mardi 12 octobre 2010

ELLIOT PERLMAN "Trois dollars "(1998 - 2006) , par Elodie



Jeune avocat Australien, Elliot Perlman (photo ci-contre) aurait pu être l’incarnation idéale de la société ultra libérale. Ecrivain qui a su se forger une solide réputation en seulement deux romans, Eliott Perlman est aussi le représentant d’une critique de ce modèle social régi par le profit et la productivité. C’est en tout cas clairement le propos de son premier roman, TROIS DOLLARS, écrit en 1998 mais traduit en France après le succès d’AMBIGUITES.


« Trois dollars », c’est tout ce que possède Eddie, anti-héros par excellence, quand il se retrouve ce matin d’hiver sur un quai de gare à Melbourne. Pourtant Eddie est diplômé et cultivé, il a une bonne expérience comme ingénieur, il possède un pavillon agréable, il est marié à une femme intelligente et il est le père d’une adorable gamine. Comment en est-il arrivé là ? Avec un fil conducteur original, celui des rencontres du héros avec son amie Amanda, « tous les 9 ans et demi », le roman retrace donc le chemin et la chute inexorable d’Eddie, dans le Melbourne de la fin du XXème siècle.



La gare de Melbourne.



Mais ne vous attendez pas pour autant à lire une version revue et corrigée du BUCHER DES VANITES ! Ici, pas d’enchaînement dû au hasard qui fait dégringoler un puissant vers le ruisseau. L’histoire est plus simple, plus pathétique parce que plus réaliste. C’est celle de n’importe qui, de gens comme vous et moi qui essaient de mener leur vie en accord avec leurs principes et sans faire de dégâts collatéraux, mais qui se retrouvent confrontés à la cruauté du monde actuel.

Si la critique sociale est acerbe, le ton choisi est celui de l’humour et de la tendresse. Elliot Perlman a une plume originale et intéressante pour raconter la vie finalement plus tragique que comique de son héros indéniablement attachant. Eddie est amoureux de sa femme et fou de sa fille, il est serviable et il aime la musique - le livre n’est pas avare en références musicales. Bref, Eddie c’est un peu chacun de nous, et très certainement une bonne part de l’auteur lui-même, et il faudrait être un cœur de pierre pour ne pas ressentir une forte empathie pour lui.

Dommage toutefois que le roman traîne souvent en longueur et que certaines lourdeurs ou répétitions dans les idées ralentissent encore le déroulement de l’histoire. Le rythme en est de plus trop souvent cassé par les propos qui signent l’engagement politique de l’auteur. L’histoire est en elle-même suffisamment évocatrice des excès du modèle économique actuel pour ne pas avoir à en rajouter. A trop vouloir servir son idée, Elliot Perlman lasse le lecteur. Au final on se retrouve un peu frustré, avec le sentiment de tenir un premier roman séduisant, mais qui ne parvient pas à s’émanciper des défauts d’un premier roman.
Avec un peu d’optimisme – et un peu d’optimisme, ça ne peut pas faire de mal – on peut toujours se dire que cela donne envie de lire AMBIGUITES, et de voir si Elliott Perlman est parvenu à maîtriser davantage un talent prometteur.

Le livre a été adapté
au cinéma en 2005
par le réalisateur australien
Robert Connolly.
A priori jamais distribué en France.








TROIS DOLLARS (2006 pour la traduction française, 1998 pour la parution en Australie) chez Robert Laffont, 402 pages + édition de poche 10/18.

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