement… 



THE BEATLES : treize albums en 7 ans d’existence. Le quel chroniquer ?  Si on retire deux disques qui ne sont pas de réelles créations (MAGICAL MYSTERY TOUR et YELLOW SUBMARINE réunissent des titres composés pour des films), il en reste onze. Les premiers, PLEASE PLEASE ME et  WITH THE BEATLES (1963) c’est le tour de chauffe, des chansons pop fort bien faites (vous savez que « I saw her standing there » la première chanson de la première face du premier disque des Beatles, reste pour moi une des plus mémorables !) ou des reprises rock, du calibré sur mesure pour énerver les jeunes filles… Je les écoute encore, c’est très agréable, mais ça ne fait pas une œuvre. Donc, il en reste neuf. Y’a aussi le problème de LET IT BE (1970) totalement retravaillé par l’arrangeur Phil Spector pendant des mois. Même les Fab Four eux-mêmes n'y ont pas retrouvé leurs petits… Quelle version doit-on jugée ? Dans le doute, on retire… Reste huit. Et là, on voit bien qu’une ligne peut être tracée, séparant deux époques et deux manières de faire. Préfère-t-on les Beatles pop/rock de HARD DAY’S NIGHT (64) / BEATLES FOR SALE (64) / HELP (65) ou les Beatles mangeurs de petites pilules, avec RUBBER SOUL (65), engageant le groupe dans une direction plus expérimentale ? Même si j’adore les albums pop, il faut avouer que les suivants paraissent plus intéressants, foisonnants, passionnants…  Il nous en reste donc cinq. Reconstituons une empoignade typique des Beatles's fan :

Le meilleur, c’est RUBBER SOUL (1965), c’est là que commencent réellement les hostilités, la métamorphose, le coup de génie ! Entre temps ils ont croisé Bob Dylan ! Ils écrivent tout, plus de reprises rock’n’roll comme au début. « Drive my car », « Nowhere man », « Norwegian wood » c’est du luxe ! Et puis il y a les expériences de la scène…
La scène ? Les Beatles n’ont jamais été un groupe de scène ! Ultime prestations en 1966 à San Francisco. Les filles hurlaient tellement qu’on n’entendait rien ! Qu’on couvre les hululements de Christophe Maé en brayant plus fort, soit, mais pas les Beatles ! Vous connaissez des "Live at machin-chose" des Beatles vous ? (Non, mais le "Live from le toit de la maison de disque" en 1969, oui !). Ces gars étaient des pros du studio, donc le meilleur c’est SERGENT PEPPER (1967), le plus connu, le concept-album, les enchainements, l’avalanche de tubes « St Pepper », « With a little help », « Lucy in the sky »… la stéréo, les innovations techniques, les instruments cosmopolites, et puis « A day in life », le plus fabuleux morceau de l’histoire ! SERGENT PEPPER donne ses lettres de noblesse au format 33 tours et révolutionne l'industrie du disque par la même occasion.
Il est trop court, à peine le temps de reconnaitre les gens de la pochette que déjà le disque est fini ! Les titres connus ne cachent pas, hélas, d'autres morceaux insipides et gentillets. Non, PEPPER marque déjà la fin, une caricature prétentieuse. Le meilleur c’est REVOLVER (1966) qui finalise ce que RUBBER SOUL n’avait fait qu’esquisser. Le premier album psychédélique, avec les bandes accélérées, inversées, les chansons avec des héros ordinaires, fini les plans adolescents « I love you because you love me, oh yé » ! REVOLVER contient "Mr Taxman" et "Eleonor Rigby" et son double quatuor à cordes. Inédit et génial !
Non mais les mecs, vous délirez ! LE DOUBLE BLANC (1968), vous avez écouté le DOUBLE BLANC ? Ça fait feu de toutes parts, hurlant, tonitruant, toujours expérimental, mais aussi un retour au rock, au blues, sanguin, engagé. C’est un double album, chacun y va de sa chanson, George Harrison nous pond "While my guitar gently weeps" avec Clapton au solo, mince ! Et puis « Yer blues », « Back in USSR », « Helter Skelter », « Blackbird » « Révolution »… L’album le plus monstrueux, le plus créatif, qui éclipse les autres !
Il fait trente chansons le double-machin ! La moitié est à jeter ! Chacun bossait dans son coin… Ambiance de merde, y’a pas d’unité ! Même George Martin (producteur historique, appelé aussi le "cinquième Beatles") a dit que sorti en simple, écrémé du surplus, alors oui, il aurait été le plus grand. Alors que ABBEY ROAD n’est ni trop long, ni trop court, il est parfait !


Et voilà où je voulais en venir, c’est qu’ABBEY ROAD, ben… il est parfait ! Autant que les autres, mais un tout petit peu plus quand même ! Et puis c’est la dernière fois qu’ils bossaient ensemble, les quatre loustics. Mais le dernier, ce n’est pas LET IT BE ? Bonne question : oui et non… le dernier qui est paru, oui, mais pas le dernier à avoir été enregistré, rapport aux fameuses bandes que Phil Spector a piquées, pour partir bosser dessus pendant six mois, rajouter des violons partout. Mais ABBEY ROAD n’a pas été fabriqué à partir des chutes du DOUBLE BLANC et des GET BACK SESSIONS ? Encore une bonne question : comme cela se fait souvent, on compose, on trie, on jette, on reprend… Mais dire qu’ABBEY ROAD est constitué de fonds de tiroirs, faut pas pousser ! En tout cas, ABBEY ROAD marque un retour vers l’enregistrement classique, le désir, avant de se séparer, de jouer et enregistrer à l’ancienne, ce qui avait été le vœu déjà pour les sessions de LET IT BE avant que Spector y mette son grain de sel. Ecoutez LET IT BE NAKED, et vous entendrez les Beatles jouer au naturel, avec Billy Preston aux claviers.

ABBEY ROAD est constitué de 17 chansons, pour une durée de 47 minutes. Des chansons courtes, et des chansons longues (assez rares chez eux), des chansons simples, limpides, d’autres plus complexes. Les chansons courtes ne sont-elles pas inachevées ? Bonne question : oui et non. Ce qui nous amène à parler du fameux medley, cette face B mythique ! J’ai découvert ABBEY ROAD en vinyle (l’avantage des grandes sœurs…), et bon sang, cette face B ! Encore aujourd’hui je me souviens de l’impression ressentie à l’époque. Alors oui, il y a des chansons inachevées, mais toutes ont été réarrangées, et réenregistrées pour ABBEY ROAD, pour de vrai. Ce n’est pas un simple collage. Un tout petit titre a été laissé de côté, le plus court de l'histoire (23 secondes !) rangé en bout de bande, oublié, et non crédité à l’époque, mais bel et bien gravé : "Her majesty". La mode des morceaux cachés était née ! ABBEY ROAD c’est "Come together" (du 5 étoiles) suivi de la plus belle chanson de George Harrison "Something", chef d’œuvre absolu. C’est dire le niveau. On ne va pas les défiler en revue, mais je trouve "I want you, she’s so heavy", une composition de Lennon, absolument dantesque, hypnotique, hors norme, entêtante avec ses relents de Pink Flyod, et cette coupure brutal à 7'44 !  Il y a aussi "Here’s comme the sun" (d'Harrison), "Octopu's garden" (de Ringo Star, inoubliable ritournelle !) et donc le medley, avec l'enchaînement "Polythene Pam" / "She come through the bathroom window" que j’adore, même reprise par Joe Cocker, et "Carry that weight" qui reprend au cor le thème de "You never give me your money"... La dernière touche est la bien nommée "The end" avec un solo de Ringo Star à la batterie (eh oui !) et des 4X4 de guitares des trois autres. Et ABBEY ROAD c'est aussi ce qu'on n'y trouve pas : la chanson indienne au sitar !
- T'aimes pas les chansons indiennes ?
- Siiii, énormément, je n'écoute que ça d'ailleurs, au p'tit dèj de préférence...

On ne peut pas évoquer ABBEY ROAD sans parler de sa célébrissime pochette, photographiée en 10 minutes en face des studios, une des plus reprises et pastichées, et prétexte à mille interprétations ésotériques. Rappelons que la rumeur donnait Paul McCartney pour mort, d’ailleurs il est le seul à marcher nu pied (c’est un signe !) et la plaque d’immatriculation de la voiture garée affiche « IF 28 » signifiant  « s’il était vivant, il aurait 28 ans ». C'est pas plus bête que les illustres mises en garde des associations catho : quand on écoute un disque des Beatles à l'envers, on entend des messages du Diable ! 

ABBEY ROAD c’est colossal, mais pas ronflant, c’est rythmé, ludique, magique, ingénieux. L’Everest en plein soleil. Et il sortait au moment de LET IT BLEED des Stones, et du LED ZEPELLIN II. On croit rêver ! ABBEY ROAD c’est la deuxième meilleure vente des Beatles après SERGENT PEPPER. A l’époque, ceux qui vendaient le mieux, étaient tout simplement les plus talentueux. CQFD.

TOC TOC TOC

- Ouais ? Ah Rockin'...
- Tu bosses sur quoi ?
- Abbey Road
- Wouah ! !  Est-ce que tu as dis que... et que... et puis que...
- Euh, écoute, le plus simple c'est que tu le dises toi même, vas-y, le siège est chaud...

- Ben tu sais c'est qu'il y en a des choses à raconter sur Abbey Road... je sais pas si nos lecteurs ont le temps et puis tout ça c'est connu, comme tu l'as dit y'a des piles de bouquins sur les Beatles, je voudrais pas rabâcher...
- Bah, tout le monde ne les a pas lus.
- Bon, t'as parlé de la pochette, ça c'est fait ; mais si on parlait un peu des titres "come together" par exemple, tu connais son histoire ?
- Vaguement, c'était pas prévu pour être un hymne de campagne ?

John et Yoko en plein "bed-in" , à Amsterdam
- Tout juste! De Timothy Leary qui briguait le poste de gouverneur du Texas en 1969, contre un certain Ronald Reagan... Leary et sa femme faisaient partie des invités par John et Yoko à assister à un de leurs fameux "bed-ins" dans un Hôtel de Montréal - tu sais à moitié à loilpé dans leur pieu pour protester contre le Vietnam - et se retrouvent embarqués dans les choeurs de "give peace a chance" ! Ils sympathisent et John propose à Leary de lui composer un hymne pour sa campagne autour de "come together, join the party", son slogan et John lui en enregistre effectivement une version. Là dessus Lennon rentre en Angleterre et enregistre le titre avec les Beatles, il sortira en face B de "Something". La campagne de Leary tournera court, car en décembre 69 il est arrêté en possession de marijuana...
- Marie qui ? 
- Une copine à Philou...
- OK, mais y'a pas une histoire avec Chuck Berry aussi autour de ce titre ? 
- Si ! les 2 premiers vers sont empruntés à "You can't catch me" du Chuck, qui l'envoie en justice pour plagiat. John plaidera l'hommage et s'en sortira contre la promesse enregistrer des titres de Berry, ce qu'il fera sur son album "Rock'n'roll".
au centre, George Martin, à l'heure du thé
- Hé ben quelle histoire ! Allez tonton JL, une autre !
- Y'a aussi "Here comes the sun", écrite par George Harrisson, lors d'une journée passée chez son poto Clapton. Un truc tout bête, plein d'optimisme, en réaction au ras le bol que lui procurait la vie de Beatles à cet instant, entre réunions d'affaires et avocats...
- C'est vrai que ça sentait le sapin pour les Beatles... et Polythene pam au fait c'était qui ?
- Y'a plusieurs hypothèses : elle serait inspirée d'une fan de la première heure des Beatles, époque de la Cavern de Liverpool, une certaine Pat Hodgett surnommée Polythene Pat à cause de son gout pour le polyéthylène qu'elle mangeait ! Et John a également trouvé son inspiration chez une dénommée Stéphanie, compagne du poète "beat génération" Royston Ellis - celui qui fit découvrir la dope aux Beatles à Guernesey, durant l'été 1960, celle-ci ne s'habillant que de fringues en polyéthylène...
- Encore ! Encore ! Une dernière pour la route ?
-"She comes in throught the bathroom window", que tu aimes beaucoup, est inspirée d'une histoire vraie : l'intrusion d'une fan chez Paulo  (Paul McCartney), qui s'introduisit en son absence par la fenêtre de la salle de bain à l'aide d'une échelle, puis ouvrit à ses copines qui mirent tout sens dessus dessous et embarquèrent des souvenirs. Une de ses fanas (fadas?) finit d’ailleurs par bosser chez Apple (la maison de disques, pas la boite à Steve Jobs, décédé hier !)
- Ben merci Rockin', là, je crois qu'on est complet ! J'savais pas que t'étais fan à ce point des scarabées ! 
- Moi ? Mais nooooooooon ! J'suis Stones !  Kinks ! et Who !
- ???!!!!

On écoute (et on regarde cet étrange clip bucolico-matrimonial) "Something" écrite par George Harrisson.


Et puis le slow d'enfer de McCartney (j'adore !) "Oh darling"


ABBEY ROAD des Beatles (1969)

6 commentaires:

  1. Merci le deblocnot ! Même si je ne partage pas les réserves sur Sgt Peppers. Je vous conseille la lecture de "En studio avec les Beatles" de Geoff Emerick. Un bouquin fabuleux et passionnant, qu'on aime ou pas les Beatles. Un des tous meilleurs livres que j'aie lus sur la musique. Il explique (techniques à l'appui) toute l'évolution de la musique des années 50 à aujourd'hui, y compris les limites actuelles dues aux infinies possibilités offertes par la technologie actuelle. bon je ne suis peut être pas clair, mais RUEZ VOUS SUR CE LIVRE !!!
    Christian des Chics Types

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  2. Honnêtement, je ne partage pas non plus cet l'avis sur Sergent Pepper ! Mais il se trouve que ce sont des arguments que j'ai entendus, donc je les ai reproduits ! Le bouquin en question, j'en avais entendu parler, et visiblement il est passionnant. Merci du passage Christian. Luc.

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  3. Rectification
    Le meilleur disque des Beatles, c'est Pet sounds des Beach Boys, Forever changes de Love ou Village green des Kinks ...
    Bon, ça va, je sors ...

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  4. Quelle joie ! Oui, je pense également que "Abbey Road" est le plus beau de tout les albums enregistrés par les Beatles. le plus complet, le plus abouti et le seul de leurs opus dont je ne me laisse jamais du début à la fin donc de "Come together" à "The end" . Et puis que de tubes sur cet album , des titres magiques, des ambiances incroyables comme le titre qui précède "Here comes the sun" avec ce bruit étrange que l'on entend juste à la fin avant que ..Le soleil de George Harrisson ne fasse son apparition . Sans oublier comme évoqué (of course) la pochette de "Abbey Road" qui marque à jamais le monde entier.

    J'aime aussi "Sergent Pepper's" que je place juste après , car , comme vous le dites , il y a quelques chansons un peu faibles mais il y a tout de même ce chef d'oeuvre "A day in the life" sublime !! . Tout çà est culte de toute façon !

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  5. Quelle joie ! Oui, je pense également que "Abbey Road" est le plus beau de tout les albums enregistrés par les Beatles. le plus complet, le plus abouti et le seul de leurs opus dont je ne me laisse jamais du début à la fin donc de "Come together" à "The end" . Et puis que de tubes sur cet album , des titres magiques, des ambiances incroyables comme le titre qui précède "Here comes the sun" avec ce bruit étrange que l'on entend juste à la fin avant que ..Le soleil de George Harrisson ne fasse son apparition . Sans oublier comme évoqué (of course) la pochette de "Abbey Road" qui marque à jamais le monde entier.

    J'aime aussi "Sergent Pepper's" que je place juste après , car , comme vous le dites , il y a quelques chansons un peu faibles mais il y a tout de même ce chef d'oeuvre "A day in the life" sublime !! . Tout çà est culte de toute façon !

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  6. Pour moi c'est le meilleur album, en tous cas celui qui a le mieux vieilli.McCartney est aux manettes ( que serait Come together de Lennon sans la guitare basse?) La "suite" face 2 de McCartney est un bijou de composition.
    J'ai du mal a écouter aujourd'hui Sgt Peppers (j'avais 18 ans a sa sortie)
    Robert de Benoist

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